Dossier de presse “L’Atelier de Notre-Dame”
Le mardi 25 juin 2024, les équipes de la cathédrale Notre-Dame de Paris ont présenté les artistes et experts qui travaillent actuellement sur les aménagements intérieurs.
Préface
Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Paris
Au début du mois de mai 2022, quand j’ai été accueilli comme archevêque de Paris, les travaux de restauration de Notre-Dame avaient commencé depuis quelques mois à peine, après plus de deux ans consacrés à la seule consolidation de l’édifice. Nous projeter, à l’époque, à six mois de la réouverture de la Cathédrale semblait presque impossible, et demandait de la part de tous une solide espérance… que j’ai pourtant immédiatement ressentie sur les différents chantiers où j’ai eu à me rendre, ceux qui dépendent de l’État propriétaire comme ceux qui relèvent de la responsabilité de l’Église affectataire.
Aujourd’hui, tout le travail entrepris pour permettre à Notre-Dame de retrouver, après sa réouverture, toute sa vie et sa beauté, est en train d’éclore. C’est la raison pour laquelle j’ai voulu ce point d’étape : pour expliquer comment nous pouvons dès à présent nous projeter dans la réalité magnifique et complexe que sera la vie quotidienne dans une cathédrale rouverte au culte et à la visite pour la plus grande joie de tous, mais qui demeurera néanmoins le cœur d’un important chantier pendant encore plusieurs années.
Nous allons continuer de travailler jour après jour à préparer cette vie nouvelle de Notre-Dame dans les prochaines semaines et les prochains mois, mais je peux d’ores et déjà vous assurer que nous sommes, que nous serons prêts pour le 8 décembre prochain.
Pour cette espérance qui n’a jamais failli, pour la beauté du travail effectué au service de toute la communauté humaine des pèlerins et des visiteurs à qui Notre-Dame sera bientôt rendue, je veux dire à tous ceux qui participent de près ou de loin, quelle que soit leur mission, par leur travail, leur générosité ou leur prière, au relèvement de Notre-Dame, mes plus chaleureux remerciements et la profonde gratitude de tous les catholiques de Paris.
† Mgr Laurent Ulrich
Archevêque de Paris
Mgr Olivier Ribadeau Dumas, recteur-archiprêtre
Alors que moins de six mois nous séparent maintenant de la réouverture de Notre-Dame, ce sont la joie, l’impatience et la reconnaissance qui m’animent à la perspective d’accueillir fidèles et visiteurs et de pouvoir de nouveau célébrer la messe à l’autel de la cathédrale.
La joie, car je me réjouis comme des millions de gens à travers le monde qui voient cet évènement comme un signe d’espoir et d’unité. Nous nous préparons à accueillir les 15 millions de visiteurs attendus qui auront accès gratuitement à la cathédrale pour prier, découvrir et redécouvrir, écouter et surtout admirer cet édifice érigé pour la gloire de Dieu.
Toute l’équipe de la cathédrale travaille sans relâche sur nos trois grands chantiers que sont le réaménagement intérieur, la réouverture et le fonctionnement de la cathédrale.
Avec les créateurs de l’Atelier de Notre-Dame, tout depuis le mobilier liturgique, les assises, la chasse reliquaire, les vêtements religieux jusqu’à la mise en lumière, le son ou bien encore la signalétique au sein de la cathédrale, tout a été pensé avec une extrême ambition et une grande cohérence, en mettant la liturgie au cœur du projet et en s’intégrant à ’ l’âme’ de Notre-Dame, à son histoire, en cherchant à parler au plus grand nombre.
L’impatience, de voir tous les éléments du chantier de réaménagement intérieur avancer selon nos plans. De grands moments sont à venir avant la réouverture, comme l’installation du mobilier liturgique et celle de la statue de de la Vierge Marie, Notre Dame de Paris, épargnée par l’incendie et qui est actuellement à Saint-Germain l’Auxerrois. L’impatience encore à la perspective des cérémonies de réouverture dont nous souhaitons faire des moments de joie, d’émotions partagées, de rassemblement populaire et d’unité, des moments aussi forts que l’a été l’incendie mais des moments joyeux, qui resteront inscrits dans nos mémoires
Enfin, je voudrais dire toute ma reconnaissance à tous ceux qui œuvrent pour la restauration et la réouverture de Notre-Dame, les compagnons, les entreprises, l’Etablissement Public et les mécènes, ainsi que l’équipe de la Cathédrale qui permettent par leur travail sans relâche et leur soutien, de faire renaitre NotreDame, plus belle et plus vivante que jamais.
Mgr Olivier Ribadeau Dumas
Recteur-archiprêtre et affectataire de la Cathédrale Notre-Dame de Paris
Introduction
Il y a plus de 850 ans, la cathédrale Notre-Dame de Paris a été bâtie pour rendre gloire à Dieu, accueillir les fidèles chrétiens et célébrer le culte. Un chef-d’œuvre architectural a ainsi été conçu qui traverse les siècles.
Devant un tel édifice, on ne peut qu’être humble. Humble devant ceux qui l’ont construit, humble devant tous ceux qui nous l’ont transmis au fil des siècles, humble devant ceux qui l’ont sauvé de l’incendie, humble devant ceux qui l’ont restauré et permettront qu’il soit à nouveau ouvert aux célébrations et à la visite à la fin de l’année 2024. Il convient de saluer la ténacité de l’Établissement public créé pour la restauration de la cathédrale, l’extraordinaire efficacité des architectes face au défi si intense d’un immense chantier que l’on peut qualifier de chantier du siècle, et dire notre gratitude aux compagnons et aux corps de métier qui œuvrent aujourd’hui sans relâche à l’intérieur de la cathédrale.
Il convient également de saluer l’ensemble des donateurs et mécènes, français et du monde entier, qui par des actes remarquables de générosité ont concouru à lancer cette restauration et à permettre de relever cet immense défi.
Cette mobilisation inédite dans l’histoire nous fait plus encore prendre conscience de la valeur universelle exceptionnelle de cet édifice qui tout à la fois nous dépasse et nous rassemble.
Si le chantier de restauration de la cathédrale est confié à l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris, l’aménagement intérieur incombe au diocèse de Paris. Ainsi, « L’Atelier de Notre-Dame » réunit les artistes et experts qui ont mené les différents chantiers. Une équipe qui permet de mener à bien ce projet de façon globale et cohérente.
Le mobilier liturgique
La noblesse du bronze
La mobilier liturgique imaginé et conçu par le designer et sculpteur Guillaume Bardet, se compose de cinq éléments : l’autel, la cathèdre et les sièges associés, l’ambon, le tabernacle et le baptistère. Chacune des pièces dessinées a été conçue en bronze sculpté, un matériau offrant une esthétique puissante, intemporelle et lumineuse.
Choisi pour sa « noble simplicité », l’ensemble du mobilier liturgique permet d’illustrer subtilement ce qu’expriment les enseignements du concile Vatican II, donnant ainsi vie à la liturgie et révélant le mystère eucharistique aux fidèles, tout en offrant aux visiteurs un aperçu de leurs convictions profondes.
Le choix du bronze, Guillaume Bardet y a songé lors de la visite des artistes sélectionnés à Notre-Dame, en constatant la puissance de la pierre nettoyée : « Le bronze s’est imposé pour pouvoir exister sans hurler, sans “sur-montrer”. » L’artiste vivant à Dieulefit (Drôme) voulait trouver dans sa création « ma voix et ma voie, dans les deux sens du terme : mon chemin et mon regard ».
L’introduction prochaine de ce matériau dans Notre-Dame permettra une association harmonieuse avec l’ensemble de l’intérieur de l’édifice composé principalement de pierres et de vitraux.
Le mobilier, qui sera livré à l’automne 2024, est produit à la fonderie d’art Barthélémy Art, à Crest (Drôme).
Vases et objets liturgiques
Un ensemble conçu par Guillaume Bardet
Le diocèse de Paris a également confié à Guillaume Bardet la conception d’objets liturgiques, notamment les vases sacrés.
L’ensemble de la commande comprend le calice et la patène, un ostensoir, un grand ciboire et plusieurs petits ciboires, un encensoir et une navette, des burettes, une aiguière et un bassin. Selon les prescriptions liturgiques, les vases sacrés sont en métal noble, l’argent et l’or.
Destiné à la célébration de la messe, le calice est la coupe dans laquelle le vin est offert. La partie centrale du pied du calice, le nœud, est en forme de croix, rappelant ainsi les paroles de Jésus au cours de la dernière Cène : « Ceci est mon sang, versé pour vous et pour la multitude ». Ce calice mesure 27 cm de haut, afin d’être en harmonie avec les proportions de l’autel. Esthétiquement, la croix reprend la forme de celle qui surplombe le couvercle du baptistère. L’intérieur de la coupe est en or poli miroir, soulignant ainsi la dimension sacrée du vin devenu sang du Christ.
À côté du calice, on trouve la patène sur laquelle est déposée la grande hostie. Selon la tradition, au début de la messe, la patène est déposée sur le calice avant d’arriver à l’autel : leurs dimensions ont donc été coordonnées afin que les deux objets soient superposables.
De petits ciboires destinés à contenir les hosties pour la communion des fidèles ont également été commandés. Ils ont la forme d’une coupe, posée sur un pied effilé, réalisé à l’intérieur en or poli miroir, pour exprimer la dignité de ce qu’ils vont contenir. Un grand ciboire, dont le couvercle est orné d’une croix, d’une contenance de plusieurs centaines d’hosties, servira pour les occasions plus solennelles, notamment le jeudi et le vendredi Saint.
L’ostensoir est un objet liturgique destiné à montrer (lat. ostendere) l’hostie consacrée en dehors de la messe, au cours de l’adoration eucharistique. Au centre, l’hostie consacrée est conservée dans un fin réceptacle transparent (la lunule) reposant sur un disque en or poli miroir, lui-même exposé sur un fin pied réhaussé d’une croix. La finesse de la structure, haute de 59 cm, cherche à mettre en valeur l’hostie consacrée.
L’ostensoir sera conservé dans le nouveau tabernacle situé devant la Pièta de Coustoux et la croix glorieuse de Marc Couturier, et sera exposé tous les soirs après la messe pour l’adoration du Saint Sacrement.
L’encensoir sert à porter l’encens au cours des processions. La navette est le petit réceptacle où l’on présente l’encens en grain afin qu’il soit déposé sur les charbons disposés dans l’encensoir. L’encens porte plusieurs symboliques. Il représente la prière qui monte vers Dieu, un parfum avec lequel on honore ce qui est important (le clergé et les fidèles présents pour la liturgie, la croix, le pain et le vin, le Saint Sacrement).
Enfin, les deux burettes contiennent l’une le vin, l’autre l’eau qui seront versés dans le calice pour la célébration de la messe.
L’aiguière et le bassin sont utilisés au cours de la messe, lorsque le célébrant, avant de monter à l’autel, dit : « Lave-moi de mes fautes, Seigneur et purifie-moi de mon péché ».
Cet ensemble de près de 30 pièces est en cours de production notamment par l’Atelier d’orfèvrerie Marischael, orfèvres de père en fils depuis 4 générations.
Le crucifix d’autel, les chandeliers et un vase placé sous la statue de la Vierge à l’enfant dite « Notre Dame » seront produits en bronze.
Le mobilier complémentaire
Un design relié à l’ensemble des créations
La création du mobilier complémentaire, potelets de mise à distance, bruloirs pour bougies de dévotion et leurs meubles présentoir, a été confiée au designer Vincent Dupont-Rougier.
– Potelets de mise à distance
Leur design s’inspire des arcs-boutants de la cathédrale, très caractéristiques par leurs portées spectaculaires en reprenant les notions de soutien et d’appui, à une échelle différente, pour servir cette fonction. Les potelets sont reliés entre eux par des tresses de sandows spécialement conçues.
– Meuble présentoir pour les bougies de dévotion
Dans le but premier de limiter l’accumulation visuelle de matériel, et dans un souci de rationalisation et de praticité, les présentoirs pour les bougies, la réserve associée ainsi que le tronc et le terminal de paiement (TPE) ont été rassemblés dans un seul et même meuble.
Afin d’animer cet ensemble et de relier visuellement le mobilier aux brûloirs associés, la porte d’accès à la réserve et au tronc est festonnée avec des motifs en losanges et quadrilobés identiques à ceux présents dans les brûloirs ainsi que dans la signalétique créant à la fois un effet de moirage dynamique et faisant apparaitre en arrière-plan un fond à la teinte des rehauts des brûloirs.
– Brûloirs pour bougies de dévotion
Les supports de veilleuses de dévotion sont le fruit de la recherche d’une inscription harmonieuse et cohérente de ce mobilier au regard de l’ordre architectural de l’édifice – piliers, pilastres, colonnes et autres colonnettes en délit – et plus particulièrement dans la composition organique des roses, rosaces et des autres verrières.
Selon la taille et la localisation de ces supports de veilleuses, à l’intérieur des différentes propositions, l’idée d’une recherche compositionnelle à partir des mêmes éléments et d’un registre formel limité rencontre ainsi le champ commun du design, fonctionnalité, ergonomie et économie du projet.
Une grande variété des possibilités d’assemblage par juxtaposition de modules de base a été étudiée dans un premier temps afin d’offrir toutes les déclinaisons possibles pour répondre aux différentes capacités selon les points de dévotion.
La bougie votive officielle de la cathédrale Notre-Dame de Paris, est originaire de la Ciergerie de Lourdes (Hautes-Pyrénées). Elle est confectionnée dans la célèbre Cité Mariale, dans une manufacture reconnue entreprise du patrimoine vivant, située à quelques pas du Sanctuaire Notre-Dame de Lourdes. Cette votive de Notre-Dame de Paris est respectueuse de l’environnement, 100% biodégradable et compostable « Homecompost ».
Les assises
Chaises, bancs, prie-Dieu en dialogue avec l’architecture
« J’ai souhaité créer un mobilier qui dialogue avec l’architecture millénaire d’inspiration gothique de Notre-Dame, ses arches, ses colonnes, ses vitraux mais aussi toute sa douceur et sa transparence qui émeuvent tant les fidèles que les visiteurs du monde entier », explique la designeuse Ionna Vautrin. Ainsi, le dossier relativement bas permet de ne pas obscurcir la perspective de la nef tout en pouvant servir de prie-Dieu pour le rang postérieur, les barreaux aérés du dossier laissent passer la lumière, les formes arrondies créent un ensemble de vagues telle une mer silencieuse prête à accueillir les prières des fidèles comme l’émerveillement des touristes ou spectateurs des futurs concerts. « Ces 1 500 chaises forment une entité visuelle propre inspirée du rythme architectural de la nef. Sa simplicité, sa transparence et sa hauteur lui confèrent une posture d’humilité et d’effacement tout en soulignant la vertigineuse verticalité de la cathédrale », précise-t-elle.
C’est au cœur des Landes, à Hagetmau, commune de 4 600 habitants, que les futures chaises de la cathédrale Notre-Dame de Paris sont actuellement entrées dans leur phase finale de production chez l’entreprise Bosc, structure familiale implantée depuis trois générations dans ce village landais à la tradition séculaire de fabrication de chaises et de fauteuils. Encore habité par l’émotion de participer à « servir un lieu aussi prestigieux », Sylvain Bastiat, 36 ans, de la dernière génération, souligne combien cette « aventure inespérée sonne la consécration de notre positionnement local auquel nous sommes si attachés ». Car si le chêne massif est issu des forêts de Sologne, les chaises sont non seulement 100 % françaises mais même 100 % landaises ; les trois seules étapes qui ne peuvent pas être réalisées dans les 1 400 m2 des ateliers Bosc sont ainsi déléguées à des entreprises locales : le marquage « ND » sur chaque dossier à Capbreton, le tournage – qui donne ses formes circulaires aux barreaux et pieds – à Hagetmau même et l’ajout des fixations en laiton – qui permettront aux chaises d’être accrochées les unes aux autres – à Saint-Paul-lès-Dax.
Pas moins de treize pièces et dix personnes sont successivement nécessaires à la conception d’une chaise, de la découpe initiale des troncs – 50m3 au total – au vernissage final, en passant par le tronçonnage, le sciage, l’usinage, le collage, le marquage, la peinture… Cette dernière a d’ailleurs été choisie avec soin afin que la couleur des chaises s’accorde avec le lieu et sa luminosité retrouvée après restauration.
Alors que près de 700 chaises sont déjà achevées, la livraison des 1 500 chaises – autant qu’avant l’incendie – pour leur installation dans la cathédrale est prévue mi-octobre.
Ionna Vautrin est également en charge de développer les nouveaux mobiliers que sont les agenouilloirs, prie-Dieu individuels, bancs et prie-Dieu longs, en conservant bien sûr l’harmonie esthétique de l’ensemble. Ces mobiliers seront également produits par l’entreprise Bosc.
Dans le prolongement des chaises, les agenouilloirs, les bancs, les prie-Dieu individuels et prie-Dieu longs s’inscrivent dans une ligne sobre et lisible. Ils sont conçus comme un ensemble formellement cohérent pour vivre en harmonie visuelle avec l’aménagement et l’architecture de la cathédrale. Des agenouilloirs seront placés sur les neuf premières rangées de chaises. Leur silhouette adoucie dessine une courte bordure permettant de masquer leur système de fixation et de poser confortablement ses genoux en s’accoudant à la chaise devant soi.
Les prie-Dieu individuels, alignés sur la première rangée, reprennent en miroir les courbures et contours de la chaise. Deux barreaux lient l’accoudoir à l’agenouilloir et dessinent trois fenêtres arrondies évoquant les proportions des vitraux de Viollet-le-Duc.
Le banc, dont le rythme des pieds est calqué sur celui des chaises, invite quatre visiteurs à s’installer pour se recueillir dans les chapelles. Comme la chaise, son dossier est abaissé et dessine un accoudoir pour inviter les fidèles à les utiliser comme prie-Dieu.
Enfin, les prie-Dieu longs sont basés sur les mêmes proportions que celles du banc en y associant les spécificités des agenouilloirs.
Quantités
- 1500 chaises
- 170 agenouilloirs
- 40 bancs
- 60 prie-Dieu individuels
- 20 prie-Dieu longs
La châsse-reliquaire
Un écrin pour la Couronne d’épines
Inspiré par la Couronne d’épines, Sylvain Dubuisson se dit particulièrement touché par « l’action de la pauvreté, le rapport entre la symbolique qui est incommensurable et la simplicité de cet objet », simple jonc tressé, un contraste « qui favorise l’élan spirituel ».
Cet élan, Sylvain Dubuisson l’a matérialisé dans le choix d’un reliquaire résolument vertical. Empruntant à la tradition orientale de l’iconostase – avant son rachat par saint Louis, la Couronne d’épines était abritée à Constantinople –, le reliquaire se présente sous la forme d’un grand retable (3,60 x 2,60 m) en bois de cèdre – qui est le bois de la Croix –, serti d’épines de bronze insérées dans des encoches de plus en plus larges, lui donnant un effet de plus en plus ajouré dans sa hauteur et laissant transparaître ainsi la lumière colorée des vitraux. Au centre, une demisphère d’un bleu profond se détache d’une auréole de douze cercles concentriques de cabochons quadrangulaires à fond d’or, irradiant le motif de la croix. C’est là que sera exposée la Couronne d’épines lorsqu’elle sera montrée à la dévotion des fidèles ; le reste du temps, elle sera abritée dans un coffre-fort hautement sécurisé, dissimulé dans la base du reliquaire, à la forme d’un « tombeau-autel » en marbre, sur lequel reposeront des bougies (en led) de dévotion. L’exigence d’un tel niveau de sécurité est une contrainte forte dans la conception, la relique étant, par définition, inestimable : « Toute la complexité a été d’intégrer ces demandes », partage l’architecte, « en les rendant invisibles. La sécurité doit s’oublier et laisser place à la beauté de l’expérience. »
Cette expérience, voulue par Sylvain Dubuisson, est celle d’une immersion ; par le bleu profond de la demi-sphère, abolissant toute dimension spatiale et offrant aux visiteurs la sensation que la Couronne flotte dans les airs ; par le jeu de transparence du retable et du rayonnement doré de l’auréole, dirigeant les regards en son foyer ; par l’alliance du verre et de l’or, captant la lumière et reflétant un peu partout des points de brillance. « Tout est dans la douceur et la vibration », confie-t-il, « afin de favoriser la dévotion, qui est toujours première et constante dans la conception d’un tel objet. » En plus du brûloir à bougies artificielles et de la possibilité de toucher le reliquaire, un système d’emmarchement est pensé pour permettre aux fidèles de s’agenouiller ou de s’asseoir un moment.
La fabrication de la châsse-reliquaire est confiée aux Ateliers Saint-Jacques & Fonderie de Coubertin pour le travail du bois, de la fonderie, de la pierre et du métal, et au maître verrier Olivier Juteau pour les cabochons en verre.
« On voit bien comment Sylvain Dubuisson a mis toute sa délicatesse et sa finesse dans la conception de ce reliquaire », souligne Mgr Olivier Ribadeau Dumas, recteur de Notre-Dame, « pour favoriser le recueillement lorsque la Couronne sera présentée aux fidèles, mais aussi lorsqu’elle ne sera pas visible. Je souhaite vraiment que l’on puisse passer devant ce reliquaire, et manifester un acte de piété, le toucher, déposer une bougie... Il sera possible de se recueillir en silence, déposer toutes ses épreuves et ses souffrances au pied du grand crucifix, offert par Napoléon III lors du baptême du prince impérial ; des chapelains seront présents pour rencontrer ceux qui le souhaitent et les accompagner dans cette démarche spirituelle. La présence de la Couronne d’épines et des reliques de la Passion dans la chapelle axiale est non seulement un moment important dans le parcours de déambulation de la cathédrale, mais aussi un élément essentiel pour encourager la piété populaire et la dévotion. La Couronne d’épines nous ramène à cet amour magnifique de Dieu pour nous, au Christ qui regarde du même amour Marie-Madeleine la pécheresse et Marie sa mère… Face à cette Couronne, nous sommes tous égaux, car nous sommes tous regardés de la même façon et aimés d’un même amour. »
La paramentique, vêtements liturgiques
Des ornements inspirés par le rayonnement
À l’occasion des célébrations de la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris en décembre 2024, une série de vêtements et d’ornements liturgiques est créée en collaboration avec Jean-Charles de Castelbajac. Ils veulent honorer la noble simplicité de la liturgie, la solennité du lieu et du moment, ainsi que l’élan d’une création contemporaine.
Les vêtements liturgiques sont les habits utilisés par les évêques, les prêtres et les diacres pour la célébration de la messe et des autres offices (comme les laudes ou les vêpres). Pour la célébration de la messe, les évêques et les prêtres revêtent une étole, large bande de tissu portée autour du cou descendant le long du corps et par-dessus, une chasuble, large manteau recouvrant tout le corps. Les diacres portent une étole portée de l’épaule gauche à la hanche droite, ainsi qu’une dalmatique, longue tunique à manches. Pour les autres célébrations, on utilise la chape, qui a la forme d’une grande cape.
Ces vêtements créés par Jean-Charles de Castelbajac sont de couleur blanche, utilisée pour les grandes fêtes liturgiques (Noël, Pâques, Toussaint, les fêtes de la Vierge Marie par exemple). Leur ornementation s’inspire d’éléments constitutifs de l’identité visuelle de la cathédrale : la croix dorée et la lumière colorée des vitraux, marqué par des dominantes jaune, bleu, rouge et vert.
La chasuble créée pour l’archevêque est centrée sur la croix dorée qui concentre des éclats colorés. Elle symbolise la centralité et la vitalité de la croix, le rayonnement et la transmission de la foi. Le positionnement des éclats suggère le foyer d’un dynamisme qui tend à se diffuser. Leur forme évoque également la couronne d’épines du Christ, présente dans un reliquaire à la cathédrale. Un autre modèle est créé pour les autres évêques qui seront présents. La croix dorée y est encadrée de douze croix grecques symbolisant les douze apôtres dont les évêques sont les successeurs. Du sommet de la croix jaillit le rayonnement coloré qui se prolonge pour retomber dans le dos.
Le rayonnement qui était concentré dans la chasuble de l’archevêque se dilate dans les chasubles créées pour les prêtres. La correspondance de ces motifs, le passage du foyer à la diffusion, expriment le lien qui unit l’évêque à son presbyterium, et la manière dont les prêtres sont les collaborateurs de l’évêque pour faire rayonner l’Évangile.
Ces vêtements et ornements liturgiques seront produits par de grandes maisons d’art et d’artisanat françaises et offerts à la Cathédrale dans le cadre de mécénats. Réalisés pour les 700 célébrants présents lors des cérémonies de réouverture, ces vêtements seront utilisés tout au long de la période inaugurale, qui s’étend jusqu’à la Pentecôte le 8 juin 2025. Ils continueront ensuite à être utilisés pour les cérémonies les plus importantes, telles que la messe chrismale célébrée le Mercredi Saint et les ordinations sacerdotales.
« La lumière et son rayonnement ont guidé mon geste créatif, j’ai pensé à la croix glorieuse de Marc Couturier, à l’éclat de la couleur sur la pierre blonde renaissante de Notre-Dame. La couleur, enfant de la lumière, est omniprésente sur les chasubles blanches, en écho aux vitraux qui se reflètent sur les murs de la cathédrale. J’ai pensé à l’émotion, à l’expérience des visiteurs, à l’immersion au cœur de cet événement historique, qu’est la renaissance de Notre-Dame, aux images inspirantes pour une génération en quête de fraternité, de sens et de beauté. » explique Jean-Charles de Castelbajac.
La lumière
Instrument de vie et de révélation
La Cathédrale est un lieu dédié au partage et destiné à établir la communion. Révéler cet universel emprunte de multiples voies(x). Parmi elles, la lumière, instrument de vie et de révélation, est un chemin d’accès à la Présence divine, en toute réalité.
Plonger au sein de la Cathédrale relève d’une expérience sensible unique : son pouvoir architectural et sa profondeur mystique étincellent d’emblée. Le concept d’éclairage liturgique et scénographique vise à exalter cette perception et en manifester ainsi la puissance unique de l’architecture à travers :
- Un éclairage global de l’ensemble des espaces à intensité variable, sur des nuances de blanc, selon les moments de recueillement et la saisonnalité .
- Des points de concentration lumineuse à forte puissance pour révéler les éléments essentiels, flamboiement des pièces maîtresses lors des célébrations principales qui marquent le temps liturgique, rayonnements ciblés autour des objets et des lieux.
Imaginée par l’agence Patrick Rimoux, la mise en lumière de la cathédrale comprendra une série de scénarios lumineux dont 10 scénarios architecturaux, 30 scénarios liturgiques et 10 scénarios concerts, grâce à 2175 points lumineux et 1550 projecteurs.
Pour la première fois dans la cathédrale, l’ensemble des projecteurs seront commandés individuellement sur une régie centrale. On pourra ainsi faire varier chaque projecteur indépendamment en intensité de lumière en faisant varier la puissance. Et l’on on pourra également faire varier la couleur de la lumière blanche allant d’un spectre de 2200K couleur chaude d’une bougie, à 5000K couleur blanche froide.
L’accueil
Réservations, signalétiques et médiations
À la réouverture, près de 15 millions de fidèles et visiteurs du monde entier, impatients de découvrir Notre-Dame, sont annoncés. Pour relever ce défi, nous prenons en compte à la fois les enjeux matériels et logistiques auxquels nous sommes confrontés, pour que les visiteurs puissent non seulement voir et contempler, mais aussi comprendre ce qu’ils vivent.
Les dispositifs élaborés s’appuient sur les réalités (ou contraintes) d’un chantier évolutif, car le chantier de restauration de la Cathédrale, piloté par l’Établissement public, se poursuivra au chevet, sur les arcs boutants… durant encore 4 à 5 années ; la Ville de Paris engagera, quant à elle, un chantier aux abords de la Cathédrale, notamment sur le parvis, pendant au moins 3 ans. Ce dernier débutera à l’automne 2025. Il faut par ailleurs également tenir compte des 6 000 m² de la Cathédrale qui ne permettent en effet pas d’accueillir beaucoup plus que 2 500 personnes à la fois.
Pour sécuriser et faciliter notre accueil, nous privilégions la mise en place d’un dispositif numérique de réservation de créneaux horaires d’accès à la Cathédrale. Ce dispositif sera disponible, à la fois pour les groupes et pour les individuels, à titre gratuit, dès la réouverture. La redécouverte de la Cathédrale sera réservée aux individuels, visiteurs et fidèles, pendant les 6 premiers mois, jusqu’à la Pentecôte 2025. Les groupes ne pourront entrer que 6 mois après la réouverture.
Une application de médiation (développée par Mazedia), « compagnon de visite » téléchargeable dès l’automne sur le site web de la Cathédrale (en cours de refonte) et sur les stores Android et Apple, permettra d’offrir à tous les visiteurs un accompagnement pour redécouvrir l’édifice, avec un soin particulier apporté à l’accessibilité. Des éditions, guides et catalogues sont également en cours de préparation.
Enfin, l’accueil à la cathédrale sera personnifié par une équipe au service des visiteurs et fidèles. Actuellement constituée d’une vingtaine de personnes, notre équipe en comptera une soixantaine en décembre. Nous avons établi un rétroplanning d’embauches et nous nous appuyons sur un mécénat de compétences d’Adecco, qui a accepté de mobiliser ses équipes pour faciliter la constitution de la nôtre. L’accueil à la cathédrale aura un visage, il sera incarné par les sourires des personnels et des 500 bénévoles mobilisés qui veilleront à l’accès, au confort, à la contemplation, à la méditation et à la prière.
Un nouveau parcours dans la Cathédrale
En nous appuyant sur les invariants de la Cathédrale, en particulier sur le mur de clôture du chœur qui présente en sculptures, des scènes de la vie du Christ au nord et des scènes liées à la résurrection du Christ au sud, le nouveau parcours propose une circulation du nord vers le sud. L’application numérique et les guides permettront de mieux comprendre le sens de ce parcours présenté sur le plan page de droite.
Des nouveaux mobiliers
La première expérience du visiteur est celle du vaste volume de la cathédrale. Passé le baptistère, le visiteur est dirigé vers le collatéral nord où il rencontre immédiatement l’espace d’accueil, conçu par l’Agence NC Nathalie Crinière et qui s’enroule autour de la première colonne.
Constitué d’un comptoir bas en métal agrémenté d’un bois dont la couleur sera ajustée en fonction de l’ambiance de la cathédrale, sa forme légèrement spiralée est faite pour accueillir les demandes sur l’ensemble de sa circonférence, tout en laissant le maximum d’espace à la circulation. De là, le visiteur pourra par exemple retirer un dépliant ou un audioguide ou recevoir des hôtes d’accueil des conseils adaptés, dans un volume conforme aux normes ERP qui ne masque rien des lignes de l’architecture.
Symétriquement, côté sud, la boutique est ouverte au maximum sous les arches du collatéral ; bas, en métal, elle englobe les deux dernières colonnes selon la légère torsion d’un ruban de Möbius. L’unique élément haut, une vitrine-présentoir en verre située dans la partie amincie entre les colonnes, vise à un effacement maximal. Un ensemble de lumignons disposés le long du comptoir permet son éclairage. Quant aux postes des hôtes et hôtesses, ils sont répartis sur l’ensemble du pourtour, entre les présentoirs qui permettent d’exposer les objets disponibles.