Nouvelle traduction du Missel : « Une opportunité pastorale à saisir »

La nouvelle traduction du Missel romain en langue française, disponible depuis le 29 octobre, est entrée en vigueur le 28 novembre, lors du premier dimanche de l’Avent. Son usage sera rendu obligatoire le dimanche 10 avril 2022, jour des Rameaux. Entretien avec le P. Jérôme Bascoul, président de la commission de la pastorale liturgique et sacramentelle du diocèse de Paris.

P. Jérôme Bascoul, président de la commission de la pastorale liturgique et sacramentelle du diocèse de Paris
© Laurence Faure

Paris Notre-Dame – Pourquoi une nouvelle traduction du Missel ?

P. Jérôme Bascoul – Je pense que pour y voir plus clair, il faut avoir en mémoire quelques étapes. En 1570, c’est la pro¬mulgation du Missel par le pape saint Pie V. Même si ce Missel connaît quelques révisions partielles, il faut attendre 1969 pour la promulgation d’un nouveau Missel en latin, révisé suite au Concile Vatican II, qu’on appelle le Missel de saint Paul VI. En 1970, le Missel de Paul VI est traduit dans les langues vernaculaires, et donc en français pour le monde franco¬phone. En 2002, Jean-Paul II promeut une révision du Missel en latin de Paul VI, avec quelques ajouts. Ce que nous recevons aujourd’hui, c’est donc la nouvelle traduction franco¬phone du Missel romain latin de 2002, qui tient compte des modifications du Missel de Paul VI mais aussi des évolutions de la langue française, qui est une langue vivante donc changeante.

P. N.-D. – Peut-on dire que la nouvelle traduction est plus fidèle au latin ?

J. B. – La tendance principale, selon la volonté du pape, c’est très clairement de coller au latin en adoptant une traduction plus littérale que celle de 1970, qui avait opté pour une marge d’interprétation plus grande, permettant la simplification pédagogique ou le commentaire. Pour revoir la traduction française du Missel romain, la Commission épiscopale francophone pour les traductions liturgiques (CEFTL) a été saisie dès 2003. Il faut honorer la volonté de revenir à une traduction plus littérale mais qui reste en même temps en français courant, avec un souci pastoral et une bonne théologie. Tous les formules latines n’ont pas été réintégrées : il n’a pas été jugé bon, par exemple, de traduire mot à mot le « mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa » [ma faute, ma faute, ma très grande faute] mais de privilégier le langage courant, plus sobre : « J’ai vraiment péché. »

P. N.-D. – Quel est l’intérêt pastoral et théologique d’un nouveau Missel ?

J. B. – L’intérêt premier, c’est évidemment de favoriser l’unité de rite pour toute l’Église universelle, et donc l’unité de la foi. D’un point de vue théologique, la nouvelle traduction permet des réajustements. J’en retiens deux. Premièrement, le choix de remplacer « de même nature que le Père » par « consubstantiel au Père » dans le symbole de Nicée-Constantinople. Sous prétexte d’une simplification pédagogique, on avait pris le risque de proclamer une contradiction formelle avec notre foi, laissant sous-entendre plusieurs êtres divins, alors que le dogme de la sainte Trinité proclame une seule substance, qui traduit littéralement le mot grec de symbole, un seul être divin distingué en trois Personnes : Père, Fils et Saint-Esprit. La nouvelle traduction permet également de réintroduire tout le dialogue du sacrifice au moment de la prière sur les offrandes, qui avait été minoré auparavant. Désormais, on dit « mon sacrifice, qui est le vôtre » : cette distinction plus forte, plus marquée, est aussi théologiquement plus fidèle.

P. N.-D. – Que dire aux fidèles déboussolés par ces changements ?

J. B. – Il y a une opportunité pastorale à saisir. Pour les célébrants, l’objet lui-même a changé, et il est nécessaire de se le réapproprier. C’est l’occasion de retravailler l’art de célébrer, la gestuelle, les déplacements, le chant. Pour les fidèles, c’est une occasion pastorale de redécouvrir ou d’approfondir ce qui se vit à la messe.

Propos recueillis par Charlotte Reynaud

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