Accueil de migrants : retour sur deux expériences paroissiales
Paris Notre-Dame du 22 octobre 2015
À St-Bernard de la Chapelle (18e) comme à N.-D. de Clignancourt (18e), curés et bénévoles se sont mobilisés ces derniers mois pour accueillir et soutenir les migrants de leur quartier. Retour sur ces expériences marquantes.
« Ils sont à la fois chaleureux, réservés, secrets et marqués par les épreuves. Nous vivons avec eux des moments lumineux, suivis de moments d’abattement. Ils sont désireux d’apprendre, de connaître ce pays où ils veulent demeurer », raconte Brigitte Guéras, membre du Vicariat pour la solidarité qui, avec son mari, s’est particulièrement investie auprès des migrants du quartier de St-Bernard de la Chapelle (18e) depuis fin mai. « Après ces trois mois nécessaires pour créer la confiance, ils sont entrés progressivement dans le dialogue et lâchent des parcelles de leur vie », témoignent-elle, émue de cette expérience baptisée « Été solidaire ».
Un phénomène qui s’accentue
Si, depuis plusieurs années, le P. Livio Pegoraro, curé de St- Bernard de la Chapelle, et Sr Marie-Joseph Biloa, – dite Sr Marie-Jo – une religieuse camerounaise de la Congrégation des sœurs de Jésus serviteur, soutenus par la Fondation Notre Dame*, se préoccupent des migrants, le phénomène d’accueil dans la paroisse s’est accentué au printemps, devant l’afflux soudain massif de réfugiés de la Corne de l’Afrique, d’abord sous le métro La Chapelle, puis dans des campements aux alentours. « En 2010, ils étaient une cinquantaine, durant l’été 2014 environ 80, et cet été entre 350 et 400 », explique Sr Marie-Jo, précisant que sont récemment arrivés des femmes et enfants, ce qui est nouveau. Devant ce nombre et les conditions insalubres de campement, elle a fait appel au Vicariat pour la Solidarité pour renforcer l’équipe de bénévoles. C’est ainsi que des fidèles de diverses paroisses, dont St-Jean de Montmartre (18e) et St-Séverin (5e), et du Secours catholique se sont mobilisés pour accompagner à St-Bernard de la Chapelle une vingtaine de migrants de juin à septembre, avec plusieurs propositions : de l’accueil, de l’aide administrative, des cours de français et de l’initiation à la découverte de l’environnement parisien. « Un jeune a témoigné du fait que ces rendez-vous réguliers leur ont permis de tenir debout », souligne Brigitte Staub, chargée de la pastorale des migrants au Vicariat pour la solidarité. Après trois mois de services à St-Bernard, l’équipe a réfléchi à pérenniser ce soutien de migrants qui, désormais logés par la Ville, demeurent désœuvrés et souhaitent s’intégrer. C’est ainsi qu’à N.-D. des Foyers (19e) a été initié il y a un mois, sous la présidence du P. Yves-Marie Clochard-Bossuet, curé, un projet de permanence de sept demi-journées à la paroisse, avec de l’accès aux droits, de l’accueil écoute – orientation, des cours de français, de la convivialité et du soutien psychologique. Les équipes sont encore en train de se constituer, mais le Secours catholique propose d’ores et déjà son aide en termes de sensibilisation, de formation et d’accompagnement. Et les bénévoles assurent des tournées rue pour faire venir les réfugiés à la paroisse. • Ariane Rollier
Témoignage
P. Philippe Marsset, curé de N.-D. de Clignancourt (18e)
Un point de solidarité pour tout le quartier« Début septembre, plusieurs centaines de Soudanais et quelques Érythréens et Libyens sont arrivés devant la Mairie du 18e. Il pleuvait. Nous avons décidé d’ouvrir de façon permanente une salle paroissiale rue Hermel, donnant sur la rue. Dans une situation tendue et politisée, ce lieu abrité est vite devenu un lieu de respiration et d’écoute, avec café et thé, repas improvisés et consultations médicales. Il y avait aussi une douche et des sanitaires, et des dizaines de personnes du quartier ont apporté des vêtements et de la nourriture... Cette salle est devenue un point de solidarité pour tout le quartier. La situation a duré quinze jours, pendant lesquels nous avons collaboré de façon heureuse avec la Mairie. Un matin, les réfugiés, prévenus la veille, sont partis dans des centres d’hébergement à Paris et en banlieue. Certains ont aujourd’hui trouvé un logement à Boulogne. À l’occasion de ce “coup de feu”, un groupe Alpha-FLE du Secours catholique et des cours de soutien scolaire se sont créés. Nous réfléchissons également de manière plus réaliste à l’accueil d’une famille de réfugiés. » • Propos recueillis par A. R.