Un dimanche avec quatre papes
Paris Notre-Dame du 1er mai 2014
Des centaines de milliers de pèlerins de toute nationalité ont convergé vers la place Saint-Pierre, à Rome, pour la messe de canonisation de Jean XXIII et Jean-Paul II, célébrée par le pape François dans la matinée du dimanche 27 avril. Parmi eux, de nombreux Parisiens, venus avec des amis ou en famille, avec le diocèse, leur paroisse ou un groupe de jeunes. • Par Ariane Rollier
Tout au long de la semaine, les rues et les églises de Rome se sont remplies de pèlerins, venus du monde entier, en particulier de Pologne, d’Italie et de pays voisins, comme la France. Pour les pèlerins français, un programme spécial était prévu, avec des visites d’églises et du séminaire français, des conférences données par des cardinaux ou évêques sur les deux futurs saints, ou encore des messes et des veillées de prière. Samedi, une atmosphère joyeuse régnait dans la ville éternelle, malgré la pluie qui s’était invitée. On entendait ici et là les groupes chanter, on croisait des jeunes en train de pique-niquer... De plus en plus, les visiteurs entraient dans une démarche de pèlerinage. Venue avec son mari et ses cinq enfants, Caroline, 44 ans, assistait à la messe célébrée par le cardinal Vingt-Trois à St-Ignace pour les fidèles parisiens, dans l’après midi du 26 avril. « Depuis jeudi, nous visitons la ville et ses lieux saints. Par cette messe, nous commençons à entrer dans un état d’esprit plus spirituel », témoignait-elle. Familles avec enfants, personnes retraitées ou jeunes, ils étaient nombreux à se rassembler en diocèse pour un temps ressourçant organisé dans l’église jésuite [1]. « Notre archevêque nous a demandé d’ouvrir nos cœurs et nos esprits pour entendre l’appel que le Seigneur nous envoie, quel qu’il soit », commentait, touché, François-Xavier, 24ans, venu avec un groupe de jeunes de la Ste-Trinité (9e). Et de poursuivre : « Je pense que nous allons recevoir beaucoup de grâces pendant ce week-end, comme souvent lors des grands événements d’Église. Quand elle se rassemble, nous prenons conscience de l’universalité de son message et d’à quel point Dieu travaille dans tous les cœurs ».
À l’invitation de leurs grands parents qui leur avaient offert leur billet d’avion, Bérénice, Sophie, Bathilde et Benoît, des cousins de 22 à 24 ans, avaient aussi fait le déplacement. Même s’ils étaient encore enfants du temps de Jean-Paul II, ils se sont dits « touchés par ce pape hyper proche des jeunes ».
Une expérience de la foule
Des jeunes, il y en avait huit cars pleins venus avec le P. Alexis Leproux depuis Paris. Après deux nuits de bus et une escale à Milan ils avaient démarré leur séjour romain par un pèlerinage des sept églises. « J’ai préféré partir dans ce cadre qu’en avion avec des amis, pour vivre de façon intense et corporelle cette canonisation ; j’ai aimé arriver en marchant », rapportait Olivier, 29 ans. « Demain, nous serons devant l’écran géant installé devant le Palais Farnèse, car nous devons repartir rapidement après la messe. » Comme lui, beaucoup de personnes avaient privilégié l’option raisonnable de suivre la messe de canonisation retransmise en direct par KTO sur la place de l’ambassade de France, située en plein cœur de Rome. Pour autant, d’autres avaient la ferme intention d’arriver coûte que coûte jusqu’à la place Saint-Pierre, quitte à ne pas dormir de la nuit. Dès le milieu de l’après-midi, des pèlerins avaient ainsi installé leur tapis de sol aux abords du Vatican. Et durant toute la nuit, les dizaines de milliers de personnes ont convergé doucement, en priant, parfois aussi en se bousculant, vers le lieu de la célébration. « J’en ai profité pour terminer ma neuvaine à la Divine miséricorde », confiait, marqué par son expérience de la foule, Maxime, un séminariste qui accompagnait le groupe de jeunes de St-Pierre du Gros Caillou (7e). Ce n’est qu’un peu avant 6h du matin que la place s’est finalement ouverte. D’un côté affluaient les évêques, prêtres et chanceux ayant un billet pour une place assise ; de l’autre, les pèlerins exténués mais heureux d’être récompensés de leur nuit d’attente.
La présence de Benoît XVI
Un peu avant la messe, tandis que les délégations officielles s’installaient sur la droite du parvis, l’arrivée discrète de Benoît XVI a suscité des applaudissements. Alors qu’un hélicoptère tournait dans le ciel aux couleurs menaçantes, un chapelet à la divine miséricorde était récité à haute voix, renvoyant à Jean-Paul II dont le portrait ornait la façade de la basilique Saint-Pierre, à gauche de celui de Jean XXIII. C’est à 10h, que la messe, présidée par le pape François, a débuté par une longue litanie des saints. « Après avoir longuement réfléchi, invoqué plusieurs fois l’aide de Dieu et écouté l’avis de beaucoup de nos frères dans l’épiscopat, nous déclarons et définissons saints les bienheureux Jean XXIII et Jean Paul II, et nous les inscrivons dans le catalogue des saints », a affirmé le pape, suivant l’habituelle procédure pour la canonisation. Une déclaration acclamée par la foule.
Un immense recueillement
« Jean XXIII et Jean-Paul II ont été des prêtres, des évêques, des papes du XXe siècle. Ils en ont connu les tragédies, mais n’en ont pas été écrasés. En eux, Dieu était plus fort ; plus forte était la foi en Jésus Christ rédempteur de l’homme et Seigneur de l’histoire ; plus forte était en eux la miséricorde de Dieu manifestée par les cinq plaies », a t- il ensuite souligné dans son homélie, commentant l’Évangile de Jean au sujet des plaies glorieuses du Christ ressuscité. Une homélie courte qui a mis en avant Jean XXIII comme « le pape de la docilité à l’Esprit » et Jean-Paul II comme « le pape de la famille ». Une homélie que le pape ne souhaitait pas que les fidèles applaudissent, tant il semblait vouloir maintenir une atmosphère de prière, entièrement tourné autour du mystère eucharistique. Sobre, solennelle, la messe s’est ainsi déroulée dans un immense recueillement.
Fourbus mais heureux
C’est le grand tour du pape en papamobile, au terme de la cérémonie, qui a redonné de la vivacité aux pèlerins. Acclamant le successeur de Pierre, ces derniers ont pu repartir le cœur comblé. Fourbus mais heureux, ils ont peu à peu regagné cars et avions pour rapporter chez eux un peu de l’esprit de la ville éternelle. À l’image de Guilhem, 39 ans, venu fêter ses deux ans de mariage, qui témoignait « repartir serein pour sa vie de famille » grâce à un temps passé à Rome avec sa femme sous le regard bienveillant des papes, plongés dans la Miséricorde divine.
QUELQUES CHIFFRES
– 800 000 fidèles ont participé à la canonisation.
– 1 000 évêques et 150 cardinaux ont concélébré la messe.
– 17 écrans géants étaient installés à Rome.
– 11 octobre : fête de saint Jean XXIII.
– 22 octobre : fête de saint Jean-Paul II.