L’édito de Mgr de Sinety du 5 septembre 2019
« On peut aussi ne voir les choses que sous l’angle du problème et se laisser ainsi entraîner à une morosité qui n’augure rien de bon. Mais on peut aussi s’émerveiller de la manière dont certains, face aux épreuves, œuvrent avec vigueur pour la justice et la vérité. ». À écouter cette semaine : « Deux façons d’envisager sa rentrée ! ». Mgr Benoist de Sinety, vicaire général, donne son regard sur l’actualité au micro de RCF.
En jonglant avec les week-ends et les jours fériés, nous voici tentés de faire de ces douze prochains mois un magnifique aqueduc à force d’y additionner les ponts en tous genres ! Nous voilà bien, à peine rentrés et déjà obligés de nous creuser la tête pour calculer nos prochains jours de repos !
Il faut dire qu’entre les promesses de faillite généralisée, au milieu des incendies d’Amazonie et d’Afrique subsaharienne, on peut se sentir un peu plombés par l’actualité. On peut aussi ne voir les choses que sous l’angle du problème et se laisser ainsi entraîner à une morosité qui n’augure rien de bon.
Mais on peut aussi s’émerveiller de la manière dont certains, face aux épreuves, loin de se laisser abattre, œuvrent avec vigueur pour la justice et la vérité. A deux reprises hier j’en ai eu l’occasion : d’abord en discutant avec un ami de longue date. Prêtre indien, il ne se résout pas à ce que dans l’Eglise de son pays le système des castes puisse perdurer. Comment des catholiques peuvent ils en exclure d’autres sous le prétexte qu’ils seraient Intouchables ? Comment faire bouger les choses dans son Eglise et d’abord dans le clergé ? Il frappe à toutes les portes, réfléchit, interpelle, ne se décourage pas.
Et puis ce fut un autre prêtre, rentré de plusieurs années en Afrique du Sud qui me décrit les tensions très vives entre les plus pauvres : ceux du pays et ceux qui arrivent des pays voisins comme le Congo ou le Zimbabwe. Et de me raconter la manière que les paroisses ont, de jeter des ponts et créer des passerelles entre communautés afin que la violence et la haine n’y étouffent pas la foi.
Et comment ne pas penser à ce qui se joue en ce moment même à Hong Kong ? Entre une chef de l’exécutif, catholique, et des manifestants épris de liberté ? Elle qui reconnait que "pour un chef de l’exécutif, avoir plongé Hongkong dans cet immense chaos est impardonnable. Simplement impardonnable" et qui ajoute : "si je pouvais, la première chose que je ferais serait de partir, après avoir présenté mes plus profondes excuses". Eux qui reprennent en foule des chants de paix parmi lesquels le fameux "Sing Alleluia to the Lord !". Nul ne sait ce qu’il adviendra à l’autre bout du monde. Mais ce qui y est semé par ces paroles et par ces chants ne pourra pas être durablement étouffé.
Alors, nous pensons en ce début septembre aux ponts à bricoler pour prévoir nos vacances, pensons aussi à ceux, tellement plus utiles et vitaux, qu’il nous faut risquer de bâtir pour que, chez nous, dans les mois à venir, les hommes choisissent de se parler plutôt que de s’invectiver. Prenons le temps de construire la paix avant de mettre nos énergies à rêver notre confort.