Entretien hebdomadaire du cardinal André Vingt-Trois sur Radio Notre Dame le 28 février 2014
Le regard de l’archevêque de Paris au retour de la réunion du collège des cardinaux.
Extrait.
Radio Notre Dame : Bonjour Eminence. La question de la famille tout d’abord, en vue du synode qui aura lieu en octobre prochain et pour lequel vous allez jouer un rôle. D’abord peut-être partir de la Lettre du Pape qui est connue depuis cette semaine ?
Cardinal André Vingt-Trois : Oui, c’est un appel du Pape qui rejoint beaucoup d’aspects qu’il a évoqués la semaine dernière pensant le Consistoire, principalement un appel à la prière pour que la réflexion et le discernement de l’Église dans les deux années qui viennent soient ajustés à la situation réelle des familles et constituent un message d’espérance pour l’avenir.
La famille à l’échelle du monde, parce qu’évidemment, c’est une dimension mondiale, cela signifie quelque chose ? Il y a une vision de la famille ?
Cardinal André Vingt-Trois : Il y a plusieurs visions de la famille, mais pas dans le sens où on l’entend en général dans les pays occidentaux. Ce qui est très bien ressorti au consistoire, c’est que, nous autres occidentaux, nous avons tendance à réfléchir sur la famille dans sa forme la plus étroite, c’est-à-dire les parents et les enfants, ce que l’on appelle en terme technique « la famille nucléaire ». C’est le noyau parents-enfants, et qui est accentué encore par le phénomène de l’urbanisation et du travail des parents, et qui coupe la famille de tout son environnement au sens large. Les pays d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique Latine qui sont les plus nombreux et les plus vivants, ont une vision de la famille beaucoup plus large qui inclut plusieurs générations et qui développent des relations tout à fait différentes. Je pense en particulier à l’archevêque de Manille qui a évoqué le fait que beaucoup de Philippins s’exilaient des Philippines pour gagner leur vie à travers le monde et que les enfants étaient confiés à des grands-parents ou à des tantes ou à des oncles, mais que les liens restaient très étroits et que c’était une famille au sens très large. Les deux synodes qui se préparent doivent tenir compte de cette expérience universelle de la famille qui ne se limite pas à nos questions géographiquement très situées.
Sur à la fois votre rôle et ce que l’on peut attendre du synode sur la famille, l’Église n’est pas une institution en soi destinée à prendre des décisions, à voter des lois en quelque sorte, qui vont être effectives. Que peut-on attendre comme influence par la suite des décisions qui seront prises ? Quelles conséquences en attendez-vous ?
Cardinal André Vingt-Trois : Je pense que ce n’est pas tellement dans l’ordre des décisions qu’il faut attendre des conséquences, mais dans l’ordre de l’approfondissement du sens de la famille. Le fait que le Pape ait choisi de mettre la famille à l’ordre du jour pendant deux ans pleins, cela veut dire que l’on va en parler, que l’on va s’en occuper, que l’on va y réfléchir, que l’on va y travailler, que l’on va y être davantage attentif. Par conséquent, déjà d’une certaine façon, c’est une promotion de la question familiale dans l’équilibre de l’existence humaine et des différentes situations dans lesquelles se trouvent les gens aujourd’hui dans le monde. Et puis ce sera, comme toujours dans un synode, un échange d’expériences, un partage des réflexions et des initiatives pastorales prises dans les différents pays, et un approfondissement théologique sur un certain nombre de questions.
Est-ce que des questions auxquelles les médias apportent généralement pas mal d’attention, comme celle des divorcés-remariés, la place de la femme dans l’Église, tout cela va se retrouver dans le synode ou bien allez-vous faire une case à part ?
Cardinal André Vingt-Trois : Cela va certainement se retrouver dans le synode, comme cela s’est trouvé au consistoire sur la question des divorcés-remariés, mais cela ne sera pas l’unique sujet de préoccupation du synode.
– Écouter l’entretien du cardinal Vingt-Trois du 28 février 2014