Internet, pour quoi faire ?
Paris Notre-Dame du 29 novembre 2012
P. N.-D. - La présence de l’Église sur internet a fait l’objet d’un groupe de travail lors de l’Assemblée des évêques à Lourdes. Pourquoi est-elle incontournable ?
Koz – C’est incontournable parce que c’est là où se passe désormais une partie de la vie des gens. Pour un certain nombre d’internautes, cette activité équivaut à une vie associative ; je pense notamment au milieu des blogueurs et aux tweeters qui, en échangeant régulièrement, créent une forme de communauté. Comme le signalait le P. Éric Salobir, promoteur général pour les médias de l’ordre dominicain, autre intervenant, internet est une plateforme numérique, certes, mais on ne peut plus la qualifier de « monde virtuel. » C’est-à-dire que le web ne doit pas tant être considéré comme un bon outil de diffusion de contenu, que comme un lieu de vie. Sans compter que beaucoup de personnes seules n’ont souvent que le web comme occasion d’échanges et de rencontres.
P. N.-D. - L’Église est-elle attendue sur internet ?
Koz – Oui, non seulement sur tous les sujets de débat « classiques » – de l’Inquisition au préservatif – mais aussi sur les petites blessures du quotidien des gens, qui ont souvent eu des mauvaises expériences avec l’Église et qui n’attendent que de pouvoir en parler. C’est dans ce cadre que l’interactivité « personnelle » de Facebook ou de Tweeter est intéressante... pour que l’Église n’apparaisse pas en tant qu’institution lointaine et dogmatique mais en tant que « personne ». Il y a cinquante ans, le lien entre le dogme officiel et les personnes était assuré par les prêtres… Aujourd’hui, ce lien pastoral étant rompu avec de nombreuses personnes, à nous d’utiliser internet comme moyen de proximité. C’est là que se situe l’enjeu. Les gens sont persuadés que l’Église « opulente » de la série « Ainsi soient-ils » est la vraie. Sur ce sujet, j’étais heureux d’évoquer en quelques « tweets », depuis Lourdes, la simplicité de vie de nos évêques. Blogueur depuis sept ans [1], j’expérimente aussi que plus on assume son identité et ses choix, mieux on est perçu et donc écouté. Outre cet enjeu de proximité, l’Église a tout intérêt à considérer ces nouveaux médias qui sont un moyen de communication directe, hors d’influence d’une presse pas toujours bienveillante.
P. N.-D. - Quelles ont été les problématiques soulevées par les évêques ?
Koz – Une des préoccupations était le temps que demande l’investissement sur le web. Nous avons aussi travaillé sur les codes et vocabulaires adéquats à utiliser pour s’adresser à un large public. Sans tomber dans la caricature, il y a une forme de langage « institutionnel », propre à l’Église – comme à toute institution –, à reconsidérer. Il y a aussi une manière d’être sur internet. Je pense notamment aux débats d’idées qui peuvent parfois échauffer : à nous de ne pas dissocier nos propos de ce qui nous anime profondément. Ce dernier point rejoint une autre préoccupation essentielle évoquée : savoir placer le curseur entre l’interactivité sur le web et l’intériorité. Par ailleurs, l’Église a la capacité de parler à tous par ces nouveaux médias, mais sa parole serait vaine si elle en oubliait le cœur : la foi. • Propos recueillis par Laurence Faure