Indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne : de quoi s’agit-il ?

Cette note de Vatican News revient sur les tensions dans l’Église orthodoxe d’Ukraine. « Une nouvelle étape dans le long processus d’indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne vient d’être franchie, jeudi 11 octobre, avec, entre autres, la réintégration de Philarète Denisenko, patriarche non canonique de Kiev, excommunié par Moscou il y a onze ans. »

Une nouvelle étape dans le long processus d’indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne vient d’être franchie, jeudi 11 octobre, avec, entre autres, la réintégration de Philarète Denisenko, patriarche non canonique de Kiev, excommunié par Moscou il y a onze ans.
Delphine Allaire – Cité du Vatican

L’annonce du Patriarcat de Constantinople, considéré pour des raisons historiques comme chef spirituel de l’Église orthodoxe, est tombée en fin de journée, jeudi 11 octobre, à l’issue de deux jours de saint-synode sur les rives du Bosphore à Istanbul.
La réunion de tous les évêques orthodoxes sous la juridiction de Constantinople (dont le plus grand nombre appartient à l’Église orthodoxe grecque) a ainsi acté plusieurs nouveautés concernant les orthodoxes d’Ukraine.

Que représente l’Église orthodoxe ukrainienne ?
Aujourd’hui, les orthodoxes en Ukraine sont divisés : les uns sont rattachés à Moscou, les autres à un Patriarcat de Kiev non canonique, fondé à la chute de l’URSS, par Philarète alors excommunié par Moscou pour avoir créé une Église orthodoxe ukrainienne dont il s’était autoproclamé patriarche. Outre ces deux Églises orthodoxes ukrainiennes, l’une dépendante de Moscou, l’autre dépendante - non canoniquement - de Kiev, l’on note l’existence d’une troisième communauté orthodoxe ukrainienne. Plus minoritaire, elle est emmenée par Mgr Macaire Maletitch et se prénomme « Église orthodoxe autocéphale ukrainienne ». Cette appellation n’a toutefois rien à voir avec le fameux processus d’autocéphalie enclenché par le Patriarcat de Constantinople pour réunir toutes ces Églises ukrainiennes.
Au niveau mondial, l’Église orthodoxe, beaucoup moins centralisée que l’Église catholique, est formée de 14 juridictions ecclésiastiques autocéphales. Si le Patriarcat de Constantinople est donc pour des raisons historiques, considéré comme le chef spirituel de l’orthodoxie, le Patriarcat de Moscou est de loin la force la plus importante de l’orthodoxie mondiale sur le plan démographique, son autorité spirituelle faisant loi sur plus de la moitié des 300 millions d’orthodoxes que compte le monde.

Qu’a décidé le Patriarcat de Constantinople lors du saint-synode d’octobre ?
Au terme de ses deux jours de saint-synode tenu en Turquie, le Patriarcat de Constantinople a donc annoncé « renouveler la décision déjà prise, selon laquelle il procède à l’octroi de l’autocéphalie à l’Église d’Ukraine ».

L’autocéphalie n’est cependant pas encore proclamée ; il s’agit d’un long processus qui vient simplement d’être consolidé dans cette direction. Il manque encore un chef spirituel et une structure clairement définie à l’Église orthodoxe ukrainienne pour pouvoir se dire « autocéphale », du grec autoképhalos, « qui est sa propre tête », c’est-à-dire, indépendante à tout point de vue.

Ce 11 octobre, Constantinople a décidé de rétablir Philarète « dans sa dignité épiscopale », et non comme Patriarche, et de réintégrer Mgr Macaire Maletitch, qui se trouvait aussi « en schisme », soit en situation non canonique, ni dépendant de Moscou, ni de Constantinople.

Au cours de ce saint-synode, il a aussi été décidé de révoquer « les dispositions légales de la lettre synodale de 1686 », rattachant Kiev au Patriarcat de Moscou.
Quelles conséquences pour les relations entre Constantinople, Kiev et Moscou ?
L’Église orthodoxe russe a qualifié cette décision de « catastrophe » et de « schisme ». Le Patriarcat de Constantinople a « franchi la ligne rouge », selon le Patriarcat de Moscou. Souvent tendues, les relations entre les deux Églises se sont particulièrement dégradées avec l’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014.

Le Patriarche Philarète a lui affirmé jeudi que les paroisses orthodoxes ukrainiennes qui, à l’avenir, ne reconnaîtront pas la nouvelle Église autocéphale, pour rester liées au Patriarcat de Moscou, auront le droit d’exister, mais n’auront pas le droit de s’appeler « Église ukrainienne ». Ces paroisses devront se présenter en tant qu’« Église russe ».

Il faut savoir qu’en Ukraine les paroisses dépendantes du Patriarcat de Moscou, au nombre de 12 000, sont numériquement supérieures à celles du Patriarcat œcuménique de Constantinople. Leur sort demeure donc encore incertain.
La réponse formelle et officielle du Patriarcat de Moscou à cette décision du Patriarcat de Constantinople sera donnée lors de la réunion du saint-synode russe orthodoxe, qui se tiendra lundi 15 octobre, à Minsk en Biélorussie.
Source : Vatican news - 12 octobre 2018

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