Décryptage : Pour ce Carême, s’initier à la méditation silencieuse
Paris Notre-Dame du 11 mars 2021
La méditation est une pratique qui réclame un apprentissage. Pour les chrétiens, elle est également l’occasion d’un cœur à cœur avec Dieu, qui permet de se mettre à l’écoute de sa Parole. Le pôle Mission du diocèse propose un parcours d’initiation en dix vidéos, à découvrir sur le site apprendreaprier.com. Les explications du P. Étienne Grenet, en charge du pôle Mission.
Paris Notre-Dame – En quoi méditer en silence peut nous aider à prier ? Que permet la méditation ?
P. Étienne Grenet – Dans la tradition classique, il y a quatre moments dans la prière. La lectio, la meditatio, l’oratio et la contemplatio, l’ensemble étant parfois désigné par le terme oraison. La méditation silencieuse conduit à faire silence afin d’ouvrir un espace pour que Dieu parle. Il y a évidemment plusieurs niveaux par lesquels Dieu peut me parler. La lecture de la Parole en est une, mais la méditation silencieuse conduit à un niveau plus profond, à une forme de recueillement. Les paroles intérieures, les pensées passent alors au second plan, voire même disparaissent ; ce qui devient premier, c’est l’attention à une présence.
P. N.-D. – Comment s’initier à cette forme de prière ?
É. G. – Certains exercices peuvent être intéressants : apprendre à se connecter à sa respiration, trouver une forme de repos physique, être attentif à sa posture. Mais au-delà de ces techniques mentales, la méditation silencieuse nous fait entrer dans une présence avec un Autre. La grâce est donnée sous une forme que l’on ne maîtrise pas. Cet état contemplatif ne doit pas être confondu avec les états de conscience induits notamment par les techniques de méditation orientale. Certains successeurs de Lanza del Vasto (philosophe italien du XXe siècle, disciple chrétien de Gandhi et fondateur des communautés de l’Arche, axées sur la vie intérieure et la non-violence, NDLR) ont su utiliser ces exercices comme préparation à la prière, sans sortir de cette trajectoire chrétienne. Le point d’ancrage de la méditation chrétienne, c’est la. rumination de la Parole. C’est la parole de Dieu qui nous alimente. Cet apprentissage est à la fois le chantier d’une vie mais en même temps très nourrissant dès le début.
P. N.-D. – Comment tenir sur le long terme ?
É. G. – Comme tout apprentissage, il nous faut trouver des maîtres spirituels. S’appuyer sur une lecture spirituelle, posée sur sa table de chevet par exemple, peut être stratégique pour passer l’écueil du moyen terme. J’ai souvent vu des personnes démarrer une vie de prière et puis s’arrêter au bout d’un an ou deux, en ayant l’impression de ne plus arriver à prier, de ne plus en avoir le goût. Lire ces maîtres spirituels permet de comprendre ce qui se passe car dans la prière, comme dans toute relation d’amour, il peut y avoir des moments de flottement affectif. Jean de la Croix décrypte cela très bien. En comprenant le mécanisme à l’œuvre, on perçoit mieux l’action de Dieu dans l’âme, qui ne se limite pas à la surface. À court terme, le premier écueil se trouve cependant dans la difficulté à amorcer ce temps de prière dans nos journées chargées. Il est bon d’apprendre à se ménager un sas d’entrée dans ce silence. Prendre conscience de ce qui nous habite et le présenter à Dieu. Si on ne dépose pas tout cela d’abord, on n’y arrive pas. Et puis, suivant le temps qu’on a, prendre un Évangile, en garder un verset. Ou reprendre tout simplement un verset que l’on a en tête. Ce temps de recueillement, même court, peut faire jaillir une prière intérieure. Et si l’on n’a que cinq minutes, dire le nom de Jésus sur le rythme de sa respiration, cela peut très bien marcher aussi. Méditer un peu tous les jours et surtout ne pas lâcher. C’est cela qui porte du fruit.
Propos recueillis par Priscilia de Selve @Sarran39
Présence à Dieu. Cent lettres sur la prière, Henri Caffarel, éd. Parole et Silence, octobre 2000, 250 p., 16,30€.
Je veux voir Dieu, Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus, éditions du Carmel, 2014, 1392 p., 38€.
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