Pasteur parisien en Afrique
P. Christian Aurenche
Paris Notre-Dame du 29 avril 2010
Depuis trente-cinq ans, le P. Christian Aurenche est vicaire à St-Germain des Prés (6e) et exerce son ministère… à Tokombéré, au nord du Cameroun. Médecin de formation, il s’occupe de la paroisse St-Joseph, tout en assurant la direction de l’hôpital de ce village africain.
La démarche hésitante, la stature frêle, à 70 ans, il avance doucement, s’aidant d’une canne pour marcher. Pourtant, le P. Christian Aurenche, vicaire à St-Germain des Prés (6e), détaché depuis trente-cinq ans auprès du diocèse de Maroua-Mokolo, au Cameroun, n’a rien perdu de sa vitalité. Quand ce médecin de formation détaille sa double mission de pasteur et de soigneur, quand ce prêtre Fidei donum raconte le lien qu’il a tissé entre la communauté catholique parisienne et celle de son ministère africain, ses mains s’agitent et son regard s’anime.
Au fil de la conversation, on l’imagine sous un soleil de plomb, devant son église au milieu du Sahel. Quand il est arrivé en 1975, seul prêtre à l’époque, la communauté catholique de Tokombéré, au nord du pays, n’était pas très grande. A peine vingt ans plus tôt, l’Abbé Simon Mpéké, surnommé Baba Simon [1], avait amené la parole de l’Evangile dans cette région isolée. Le P. Aurenche est aujourd’hui accompagné par trois confrères, dont deux camerounais.
Le salut pour tous
« Nous vivons dans une région où les chrétiens sont minoritaires, notre plus grand défi est donc de faire vivre la fraternité de la parole de Jésus », explique le curé de la paroisse St-Joseph. C’est un effort de tous les jours, comme quand un homme d’une religion traditionnelle du pays lui a demandé : « Est-ce que votre salut s’adresse aussi à nous ? » « Il nous faut toujours rappeler que notre message est universel, sans brusquer les gens ni rejeter leurs racines », souligne l’homme aux yeux bleus et aux rares cheveux blancs.
Dès le début de sa mission, le curé français a dû assumer plusieurs rôles. En plus de son travail pastoral, il dirige l’hôpital du village, devenu un centre curatif et de prévention renommé. « Nous avons pu mettre en place une politique de responsabilisation des habitants parce que, dans notre lecture de l’Evangile, nous insistons sur la dignité de l’homme, raconte-t-il. Mon engagement médical a beaucoup éclairé mon engagement sacerdotal, l’un s’appuyant sur l’autre et vice versa. » S’il pratique encore à l’hôpital de Tokombéré, il laisse petit à petit la place aux « locaux », dans cet esprit de les rendre acteurs de leur salut.
Un pont
Pasteur de l’Eglise de Paris, il a été envoyé en Afrique pour être un pont entre les deux diocèses. D’ailleurs, il revient une à deux fois par an dans son diocèse d’origine et reste en contact avec ses frères parisiens ainsi qu’avec une association de laïcs de St-Germain des Prés. Ces discussions en sont d’autant plus importantes à ses yeux depuis le lancement de “Paroisses en mission” : « J’ai été ravi de suivre les réflexions mises en place par le cardinal André Vingt-Trois. Cela correspond aussi à notre réalité, car mon problème est de faire connaître la parole de Dieu qui nourrit chaque aspect de notre quotidien. Celle-ci appelle ensuite à l’engagement dans la communauté ». • Sophie Lebrun
Écrire pour faire tomber les clichés :
Tokombéré, aux pays des Grands Prêtres, Christian Aurenche, 1996, Les Editions de l’Atelier
Autour de l’arbre sacré, Christian Aurenche, 1987, cerf
[1] En 2009, à l’occasion des 50 ans de la création de la paroisse de St-Joseph de Tokombéré par l’Abbé Mpéké, le P. Aurenche avait témoigné de l’importance de Baba Simon dans sa vie et celle des catholiques camerounais, dans L’Effort camerounais, le journal de la Conférence épiscopale camerounaise.