Saint Pierre Damien, l’unité du corps du Christ
Dans la célébration même de la messe, après avoir dit : « Memento, Domine, famularum famularumque tuarum » (Souviens-toi, Seigneur, de tes serviteurs), le prêtre ajoute peu après : « pro quibus tibi offerimus, vel qui tibi offerunt hoc sacrificium laudis (nous t’offrons pour eux ou ils t’offrent pour eux-mêmes et tous les leurs ce sacrifice de louange) ». Ces mots montrent clairement que ce sacrifice de louange est offert par tous les fidèles, hommes et femmes, bien qu’il paraisse être offert spécialement par le seul prêtre ; car ce que celui-ci offre de ses mains, la foule des fidèles l’offre en esprit. C’est ce qui est déclaré par cette parole : « Hanc igitur oblationem servitutis nostrae, sed et cunctae familiae tuae, quaesumus, Domine, ut placatus accipias » (Voici l’offrande que nous présentons devant toi, nous tes serviteurs et ta famille entière, et dans ta bienveillance, accepte-la). Il apparait ainsi en toute clarté que le sacrifice qui est disposé sur l’autel par le prêtre, est offert par toute la famille de Dieu en général.
Cette unité de l’Eglise, l’Apôtre l’expose en termes manifestes lorsqu’il dit : « Nous qui sommes nombreux, nous sommes un seul corps, un seul pain ». Si grande est en effet l’unité de l’Eglise dans le Christ, que par tout l’univers il n’a qu’un seul pain du corps du Christ et un seul calice de son sang. Car, de même que la divinité du Verbe de Dieu, qui remplit le monde entier, est une, ainsi, bien que ce corps soit consacré en divers lieux et à de nombreux jours différents, il n’y a cependant pas plusieurs corps, mais un seul corps du Christ. Et de même que ce pain et ce vin sont vraiment changés au corps et au sang du Christ, ainsi tous ceux qui reçoivent dignement le sacrement dans l’Eglise deviennent, sans aucun doute, l’unique corps du Christ. Lui-même en témoigne, en disant : « Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, demeure en moi et moi en lui. »
Si donc nous sommes tous l’unique corps du Christ, et bien que par l’apparence corporelle nous paraissions être à l’écart, nous ne pouvons cependant pas être séparés les uns des autres, nous qui demeurons en lui. Je ne vois donc pas quel inconvénient il y a à suivre chacun l’usage commun de l’Eglise, puisque, grâce à ce sacrement de l’unité, nous ne sommes jamais séparés d’elle. En effet, lorsque dans mon apparent isolement je prononce les paroles communes de l’Eglise, je montre par là que je suis un avec elle et qu’elle demeure vraiment en moi par sa présence spirituelle. Or, si je suis vraiment son membre, il n’y a point d’inconvénient à ce que je remplisse l’office de mon tout.