Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe d’envoi des Baptisés en Mission Diocésaine (BMD) à Saint-Séverin-Saint-Nicolas

Jeudi 18 septembre 2025 - Saint-Séverin-Saint-Nicolas (5e)

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– 24e Semaine du Temps Ordinaire — Année C

- 1 Tm 4, 12-16 ; Ps 110 ; Lc 7, 36-50

Quelle belle scène que celle à laquelle nous venons d’assister dans ce récit de saint Luc ! Quelle humanité est révélée de la personne même de Jésus ! D’abord il se laisse inviter par ce pharisien. Ensuite il a l’air de savoir lire dans les regards et de comprendre ce qui se passe dans le cœur de cet homme pour déceler cette pensée inquiète. Et au lieu de le rabrouer du premier coup, il lui raconte une histoire. Il décrit alors les situations vécues, avec tous les niveaux d’un accueil humain. Le premier c’est l’accueil à l’entrée de la maison, l’accueil de civilité, offrir simplement l’eau, et saluer, souhaiter la bienvenue. Puis la remarque sur cette femme qui non seulement accomplit les gestes de la civilité mais manifeste une grande attention, une grande affection, une grande admiration pour Jésus. Et enfin, troisième degré, la proposition d’un geste qui est plus fort encore, la bénédiction de Dieu, l’onction d’huile. L’onction qui est faite sur celui qui arrive, manifeste non seulement la relation civile, non seulement l’amitié et l’affection mais plus profondément encore la bénédiction. Et cela le Seigneur Jésus le remarque comme un geste d’attention extraordinaire, la manifestation d’une relation très profonde, qui va jusqu’à reconnaître la présence de Dieu dans cette rencontre.

Voilà les mots que nous entendons, que nous repérons et que nous comprenons, les attitudes de Jésus remplies de douceur, d’aménité, de simplicité, pour attirer à lui, pour accueillir vers lui, pour faire grandir dans le désir de le suivre, de l’aimer et d’aimer les frères et sœurs autant que lui, d’aimer les frères et sœurs à cause de lui. Voilà ce qui nous est proposé aujourd’hui, dans la circonstance que nous vivons de ce redémarrage d’année avec les missions nouvelles qui sont confiées, ou le désir d’accomplir les missions déjà confiées et déjà anciennes avec un regain de force, de dynamisme. Nous comprenons que la mission et l’annonce de l’Évangile passent par ces gestes d’humanité les plus forts, de l’accueil, de l’affection, de la bénédiction de Dieu qui circulent entre nous. Pour annoncer l’Évangile, il faut être capable de tout cela. Pour annoncer l’Évangile il faut avoir tout simplement cette qualité de civilité, cette envie d’aimer ceux à qui on s’adresse. Nous sommes dans l’évangile de saint Luc, on n’oublie pas les initiales de cet évangile et des Actes des Apôtres c’est en substance : Cher Théophile, toi qui es aimé de Dieu tu m’es cher. Et c’est pour cela que je vais t’annoncer l’Évangile, et que je vais t’annoncer les Actes d’apôtres, que je vais te dire comment le Seigneur t’a aimé jusqu’au bout et comment les apôtres sont capables d’aimer comme le Seigneur pour que la parole de Salut atteigne les autres. Pour annoncer l’Évangile, il faut aimer ceux à qui on va l’annoncer, il ne faut pas les repousser, il faut leur ouvrir la porte. Et il faut leur annoncer l’Évangile parce qu’on les aime : c’est un cadeau qui leur est fait, que nous nous faisons les uns aux autres, que les autres nous font quand ils nous disent une parole qui peut être une parole évangélique. Ils nous font la grâce de nous dire quelque chose qui nous transformera, comme nous l’avons chanté au début de cette célébration. Il nous faut être remplis non seulement de civilité, non seulement d’affection, mais aussi de la certitude que Dieu bénit cette relation qui naît à l’occasion de l’annonce de l’Évangile.

Alors, me rapportant simplement à la première lecture, la Lettre à Timothée, je découvre - et vous aussi certainement tout à l’heure en entendant ce texte - que, s’adressant à son disciple, Paul lui dit autrement les mêmes choses : « Ne t’inquiète pas, on ne te prend pas au sérieux parce que tu es trop jeune. » Cela peut arriver qu’on ne nous prenne pas au sérieux pour d’autres raisons, parce qu’on est trop vieux, parce qu’on est à côté de la plaque… Ne t’inquiète pas ! Aime, sois simple, sois persuadé de ce que tu as à vivre. Tes paroles ne seront peut-être pas toujours bien ajustées, ton témoignage ne sera peut-être pas toujours suffisant, mais reste dans la fidélité, reste dans la simplicité de ce pour quoi tu es fait. Le Seigneur t’a trouvé ainsi avec tes qualités, tes défauts, tes insuffisances mais aussi tes richesses, compte sur lui plus que sur elles. Compte sur sa présence, il est là avec toi chaque jour, il ne veut que se révéler à travers toi. Tu es certes important dans la démarche mais n’oublie pas que c’est lui qui est là à travers toi. Pense que la fidélité à écouter ou à lire l’Écriture et à la partager avec d’autres est la vraie nourriture de ton existence. Pense que si tu as été choisi c’est par grâce et par amour mais n’oublie pas d’être avec les autres pour annoncer l’Évangile. Quand tu as été choisi par le collège des Anciens - quand tu auras reçu cette lettre de mission que l’évêque va te remettre aujourd’hui - pense que l’évêque n’était pas tout seul et toi non plus. Mais que c’est tout le peuple qui évangélise en ta personne. Veille sur ce que tu as à dire, ne te laisse pas aller à des paroles inutiles ou à des paroles qui seraient simplement un jugement de toi. Laisse ta parole être modelée par le Christ, par le don de l’Eucharistie, par le don des sacrements, par le don de sa propre parole.

Sois simple et fidèle pour être son témoin, son disciple et l’apôtre dont il a besoin.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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