Le renouveau de la vénération des reliques
Paris Notre-Dame du 3 novembre 2016
Dès les premières communautés chrétiennes, des fidèles ont vénéré des reliques. Cette tradition est toujours vivante de nos jours et connaît même un certain regain d’intérêt.
Les ostensions de reliques attirent toujours les foules. Au printemps dernier, environ 215 000 pèlerins ont vénéré la Sainte Tunique d’Argenteuil (Val-d’Oise). À N.-D. de Paris (4e), chaque premier vendredi du mois, plus de 2 000 personnes se pressent pour vénérer les « Instruments de la passion du Christ ». Quant aux paroisses, elles organisent régulièrement des veillées de prière autour de reliques. Quel est le sens de cette tradition ? « Pour l’Église, c’est un acte de reconnaissance des bienfaits donnés par Dieu à travers ses serviteurs, explique le P. Jean-Jacques Launay, délégué diocésain à la Commission d’art sacré. De nombreux fidèles ont obtenu des grâces après avoir prié auprès de reliques. »
Il constate, cependant, que « certaines personnes sont gênées par ce culte, voire le méprisent, car elles l’assimilent à du fétichisme ou de la superstition ». Lui pense qu’il « faut respecter ceux qui ont besoin de ces supports concrets et qui démontrent de l’affection pour les saints ». Si cette forme de piété populaire est moins forte qu’elle ne l’a été autrefois, elle connaît aujourd’hui un certain renouveau en France, selon plusieurs observateurs, comme le P. Launay : « Au sein de notre société sécularisée, de nombreux prêtres veulent remettre en valeur le patrimoine spirituel de l’Église, dont les reliques font partie, afin d’aider les fidèles à prendre conscience qu’ils s’inscrivent dans une longue histoire », analyse- t-il.
À St-François d’Assise (19e), la célébration des 90 ans de la paroisse a été marquée par l’exposition, le premier weekend d’octobre, du manteau qui aurait appartenu à saint François d’Assise – comme l’attesteraient les archives historiques. Le curé, le P. Hervé Guillez, a demandé au couvent des Frères capucins (14e) de le lui prêter : « Une relique peut toucher les personnes d’une autre manière que les activités pastorales habituelles et permettre de vivre simplement la communion des saints. » Les Petites sœurs de l’Agneau et les Frères capucins ont animé des temps de prière pour accompagner les fidèles. « J’ai rencontré des personnes du quartier que je n’avais jamais vues dans l’église », raconte le P. Guillez.
Aider à aller plus loin
Certains lieux abritent en permanence des reliques. C’est le cas de la chapelle Ste-Thérèse (16e), confiée à la fondation des Apprentis d’Auteuil. En 1923, l’abbé René Muffat, alors directeur de l’œuvre, a demandé au carmel de Lisieux une relique de sainte Thérèse, car elle avait prié, de son vivant, pour les jeunes des Apprentis d’Auteuil. « C’est une manière concrète de perpétuer un lien charnel avec Thérèse », commente le P. Louis Cesbron, le chapelain du sanctuaire. Il voit de nombreuses personnes se recueillir devant le reliquaire. Si cet élan lui semble bon en soi, il regrette, cependant, que certaines se focalisent seulement sur la sainte. Un des objectifs des « Soirées T », des veillées de prière autour du reliquaire, est d’aider les fidèles à aller plus loin. « Nous essayons de leur montrer que Dieu se révèle à travers les saints, que ceux-ci sont les membres du Corps du Christ. » • Céline Marcon
Un peu d’histoire
Selon le Directoire sur la piété populaire et la liturgie (2001), les reliques – mot issu d’un terme latin qui signifie « les restes » – sont les « corps – ou des éléments significatifs de ces corps – de tous ceux qui, par la sainteté héroïque de leur vie, se révélèrent sur cette terre des membres éminents du Corps mystique du Christ et des temples vivants de l’Esprit Saint », et « les objets qui ont appartenu aux saints ». La vénération des reliques remonte aux premières communautés chrétiennes. Celles-ci ont conservé les restes mortels des martyrs et les ont réinhumés sous les autels. De nos jours, lorsqu’un nouveau maître-autel est consacré, des « restes » de saints y sont toujours enchâssés. Au Moyen-Âge, le culte des reliques a atteint son apogée, mais a aussi abouti à des dérives, comme le trafic. • C. M.