Paroles aux jeunes : donner sa vie
Czestochowa (Pologne) – 14 août 1991
À Czestochowa pour la Journée Mondiale de la Jeunesse, le 14 août 1991 le cardinal Jean-Marie Lustiger a prononcé cette homélie en la fête de saint Maximilien Kolbe.
Donner sa vie, serait alors, une roulette russe où, à chaque instant, on joue le tout de son existence. Le courage de l’amour serait alors d’accepter de tout perdre, car cela serait plus beau et plus grand.
Si vous pensez de la sorte, je proteste de toutes mes forces. Ce n’est pas cela que nous dit Jésus lorsqu’il nous enseigne ce qu’est l’amour et son mystère. Ce n’est pas cela l’amour qui nous appelle et nous habite. Pourquoi ?
Parce que l’amour -tel que Jésus nous y mène- ne consiste pas dans la destruction de soi, mais dans l’accomplissement de soi par le don de soi-même. Se donner, ce n’est pas se détruire, mais vivre. Aimer jusqu’au bout, comme Jésus le fait, ce n’est pas cesser d’exister, mais entrer dans la Vie -même en traversant la mort...
Cela semble facile à dire. Cela est peut-être déjà plus difficile à comprendre. Mais, si l’on essaie de le vivre, cela semble impossible à accomplir. Nous ne savons jamais, en effet, quand nous sortons véritablement de nous-mêmes et quand nous nous donnons. Nous ne savons finalement jamais quand nous parvenons, en vérité, à franchir la mince frontière qui sépare l’amour de soi-même de l’amour où l’on s’oublie pour l’autre. Car, toujours, nous recherchons dans cet amour quelques signes de réciprocité. Au fond, nous ne sommes certains de donner que lorsque nous recevons. Ou plutôt, lorsque notre don est reconnu par autrui. Nous nous présentons avec l’amour à la main, et nous voudrions que l’amour soit accepté et qu’on nous dise merci.
+Jean-Marie cardinal Lustiger
Archevêque de Paris