Ministre de l’écoute

P. Patrick Sempère

Paris Notre-Dame du 14 janvier 2010

Directeur au séminaire et vicaire à la paroisse St-Denys du Saint-Sacrement (3e), tout en étant aumônier de l’association « Aux captifs, la libération », le P. Patrick Sempère assure plusieurs fonctions. Un trait commun à celles-ci : l’écoute.

Entre ses obligations administratives, ses rendez-vous et son cours au Collège des Bernardins, le P. Patrick Sempère, vicaire à la paroisse St-Denys du Saint-Sacrement (3e), a un emploi du temps chargé.

Assis au bureau d’accueil dans la petite cage en verre située à droite dans la nef, il salue une paroissienne qui passe derrière la vitre. Puis, se reconcentre sur son ordinateur, son sourire disparaissant derrière une barbe poivre et sel. Tous les jeudis en fin d’aprèsmidi, le P. Patrick Sempère, vicaire à St-Denys du Saint-Sacrement (3e), assure une permanence. Plus tôt dans la journée, le prêtre de 46 ans, également directeur spirituel au séminaire, a déjeuné en compagnie des futurs prêtres avec qui il habite. Avant de courir à une réunion de l’association « Aux captifs, la libération » [1] dont il est l’aumônier depuis cinq ans, pour enfin revenir à l’église. Un travail chargé pour l’homme aux larges épaules, en vue d’assurer ses trois missions dont il a la charge depuis septembre dernier.

Marqué par les “Captifs”

Ordonné prêtre en 1995, ce fils de pied-noir élevé à Gonesse (dans le Val d’Oise) découvre les « tournées de rue » des « Captifs » dès sa première expérience pastorale à l’Immaculée Conception (12e). En 2000, après une licence en théologie, il passe trois ans comme vicaire à la paroisse St- Georges (19e) et six à St-Christophe de Javel (15e). Il y a quelques mois, l’archevêque lui a demandé de mener de front sa charge pastorale et l’accompagnement spirituel des séminaristes à St-Denys. Sa première réaction : « Je ne voulais pas ! Je suis très indépendant et la vie communautaire ne m’enchantait pas, avoue-t-il timidement. Puis, j’ai réalisé qu’en faisant confiance à mon évêque plus qu’en “obéissant servilement”, j’ai dépassé mes propres limites. Cela m’a sorti de moi-même pour me recentrer sur Dieu. »

Chercher les racines de l’amour de Dieu

Aujourd’hui, loin d’être juste côte à côte dans son agenda, les trois ministères se complètent. « Dans l’accompagnement spirituel, j’essaie de faire entendre aux séminaristes ce que l’Esprit Saint fait dans leur vie, confie-t-il. C’est la même démarche avec les paroissiens et les personnes de la rue : les faire grandir dans la foi. Même si ma réponse dans leur histoire n’est pas la même. » Ces nombreux publics l’aident à avancer dans son cheminement. « Quand je suis face à quelqu’un qui vend son corps ou sa morale, je suis forcé d’élargir ma compréhension de ce que veut dire “aimer” pour Dieu. Si j’ai la certitude que Dieu aime cette personne, je dois m’obliger à chercher les racines de cet amour en chacun, quel que soit son parcours », ajoute-t-il.

Le prière reste un combat

Pour remplir cette triple mission marquée par l’écoute, le P. Patrick s’appuie sur un « roc » : Jésus, à travers la prière et l’eucharistie qu’il célèbre tous les jours. « On a tendance à oublier d’en parler tellement elles sont naturelles dans notre quotidien de prêtre. Mais c’est ce qui me permet de ne pas me perdre », avoue-t-il. Entre les obligations administratives, les rendez-vous et son cours au Collège des Bernardins, la prière reste « un combat ». Éteindre l’ordinateur et interrompre son travail lui demandent un effort. Il reconnaît ne pas avoir le courage de se lever une heure avant les laudes pour « caler ça ». « Dans mon ministère, j’ai appris à abandonner l’image que je me faisais du prêtre que je devais être », ajoute-t-il humblement. Pour lui, le prêtre ne s’appuie pas sur ses forces, ses convictions ou ses capacités, mais sur le Christ et son appel. • Sophie Lebrun

« Mon rôle d’aumônier aux "Captifs" est d’aider, de manifester et de fortifier la dimension d’engagement de l’association dans l’Eglise diocésaine. J’essaie d’être un rappel pour que les liens entre les paroisses et les antennes qui s’y trouvent puissent mieux se vivre. Le cœur de ma mission est d’aider les volontaires à devenir des passerelles entre la rue et la paroisse.

Je rencontre les curés qui accueillent l’association, mais j’ai aussi tout un travail avec les membres – salariés et bénévoles – de l’association. Les temps de formation, une recollection, les « prière-rues » qui se déroulent dans les églises paroissiales et la participation d’un membre de l’association au conseil pastoral de la paroisse sont autant de points d’appui.

Pour réaliser cette mission, il me faut aussi connaître le travail des personnes engagées chez les « Captifs ». Cela passe par la parole – dans nos rencontres et nos discussions – mais aussi par les actes – en allant moi-même à la rencontre des personnes de la rue. Ainsi, tous les vendredis, je fais une tournée-rue avec Virginie qui travaille pour l’association, dans le quartier des Halles. Auprès des sans-abris et des prostituées, qui se sentent souvent en dehors ou sur le pas de la porte des églises, j’essaie d’être un témoin de la foi. Je garde en tête ce questionnement : dans leur vie, où se trouve le mystère de Dieu ? Quand la conversation peut s’y prêter, j’insiste sur le fait que Dieu les aime profondément, quelle que soit leur vie. » • Propos recueillis par Sophie Lebrun

[1L’association a pour mission d’aller à la rencontre des gens de la rue. Elle comprend une cinquantaine de salariés et une centaine de bénévoles. www.captifs.fr

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