L’Imprimatur sert-il encore ?

Paris Notre-Dame du 26 octobre 2017

C’est Mgr Patrick Chauvet, recteur de la cathédrale N.-D. de Paris, qui a pris, à la rentrée, le relais de Maurice Vidal, sulpicien, ecclésiologue et prêtre du diocèse de Paris, comme vicaire épiscopal pour l’Imprimatur. Ce dernier nous explique le sens de cette institution vieille de sept siècles.

Paris Notre-Dame – D’où vient l’Imprimatur ?

Maurice Vidal, prêtre sulpicien, a été vicaire épiscopal pour l’Imprimatur pendant près de trente ans.
© Les Éditions de l’Atelier

Maurice Vidal – Il naît avec l’invention de l’imprimerie, à la publication des premiers livres et des premiers catéchismes. Un risque apparaît alors : celui de transmettre une foi défigurée, une doctrine faussée. Est donc constitué un service d’Église pour que l’évêque du lieu de l’édition valide les ouvrages publiés sur l’enseignement de l’Église en matière de foi et de mœurs. Les premiers Imprimatur, ou équivalents, datent du XVe siècle.

P. N.-D. – L’enjeu était de protéger la formulation de la foi catholique. Est-ce toujours le cas ?

M. V. – C’est effectivement une institution de protection de la foi dans sa formulation et dans sa transmission. Ce souci existe bien avant la création de l’Imprimatur, dès les premiers siècles. On peut citer saint Paul : l’Évangile vous sauvera, dit-il, « si vous retenez en quels termes je vous l’ai annoncé » (1 Cor 15, 2). Pour dire ce que nous croyons de Dieu, nous utilisons des mots, des images, qui sont ce qu’on appelle en philosophie, des analogies. Par conséquent, il est facile de déraper. Il s’agit donc de protéger l’authenticité de la transmission et des traductions de la Parole du Christ. Et ce souci demeure, même s’il a été exagéré par le passé. Avant le concile Vatican II, tout ce qui était publié concernant la foi et les mœurs exigeait l’Imprimatur. Depuis, on a voulu que l’Imprimatur respecte ce souci de la fidélité apostolique de l’Église, et en même temps, qu’il ne contrevienne pas à la liberté nécessaire de la recherche théologique.

P. N.-D. – Dans quels cas l’Imprimatur est-il requis aujourd’hui ?

M. V. – En 29 ans de « service », la plupart des Imprimatur que j’ai donnés n’étaient pas nécessaires. C’est souvent l’éditeur qui la demande, car elle facilite les ventes, notamment vis-à-vis d’une clientèle catholique. En revanche, il y a trois types d’ouvrages qui requièrent nécessairement un Imprimatur : les livres des Saintes Écritures et leurs traductions, les livres liturgiques et les catéchismes. Globalement, nous recevons de moins en moins de demandes au fil des années. En 2010, j’ai donné 42 Imprimatur et en ai refusé 2. En 2016, 30 ont été donnés et 2 refusés. Les cas de refus concernent des écrits que je ne peux « cautionner » au nom de l’Église. Outre les trois catégories citées, il peut être opportun de recommander l’Imprimatur à des auteurs et théologiens catholiques qui écrivent sur des sujets sensibles, comme la bioéthique.

P. N.-D. – Comment fonctionnez-vous ?

M. V. – C’est l’évêque qui donne l’Imprimatur mais il peut déléguer un vicaire épiscopal. C’est le cas à Paris, où Mgr Patrick Chauvet me succède. Ce dernier fonctionne avec trois censeurs, qui sont choisis par le cardinal André Vingt-Trois, sur leurs compétences théologiques. Ce sont les censeurs qui lisent les livres et font part de leurs remarques aux deux autres, et au vicaire épiscopal. Dans beaucoup de cas, l’Imprimatur que nous avons délivré ces vingt-neuf dernières années, n’était pas tant pour défendre la foi, dans une logique de protection du lecteur, que pour améliorer le texte. Au fond, ce qui diffère d’autrefois, c’est que, souvent, l’Imprimatur est devenue une aide fraternelle pédagogique.

Propos recueillis par Laurence Faure

Pour adresser sa demande :
contacter le vicariat épiscopal pour l’Imprimatur
au 01 43 25 96 87.

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