Une nouvelle jeunesse pour l’Institut catholique
Paris Notre-Dame du 31 août 2017
Après deux ans de travaux, l’Institut catholique de Paris (6e) inaugure, le mardi 3 octobre, les 5 000 mètres carrés rénovés de son campus. Son recteur, Mgr Philippe Bordeyne, détaille les grandes lignes de cette métamorphose.
Paris Notre-Dame – Pourquoi l’Institut catholique de Paris (ICP) a-t-il entrepris un grand chantier de rénovation ?
Mgr Philippe Bordeyne – Nous avions l’obligation de remettre aux normes certaines parties du campus pour améliorer l’accessibilité des personnes à mobilité réduite et la sécurité, et nous avions aussi besoin de réorganiser nos espaces face à l’augmentation de nos effectifs d’étudiants. Le projet place l’étudiant au centre du campus, avec les espaces de l’aumônerie et de la vie étudiante, et nous avons gagné 1000 m² en créant le sous-sol de la cour d’honneur. Nous y avons construit un auditorium de 400 places, alors que jusqu’ici notre plus grand amphithéâtre n’en disposait que de 250. Il accueillera les colloques internationaux de notre unité de recherche Religion, Culture et Société, mais aussi des cours magistraux et des événements ponctuels.
P. N.-D. – Malgré l’espace limité des lieux, l’ICP a préféré rester sur son site historique. Pourquoi ?
P. B. – Ce choix a été mûri avec le cardinal André Vingt-Trois qui préside l’assemblée générale des évêques fondateurs de l’ICP. La présence d’une université catholique au cœur de Paris est un enjeu majeur pour le rayonnement intellectuel de l’Église. Les liens se font bien au plan pastoral avec la Mission étudiante catholique d’Île-de-France. Ensemble, nous manifestons le souci de l’Église catholique pour les jeunes. En outre, pour nos étudiants qui viennent de diverses régions françaises, venir étudier à Paris est une chance et aide à mieux comprendre la société dans laquelle nous vivons.
P. N.-D. – Comment la rénovation architecturale a-t-elle été mise en cohérence avec le projet pédagogique de l’ICP ?
P. B. – Depuis le lancement de notre projet Campus 2018, en avril 2012, notre signature est l’esprit grand ouvert sur le monde. Les travaux ont permis de renforcer les synergies entre les facultés et les instituts. Concrètement, nous avons par exemple réuni tous les instituts du Theologicum (faculté de théologie et de sciences religieuses, ndlr) dans le même bâtiment pour favoriser les collaborations
entre les liturgistes, les dogmaticiens, les biblistes, etc. La transformation des locaux s’accompagne d’un élan d’innovation pédagogique qui met davantage l’accent sur la formation intégrale de la personne, et sur les échanges. Pour ce second point, l’architecte Jean-Marie Duthilleul, très sensible à la relation, nous a apporté une autre vision de nos espaces et nous a aidés à réorganiser les circulations. Le nouveau foyer qui entoure l’auditorium, est l’un des lieux qui favorise les rencontres et le travail interactif. Nous souhaitons aussi développer la collaboration entre enseignants et étudiants – plus développée aux États-Unis et en Angleterre qu’en France – grâce à de nouveaux espaces pour des petits groupes, avec du mobilier modulable.
P. N.-D. – Quel est l’objectif du nouveau « plateau » dédié à l’innovation pédagogique ?
P. B. – Nous avons souhaité disposer d’un espace stimulant pour l’expérimentation pédagogique. Ce plateau est composé de quatre salles : un « laboratoire » pour le travail collaboratif (avec mobilier connecté et modulable, ndlr) ; un studio pour réaliser des projets audiovisuels ; une salle de cinéma pour visionner des films et en même temps interagir pour analyser l’image ; et un « forum », avec deux gradins qui se font face et deux écrans, pour le dialogue et la disputatio, c’est-à-dire la confrontation des arguments, pour servir à la fois l’écoute et l’esprit critique ; l’étudiant devenant acteur. C’est un très bel espace, emblématique de la promotion des humanités classiques et contemporaines.
Visite du campus transformé
La rénovation a été pensée dans le moindre détail, jusqu’à l’éclairage de nuit de la cour d’honneur, dont les spots redessinent les constellations étoilées au moment de la création de l’Institut catholique de Paris en 1875. Avec son équipe, le célèbre architecte Jean-Marie Duthilleul a relevé le défi de révéler la beauté du site et de valoriser son patrimoine historique et spirituel. Le nouvel accès principal, déplacé du 21 rue d’Assas au 74 rue de Vaugirard, rend désormais visible de la rue la façade restaurée de l’ancien couvent des Carmes, construit au début du XVIIe siècle. « Lorsqu’on arrive sur un territoire qui a déjà une histoire, il s’agit de bien s’y intégrer et d’avoir conscience qu’on va en écrire une nouvelle page », souligne Jean-Marie Duthilleul. Le chantier titanesque, dont le coût s’élève à quinze millions d’euros, a permis la transformation de bureaux en dix-neuf salles de cours, au style épuré, dont quatre forment « le plateau » dédié à l’innovation pédagogique (cf. interview). Sur les 5 000 mètres carrés rénovés de l’institut, environ 1 000 ont été creusés dans le sous-sol de la cour d’honneur pour construire un auditorium en chêne clair de 400 places, modulable en deux espaces séparés et visible de l’extérieur grâce aux vitres. « Dans une époque qui a tendance à séparer », Jean-Marie Duthilleul a aussi beaucoup réfléchi « à la recomposition des espaces pour permettre une meilleure mise en relation ». Partant du constat qu’il manquait aux 10 000 étudiants des espaces abrités, hors des bibliothèques, il a conçu avec son équipe un grand foyer autour de l’auditorium, relié par des escaliers à diverses parties du campus. Un lieu qui correspond aux habitudes des étudiants d’aujourd’hui, qui ont juste besoin d’une chaise et d’une connexion wifi pour plancher sur leurs cours.