L’édito de Mgr de Sinety du 26 septembre 2019
« Il faut, vraiment, que nos responsables et nos élus, prennent conscience que la solution au problème des gens n’est pas d’abord une affaire de pognon. Le travail de l’Etat doit être de donner un cadre qui simplifie la vie de ceux qui aident et de ceux qui sont aidés, afin de les faire accéder au plus vite à l’autonomie.
». À écouter cette semaine : "Conversation de comptoir
", la chronique de Mgr Benoist de Sinety, vicaire général, au micro de RCF.
Dans le débat qui secoue de manière spasmodique notre société au sujet des migrants par exemple : on entend depuis plusieurs jours un certain nombre de gens qui disent un peu n’importe quoi.
Ainsi, telle ancienne Garde des sceaux qui parle de supprimer le droit de recours pour les personnes dont les demandes ont été déboutées. Supprimer le droit de recours ? Ah ben ça alors, en voilà une idée... Autant supprimer le Droit tout court ! Dans une discussion autour d’un zinc le matin tôt, à condition de préférer les ballons de rouge au petit noir, on ne trouverait rien à redire à une telle suggestion. Mais là, franchement ??? il faut avoir été un bien mauvais élève en Droit pour ignorer que, de surcroit, une telle réforme est quasi impossible techniquement.
Autre exemple, l’histoire de l’Aide Médicale d’Etat, la fameuse AME dont on évoque la réduction ou la suppression pour un certain nombre de catégories. En partant du prétexte, comme le dit un député en mal de publicité, que certaines s’en serviraient pour se faire poser des prothèses mammaires... Mais de quoi parle-t-on ? de qui parle-t-on ? que des petits malins ou des escrocs se glissent entre les mailles pour profiter d’une situation remet-il en cause la justesse de l’aide ? D’autres proposent de n’assurer la gratuité des soins que pour les urgences médicales. Posons donc la question simplement : un diabétique est-il une urgence médicale ? Il le devient si, faute de gratuité de son traitement, il doit être pris en charge dans le coma. Et quid de la bronchite ? Pour un adulte en bonne santé, elle peut n’être que gênante, mais pour un enfant de 3 ans ?
En fait, on prononce des paroles comme s’il s’agissait de remplir de mots un débat pourtant essentiel et qui, par certains aspects, semble bien lancé lorsqu’il est question d’aborder la question de l’aide au développement des pays de départs et de simplification des procédures européennes.
La grande inquiétude qui nous saisit est celle du peu de cas dans lequel on tient les plus petits lorsque l’on parle ainsi de leur destinée en se référant à des données purement comptables.
Il faut, vraiment, que nos responsables et nos élus, prennent conscience que la solution au problème des gens n’est pas d’abord une affaire de pognon. Il ne suffit pas non plus de permettre aux pauvres un accès au droit pour que, comme par magie, les choses s’arrangent. Encore faut-il ne pas le leur compliquer au risque de le rendre impossible. Il faut encourager, soutenir, appuyer l’œuvre sur le terrain, menée par les associations et les personnes privées. Le travail de l’Etat doit être de donner un cadre qui simplifie la vie de ceux qui aident et de ceux qui sont aidés, afin de les faire accéder au plus vite à l’autonomie.
Les migrants, pas plus que quiconque, ne sauraient devenir le jeu des débats de campagne, le personnel politique vaut mieux que cela, notre pays vaut mieux que cela. A un moment de notre histoire où les mots semblent perdre leur sens, à commencer par les plus basiques et les plus essentiels comme « père » et « mère » par exemple, ne perdons pas de vue, au moins, et par pitié, le sens que l’Evangile donne à celui de " prochain"