Canoniser deux papes

P. N.-D. – En quoi la canonisation de deux papes est-elle un événement important ?

Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris.
© Pierre-Louis Lensel

Mgr André Vingt-Trois – Quand l’Église canonise une personne, ni son état de vie, ni sa fonction ne sont déterminantes, mais c’est davantage une reconnaissance des vertus chrétiennes vécues à un haut degré, et qui peuvent être données en exemple. Dans les cas de Jean XXIII et Jean-Paul II, il s’agit de reconnaître comment elles ont marqué leur manière d’être pape. Leur popularité et leur action sont aussi bien sûr des éléments déterminants dans le processus de canonisation. Jean XXIII a laissé le souvenir d’un pasteur proche des fidèles, simple et accessible, mais en tant qu’initiateur du concile Vatican II, il apparaît comme celui qui a ouvert l’Église au monde. Quant à Jean- Paul II, sa figure est encore vive dans nos mémoires. Il a fortement marqué la présence de l’Église au monde en particulier par ses nombreux voyages. C’est un témoignage à l’heure où le pape François nous invite à aller vers les périphéries !

P. N.-D. - Jean-Paul II reste présent dans les esprits,mais les jeunes générations connaissent moins Jean XXIII. Quel saint était-il ?

Mgr A. Vingt-Trois – Avant de devenir pape, Jean XXIII a assumé diverses responsabilités diplomatiques. On ne saurait oublier ses huit années passées en France comme nonce apostolique, durant lesquelles il a accompagné l’Église dans cette période délicate de l’après-guerre. Peut-être que ce qui pourrait résumer au mieux sa vie, c’est sa devise : « Obéissance et paix. » Homme d’unité, tout habité par sa mission de pasteur, il fut aussi un précurseur plein d’audace. Jean XXIII a permis à l’Église d’entrer dans une nouvelle période de sa vie. Nous lui en sommes redevables et reconnaissants.

P. N.-D. – Pourquoi avoir décidé de les canoniser simultanément, alors même qu’on ne connaît pas de deuxième miracle authentifié au “bon pape Jean” ?

Mgr A. Vingt-Trois – Les normes qui régissent les béatifications et les canonisations ont évolué dans le temps. Jean-Paul II en a modifié un certain nombre. Par exemple, le délai entre la mort et l’ouverture de la cause a été diminué. Il a aussi souhaité que l’on attache dans ces procédures davantage d’attention à la sainteté de vie du serviteur de Dieu. Actuellement, le nombre de miracles attestés est fixé à deux pour une canonisation. Mais à toute règle, il peut y avoir des exceptions laissées au jugement et à la décision du pape. En associant ces deux canonisations, François a certainement voulu nous donner deux exemples de sainteté différents dans leur exercice mais encore proches de nous dans le temps, et donc encore « accessibles », capables de nous rejoindre plus facilement.

P. N.-D. - Quel est le sens du pèlerinage diocésain à Rome ?

Mgr A. Vingt-Trois – Les liens que ces deux papes ont entretenus avec la France et Paris justifiaient déjà que nous nous déplacions ! Mais notre regard s’élargit aux dimensions du monde à cette occasion. Nous irons donc à Rome remplis d’action de grâce pour l’exemple qu’ils nous ont donné, et aussi conscients de notre responsabilité de faire fructifier l’héritage spirituel qu’ils nous ont transmis. • Propos recueillis par Ariane Rollier

Canonisation des bienheureux Jean Paul II et Jean XXIII

Interventions de Mgr André Vingt-Trois