Des SDF parisiens en pèlerinage à Rome
Paris Notre-Dame du 30 octobre 2014
À l’initiative de l’association Lazare, 200 personnes, dont 150 anciennement ou encore à la rue, se sont rendues à Rome du 19 au 22 octobre. Retour sur ce temps d’Église inédit, sur le thème : « Tous appelés à la sainteté ! »
Sur la place Saint-Pierre, en cette matinée ensoleillée du mercredi 22 octobre, Farid [1], 53 ans, a les larmes aux yeux. « C’est le plus beau jour de ma vie !, s’exclame-t-il dans un sourire aussi radieux qu’édenté, j’ai serré la main du pape ! » Pour cet ancien sans-abri qui a fréquenté les colocations de l’APA (Association pour l’amitié), l’audience générale a pris des allures de visite privée. Le pape, averti de la présence de « gens de la rue », s’est arrêté devant eux, en a salué une petite vingtaine, riant et parlant avec les uns, bénissant les autres.
Arrivé à Rome le 19 octobre après une nuit de train, le groupe rassemble différentes associations : l’APA, Lazare, Aux captifs la libération, le Village Saint-Joseph, les Frères missionnaires de la charité… Si l’ensemble du séjour revient à 450 euros par personne, ceux qui le peuvent participent à hauteur de 50 euros. Le pèlerinage est en effet financé par la Fondation Notre-Dame, l’Aide à l’Église en détresse et des donateurs privés. Alors que le soleil romain donne au séjour une tournure estivale, les visites comme celles des jardins du Vatican ou de la basilique Saint-Pierre, les témoignages, parmi lesquels ceux du cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor unum, et du P. Nicolas Buttet, fondateur de la communauté Eucharistein, et les pizzérias s’enchaînent.
Point d’orgue du pèlerinage, la veillée Miséricorde, animée par des personnes du groupe Abba le 20 octobre, dans l’église San Lorenzo in Damaso. « Je viens de me confesser pour la première fois de ma vie, raconte Jessica, 27 ans, une habituée du déjeuner dominical à N.-D. des Blancs-Manteaux (4e). C’est hallucinant ! » Lors de la messe de clôture à Ste-Marie Majeure, Mgr Renauld de Dinechin exhorte les pèlerins : « Vous qui avez vécu la galère, vous possédez une incroyable capacité d’espoir. À vous de la transmettre ! » Et de les inviter à vivre l’adhésion de la foi, « alors même que les épreuves reviennent ».
« Je suis allé saluer le pape à la fin de l’audience, confie l’évêque auxiliaire de Paris. Il m’a dit : “Les pauvres sont le secret de l’Église !” » Le message passe, les cœurs s’ouvrent. Sur le quai de la gare, près du train qui retourne à Paris dans la soirée du 22 octobre, la joie et l’espérance sont palpables. • Raphaëlle Autric
Trois questions à …Étienne Villemain, directeur de l’association Lazare.
P. N.-D. : Comment vous est venue l’idée d’un tel pèlerinage ?
É. V. – Les pauvres sont trop souvent aux portes de nos églises, et pas assez dedans. Nous savons bien que c’est le Christ qui se cache en eux, alors nous avons souhaité les mettre au coeur de notre Église, pour qu’ils rencontrent le pape et qu’ils puissent ainsi se sentir aimés.
P. N.-D. : Quel regard portez- vous sur ce séjour ?
É. V. – Chacun est appelé à laisser passer l’amour de Dieu dans sa vie. Ce pèlerinage nous a aidés à suivre cet appel. Chacun s’est donné de façon particulière. Il y a eu beaucoup de bienveillance, d’attentions délicates et discrètes... Nous sommes tous en mission, quelle que soit notre situation !
P.N.-D. : Quels peuvent en être les fruits ?
É. V. – Avec Lazare et l’APA, nous organisons souvent des séjours. L’extraordinaire aide à vivre l’ordinaire. Ces journées sont des petites lumières dans la vie de beaucoup. Ça peut être aussi un point de départ. Par exemple, avec le parcours Jean-Baptiste, nous accompagnons certains d’entre eux vers les sacrements. • Propos recueillis par R. A.
Plus d’infos sur www.lazare.eu
[1] Les prénoms ont été changés
