Messe à Notre-Dame de Paris suite à l’attentat du 20 avril 2017
Le dimanche 23 avril 2017, Mgr Denis Jachiet, évêque auxiliaire de Paris, a célébré une messe à Notre-Dame de Paris à l’intention des victimes et pour la paix dans notre pays.
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Introduction
Rassemblés en cette cathédrale le soir du 2ème dimanche de Pâques, nous sommes en communion avec le Cardinal Vingt-Trois, avec les néophytes du diocèse, les 365 nouveaux baptisés adultes de Pâques qui se sont rassemblés ici ce matin, mais aussi avec les téléspectateurs de KTO télévision et les auditeurs de radio Notre-Dame.
Ce soir, en présence d’une délégation nombreuse de la Préfecture de Police de Paris, nous allons prier pour ce policier de 38 ans, Xavier Jugelé, assassiné dans l’exercice de ses fonctions jeudi dernier par un acte de terrorisme. Nous prions aussi pour sa famille et ses proches. Nous allons porter dans la prière les forces de l’ordre de notre pays, très sollicitées ces derniers mois mais aussi souvent atteintes par l’irrespect, l’agressivité et le terrorisme.
Nous demanderons au Seigneur la paix pour notre pays. Nous demanderons qu’un sang-froid démocratique puisse régner spécialement en cette période électorale. Nous demanderons que les responsables politiques qui sortiront des urnes puissent travailler à la paix, l’unité et le bien du pays.
Homélie
2e dimanche de Pâques, année A
« Cela ne s’arrêtera-t-il donc jamais ? » C’est la réaction qu’on peut avoir après l’attentat de jeudi soir qui ajoute un drame au cycle infernal de violence meurtrière qui semble enclenché dans notre patrie de liberté et, une fois de plus, dans sa capitale. En multipliant les tentatives de répandre le plus de sang possible et de semer la peur et l’inquiétude, les ennemis de la paix, de la démocratie et du bien de la société organisent leur travail de sape. De quoi s’agit-il ?
Il s’agit de s’attaquer aux forces de l’ordre, garantes de la sécurité et du respect de la loi, dans le but d’inciter les personnes les plus influençables à la révolte contre l’État et à l’agressivité envers ses représentants. Il s’agit de choisir la veille des élections présidentielles, moment crucial et sensible de l’expression de la conscience citoyenne pour construire l’avenir collectif, dans le but de pousser les électeurs à des choix qui diviseront davantage les français. Il s’agit de répandre le sang sur l’avenue du pays la plus connue dans le monde et la plus fréquentée dans le but de frapper au maximum les imaginations et d’imprimer plus d’inquiétude dans l’opinion mondiale.
Ce projet de destruction repose sur un mépris de la vie humaine, celle des victimes et celle des terroristes eux-mêmes. Il vise à susciter un esprit de peur, d’exclusion et de vengeance. Il cherche à déstabiliser notre démocratie, en atteignant les serviteurs de l’État qui ont la mission de servir la justice, de maintenir l’ordre public et le respect de la loi.
Sommes-nous capables de résister à l’impact du terrorisme sur notre façon d’être, de penser, d’agir ? Par quels moyens notre nation peut-elle progresser ?
L’Évangile de ce deuxième dimanche de Pâques fait le récit d’apparitions de Jésus, dans un contexte de forte tension. Au surlendemain de sa crucifixion, les disciples se sont verrouillés dans une maison par crainte de ceux qui ont fait crucifier leur maitre. Eux-mêmes ne sont pas fiers, ils l’ont abandonné et n’ont pas cru le témoignage des femmes.
« La paix soit avec vous ! ». La paix est le premier don du Christ ressuscité. Il n’offre pas la simple tranquillité psychologique, ni un sentiment de sécurité devant la peur d’être arrêtés. Jésus apporte à ceux qui l’ont renié, un don inconditionnel qui les établit dans la confiance et la communion avec lui. Ce don est d’abord le pardon de l’avoir abandonné et la réconciliation avec Dieu et entre eux. Jésus n’ignore rien des sentiments de remords et d’incrédulité qui les habitent. Il ne les condamne pas, ne les culpabilise pas. Il les renouvelle intérieurement. Il leur communique un élan profond qui leur fait dépasser les obstacles intérieurs à la foi.
Cette paix de Jésus n’efface pas le passé, ne ravive pas la culpabilité, n’humilie pas le pécheur. Jésus opère une résurrection de l’âme où il redonne à chacun sa pleine liberté d’enfant de Dieu, sa capacité à faire confiance, à croire et à aimer.
« Il leur montre ses mains et son côté ». Jésus fait constater sa vie de ressuscité à partir des blessures de sa Passion. Jésus donne aux Apôtres, le moyen de réaliser qu’il garde dans la gloire les traces de la Passion et la mort qu’il a subies. Ils découvrent que la vie divine qui l’anime transfigure les plaies de sa passion. Ils réalisent jusqu’où va la puissance de Dieu qui d’un mal peut tirer un bien, de la pire injustice fait surgir la plus grande justice.
Pour Jésus ressuscité, l’amour de Dieu ne se laisse pas vaincre par le mal mais il est vainqueur du mal par le bien. Il est une force plus grande que le mal, capable de briser l’enchainement du péché. Dieu peut tirer le bien de toutes les formes de mal qui existent dans le monde et dans l’homme.
En mettant sa main dans le côté de Jésus, Thomas peut sentir battre ce cœur qui étant transpercé n’a cessé d’aimer et qui lui dévoile sa puissance de miséricorde. Jésus donne aux siens le moyen de résister au mal, à la peur, la vengeance et la division. Par l’Esprit Saint qu’il leur communique, les apôtres resteront unis et forts dans leur mission de réconciliation et d’évangélisation.
Dans les circonstances présentes, notre communauté nationale saura-t-elle réagir à la peste du terrorisme et son cortège de peur, de repliement et de vengeance ? Parviendra-t-elle à trouver un sursaut d’unité citoyenne ? Saura-t-elle y trouver l’occasion d’une conscience nouvelle de sa mission au service de la liberté de tous, de l’égale dignité de chacun et de la fraternité entre les hommes ?