« L’accompagnement spirituel, c’est le cœur du métier de l’Église »
Paris Notre-Dame du 20 février 2020
Tout baptisé peut exercer le charisme de l’écoute du frère. Mais l’accompagnement spirituel nécessite une vigilance particulière pour discerner au mieux et éviter tout abus. Une journée de formation diocésaine aura lieu le 7 mars prochain à destination des prêtres, religieux ou laïcs qui exercent ou souhaitent exercer ce charisme. Les explications du P. Benoît Bourgoin, en charge d’une mission de réflexion sur ce sujet.
Paris Notre-Dame – Pourquoi avoir voulu proposer cette journée de formation ?
P. Benoît Bourgoin – Nous sommes partis d’un constat, celui du nombre et de la diversité de demandes d’accueil et d’accompagnement, dans des situations parfois complexes par rapport à l’Église, comme les personnes divorcées ou homosexuelles. Quand on parle aux religieux et prêtres, tous disent qu’ils sont débordés. Or, ce charisme n’est pas dédié aux seuls prêtres et religieux, il est baptismal. C’est donc important que le peuple de Dieu prenne conscience qu’il y a là un service à exercer.
P. N.-D – Qu’est ce qui distingue un accompagnateur spirituel d’un accompagnateur profane ?
B. B. – L’accompagnement spirituel, c’est le cœur du métier de l’Église. Il s’agit d’avancer fraternellement dans la recherche de Dieu. Il faut pour cela que la personne accompagnée exprime un désir clair. Que cherche-t-elle ? Est-ce qu’il s’agit d’une prise de décision, d’un temps de crise, d’une blessure ? Après, c’est à l’accompagnateur d’être dans l’écoute. Pas dans l’enseignement. Il n’a pas à donner de réponse. Il est là pour accompagner la personne afin qu’elle découvre ce que Dieu attend d’elle. Un accompagnateur spirituel n’est pas un psychologue ou un psychothérapeute, c’est pour cela que lors de la journée de formation que nous proposons, le 7 mars, l’un des intervenants, Pascal Parinet, psychanalyste et psychothérapeute, va nous parler de la distinction entre psychologie et spiritualité. Il y a des spécificités dans l’accompagnement spirituel.
P. N.-D – Tout baptisé peut-il exercer ce service de l’écoute ?
B. B. – Que ce soit dans la vie de famille, dans la vie paroissiale ou associative, nous sommes tous à l’écoute les uns des autres. Après, certains ou certaines ont le goût de l’écoute. Ce qui ne veut pas dire qu’ils sont appelés à ce charisme. Celui-ci doit être authentifié par l’Église. Qui m’appelle à être accompagnateur spirituel ? Pourquoi faire ? Et pour combien de temps ? Je pense qu’il est important de redonner un cadre à cet accompagnement. Comprendre que nous sommes envoyés par l’Église et qu’il est nécessaire de se former. Ce qui veut dire avoir sa propre vie spirituelle mais aussi échanger avec d’autres. Il est aussi important d’être supervisé. Il me semble que pour les prêtres, religieux, religieuses, laïcs, c’est un des points sur lesquels il va falloir trouver des solutions. C’est d’autant plus important que, de nos jours, des comportements inappropriés sont mis en évidence.
P. N.-D. – Justement, comment éviter les abus et les emprises dans ce domaine ?
B. B. – Le psychanalyste Jean-Guilhem Xerri, qui intervient durant cette journée, propose quelques pistes. Se poser la question : quand je sors d’un entretien, est-ce que je me sens plus libre ? Je pense que c’est aussi à l’accompagné de prendre conscience de la qualité de la rencontre. Si quelque chose ne me semble pas juste, il faut prendre de la distance. Quant à l’accompagnateur, il faut accepter d’entrer dans l’humilité et le silence. Et accepter d’être supervisé. Il y a là un véritable enjeu.
Propos recueillis par Priscilia de Selve@Sarran39
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