“L’Église triomphante”, un tableau qui sort du commun

Paris Notre-Dame du 14 mars 2024

Œuvre finaliste de l’opération du Plus Grand Musée de France, L’Église triomphante de Paolo de Matteis est un tableau exceptionnel à plus d’un titre. Entretien avec Caroline Morizot, responsable de l’inventaire et de la conservation à la Commission diocésaine d’art sacré.

© L’Église triomphante - Matteis - Diocèse de Paris

Paris Notre-Dame – Pourquoi avoir choisi de présenter cette œuvre ?

Caroline Morizot – Les œuvres du patrimoine diocésain sont très variées, de la peinture murale à la mosaïque monumentale en passant par ce type de tableau. Cette œuvre fait partie de celles qui se détachent par sa qualité et son histoire. Elle est une version autographe de la coupole du Gesù Nuovo à Naples (Italie), peinte vers 1715 par l’artiste italien, Paolo de Matteis. En 1776, un tremblement de terre fait disparaître la coupole et l’œuvre avec. Il ne reste aujourd’hui que trois tableaux quasi identiques de l’œuvre initiale dont une en France, à St-François-de-Sales (17e). Ce sont les seuls vestiges. À l’origine, ces tableaux ne sont pas destinés à être dans une église mais passent par le marché de l’art et sont vendus à des collectionneurs fortunés. L’Église triomphante a été offert à la paroisse par Jacques Rouché, directeur de l’Opéra de Paris de 1914 à 1945 et grand collectionneur. Tous ces éléments font de ce tableau une œuvre d’exception.

P. N.-D. – Existe-t-il encore des zones d’ombre sur son histoire ?

C. M. – Nous menons un véritable travail d’enquête ! C’est une œuvre difficile à décrypter, riche en détails et élaborée par les jésuites. Nous pensons qu’ils l’ont commandée à Paolo de Matteis. Nous avons été aidés par une spécialiste de l’iconographie religieuse, Sylvie Bethmont. Il faut imaginer un décor monumental, pensé pour une coupole. La Vierge est au centre, entourée d’une cour céleste avec des jésuites, saint Ignace de Loyola et saint François-Xavier. Salomon et la reine de Saba sont représentés en partie basse. Cette rencontre préfigure celle entre l’Église et le Christ. Pour ce qui est de l’histoire du tableau, je recherche toujours la date d’achat et, avant cela, la date de sa mise en vente. J’ai consulté les archives de la paroisse, qui avait une sorte de bulletin paroissial avec beaucoup d’informations ; mais ces publications s’arrêtent sous l’Occupation, pour ne reprendre que bien plus tardivement. Nous sommes donc face aux limites des archives, car ce tableau aurait été donné entre 1940 et 1950.

P. N.-D. – Pouvez-vous nous en dire plus sur sa restauration ?

C. M. – Quand nous avons décroché ce tableau de St-François-de-Sales, pour l’exposer au Collège des Bernardins en octobre dernier, on s’est rendu compte, au revers du tableau, que le châssis, colonne vertébrale qui tient la toile à l’arrière, n’était qu’un bricolage. Nous avons demandé un bichonnage par une restauratrice avant l’exposition et un décrassage d’urgence. Mais ce n’est pas suffisant. Aujourd’hui, nous prenons le temps pour sa restauration qui est estimée à 8 000 €. Nous l’avons proposé au Plus Grand Musée de France, une campagne de sauvegarde des œuvres d’art en péril, et nous sommes parmi les trois finalistes pour la région Île-de-France. Constitué de petits trésors, le patrimoine diocésain mérite d’être conservé grâce au concours des restaurateurs professionnels... Les votes sont ouverts jusqu’au 21 mars !

Propos recueillis par Marie-Charlotte Noulens

Pour en savoir plus et voter
sauvegardeartfrancais.fr

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