Charles de Foucauld, pont entre les hommes

Paris Notre-Dame du 10 juillet 2025

Ils sont Parisiens, mais peu connus pour la plupart. Paris Notre-Dame consacre sa série d’été aux cinq saints parisiens dont les reliques sont présentes dans le nouvel autel de Notre-Dame de Paris. Deuxième figure, sans doute la plus connue des cinq : Charles de Foucauld, ermite mort assassiné dans le désert algérien en 1916 et qui s’est converti, en 1886, dans l’église parisienne de St-Augustin.

© D. R.

« Mettez-vous à genoux, confessez-vous : vous croirez. » La phrase est restée dans l’histoire comme celle qui fit basculer la vie de Charles de Foucauld. En 1886, de retour du Maroc, où il avait cartographié le pays en se faisant passer pour un rabbin, il séjourne à Paris, chez sa cousine Marie de Bondy, rue de Miromesnil. Celle-ci l’invite à rencontrer l’abbé Huvelin, vicaire à St-Augustin (8e). Ce sera pour le jeune Charles, 28 ans, un choc salvateur. « Il voulait confronter le prêtre sur l’existence de Dieu et lui présenter ses objections mais l’abbé Huvelin, inspiré par l’Esprit Saint, ne débattit pas et lui demanda simplement de se confesser », raconte le P. Thibaut de Rincquesen, actuel curé de la paroisse parisienne. Saisi par la grâce, Charles en ressort bouleversé. « Aussitôt que je crus qu’il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour Lui », écrira-t-il. Un siècle et demi plus tard, l’église St-Augustin conserve la mémoire de l’événement : un petit oratoire d’inspiration berbère évoque l’ermitage saharien du saint et le confessionnal de l’abbé Huvelin – toujours visible, dans l’une des chapelles latérales de l’église paroissiale – sera prochainement intégré dans une nouvelle chapelle de la Conversion, ornée d’une grande statue en bronze de Charles de Foucauld et de quelques-unes de ses citations. Après sa conversion, Charles entre à la Trappe, d’abord en France puis en Syrie, mais il pressent qu’il est appelé à autre chose. Ordonné prêtre en 1901, il part s’installer en Algérie, au cœur du désert, choisissant de vivre au plus près des populations touareg, dans la pauvreté, le silence, la prière et une fraternité universelle. Sans chercher à convertir, il veut être « le frère universel », témoin silencieux de l’amour du Christ. Il est assassiné le 1er décembre 1916, dans la solitude de son ermitage.

Un deuxième miracle français

Mais c’est dans l’ouest de la France que surgit, en 2016, le deuxième miracle permettant sa canonisation : le 30 novembre, un ouvrier de 21 ans, prénommé Charle – sans s –, s’écrase de plus de 15 mètres sur le chantier de la chapelle du collège Saint-Louis à Saumur (Maine-et-Loire) – ville qui avait accueilli dans son école de cavalerie, en 1878, un certain… Charles de Foucauld. Bien qu’empalé sur un morceau de banc, il se relève et va lui-même chercher du secours. Une semaine plus tard, c’est sans aucune séquelle qu’il quitte l’hôpital. « L’accident a eu lieu à l’heure exacte des premières vêpres de la fête de Charles de Foucauld, souligne le P. Vincent Artarit, alors curé de la paroisse saumuroise du Bienheureux- Charles de Foucauld. Depuis un an, dans la perspective du centenaire de sa mort, toute la communauté vivait intensément de sa spiritualité et priait pour qu’un deuxième miracle soit reconnu par l’Église et qu’il soit déclaré saint. Et ce miracle n’est pas arrivé dans un établissement scolaire par hasard : Charles de Foucauld parle aux jeunes, à ceux qui cherchent leur voie. » Aristocrate converti, militaire devenu moine, voyageur devenu ermite, saint Charles de Foucauld est un pont entre les mondes : entre Paris et le désert, entre croyants et incroyants. « Comme Augustin, il est un homme en quête qui finit par découvrir Dieu en lui-même », résume le P. de Rincquesen. Aujourd’hui, sa relique scellée dans l’autel de Notre-Dame résonne comme une invitation, au coeur d’un monde tourmenté, à cette même quête intérieure.

Mathilde Rambaud

Saints parisiens

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