L’édito de Mgr Benoist de Sinety du 30 avril 2020

RCF – 30 avril 2020

« Les déclarations du Premier Ministre sur la reprise des cultes le 2 juin témoignent pour Mgr de Sinety du manque de culture religieuse de notre gouvernement. » À écouter cette semaine : “Reprise des cultes : que faire face au mépris du gouvernement ?” La chronique de Mgr Benoist de Sinety, vicaire général, au micro de RCF.

Deux jours après les annonces de tribune, fut-elle parlementaire, sur le déconfinement de notre pays, différents sentiments se succèdent dans le cœur de nombreux croyants. Celui d’être méprisé par un monde politique, qui n’a décidément aucune culture religieuse, semble l’emporter chez beaucoup. À vrai dire on ne comprend pas. Il y a en France des dizaines de milliers d’églises, et probablement moins de dix où les forces de l’ordre aient pu suspecter, souvent à tort, des velléités de désobéissances par rapport aux consignes données partout et par tous les évêques depuis six semaines. On peut dire ce que l’on veut, mais les catholiques sont des citoyens obéissants et respectueux. Ils savent s’organiser pour la défense du bien commun, lorsque les services publics aux premières heures de la crise que nous connaissons se sont révélés souvent tellement défaillants pour porter secours aux plus petits.

Pense-t-on vraiment que les mêmes qui ont réussi à organiser en à peine trois jours la distribution de milliers de repas, les mêmes qui, en 24 heures, pour la seule ville de Paris ont réussi à mobiliser plus de 1500 volontaires, soient incapables d’accueillir dans les églises, de manière responsable, ceux qui veulent légitimement y célébrer leur foi et y puiser le courage d’être pour leurs frères les témoins de l’espérance ?

Mais il nous faut aussi tenir compte d’un principe de réalité qui s’impose à nous : il y a en France, plusieurs religions qui coexistent. Et, dans un pays digne de ce nom, on ne peut imaginer qu’une loi s’applique différemment aux citoyens selon leurs cultes. On a le droit, et c’est mon cas, d’être abasourdi lorsque l’État choisit de discuter de la reprise des célébrations publiques en invitant à la même table et au même moment les présidents des loges et les responsables religieux. Comme si le Grand Orient avait une quelconque légitimité à dire les horaires d’ouverture d’une synagogue ou d’une basilique. On peut y voir de la provocation ou de l’ignorance, encore. On a le droit aussi de sourire avec compassion devant la confusion du conseiller de ministre qui a dû insister sur l’importance du 2 juin car c’était le lendemain du lundi de Pentecôte, à connotation trop chrétienne, alors que depuis belle lurette il a perdu tout caractère festif… Mais pour le reste, impossible de distinguer entre les religions, d’autant que nombre de Musulmans vivent ces restrictions avec beaucoup de douleur : habitats exigus, difficulté de trouver des places dans les cimetières pour leurs défunts... Ils sont aussi parmi les premières victimes de la vague de pauvreté qui déferle sur le pays…

Puisqu’il est désormais avéré qu’existe une forme d’autisme religieux, plutôt que de protester et de nous indigner avec forces déclarations émouvantes, montrons leur ce que nous sommes. Montrons leur le visage de celui qui nous donne d’être. A nous de trouver, dans l’outrage que provoque cette indifférence, un désir plus grand de vivre pleinement la célébration eucharistique en nous mettant résolument au service de nos frères. Au moins cette crise aura eu l’inestimable grâce de montrer à chacun que pour approcher en vérité de l’autel et y communier au corps du Christ, nous devons d’abord revêtir la tenue de serviteur. Le lavement des pieds est partie intégrante de la réception du pain de vie. Puissions-nous en garder la mémoire bien davantage que pour les blessures infligées par l’ignorance ou le mépris.

Source : https://rcf.fr/actualite/societe/reprise-des-cultes-que-faire-face-au-mepris-du-gouvernement

Chroniques de Mgr Benoist de Sinety sur RCF

Chroniques de Mgr Benoist de Sinety sur RCF