Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Vêpres au Pardon de ND du Folgoët Procession des paroisses Célébration mariale

Dimanche 8 septembre 2013 - Notre-Dame du Folgoët (Finistère)

Le chrétien qui entre dans l’Église devient membre d’une famille fondée sur la confiance dans la communauté et la foi dans l’amour de Dieu qui surpasse toute difficulté.

 Ac 4, 32 ; Ps 132 ; Mt 18, 15-20

Frères et Sœurs,

Qu’avait-il donc de si extraordinaire ce groupe des premiers disciples dont les Actes des apôtres nous parlent et dont nous venons d’entendre l’histoire de leur vie commune ? Qu’est-ce qui les a conduits à vivre non plus simplement comme une association sans grande contrainte, mais véritablement comme une famille ? Car les signes que nous avons entendus du partage des biens, de la vie commune, de l’écoute ensemble de l’enseignement de Dieu, de la prière commune, sont des signes qui dépassent les exigences quotidiennes de la vie de tous. Être chrétien ce n’est pas simplement appartenir à un club où chacun apporte un peu quelque chose et reçoit aussi quelque chose, mais dans lequel il n’y a pas de solidarité profonde. Il vient pour une activité, il vient pour recevoir une qualité de vie, il ne vient pas pour s’unir aux membres du club. Le chrétien qui entre dans l’église, comme nous le dit les Actes des Apôtres de ceux qui répondaient à l’appel, n’entre pas simplement dans un club, il entre dans une famille. Et ce qui caractérise une famille c’est précisément la dépendance mutuelle des uns par rapport aux autres. Faire une famille, c’est faire un ensemble destiné à vivre chaque jour la même vie, à accepter chaque jour de recommencer avec ses faiblesses, ses limites, ses aspérités, ses difficultés. C’est accepter de supporter ce qui est gênant chez les autres et accepter aussi de faire supporter aux autres ce qu’il y a de gênant chez nous. Mais nous savons qu’en dehors de cette alliance, de ce pacte par lequel les membres d’une famille sont liés les uns aux autres, il n’y a pas de sécurité réelle pour l’amour mutuel. Si s’aimer les uns les autres c’est simplement suivre son instinct, si c’est simplement se supporter tant que cela nous arrange et se séparer quand cela ne nous arrange plus, alors cet amour-là n’est pas porteur véritablement d’une sécurité dont chacun des membres de la famille a besoin pour exister tel qu’il est, avec ses richesses, ses pauvretés, ses espérances, ses souffrances. Savoir que rien en ce monde, ne peut provoquer notre rejet, savoir que rien en ce monde ne peut justifier que nous rejetions l’autre, c’est s’établir dans une confiance où l’amour devient le ciment d’une relation qui ne s’éteint qu’avec la vie. C’est le même genre de relation qui s’établit dans l’Église, c’est la même persévérance définitive qui fait que quiconque est devenu membre de l’Église ne peut plus en être dissocié sauf s’il s’en coupe lui-même. C’est la même confiance qui nous permet, avec des gens de cultures différentes, de générations différentes, d’espérance différente aussi, de construire quelque chose en commun, c’est ce que nous appelons la fraternité chrétienne.

Le pardon de cette année qui est centré sur cette expérience de la fraternité chrétienne, dont vous avez entendu quelques exemples au long de la procession, est simplement un appel qui nous est adressé à tous. Qu’il est beau, qu’il est bon pour des frères de vivre unis ! Il est beau, il est bon pour l’Église que ses membres vivent dans la communion, qu’aucun et aucune de ses membres ne se prévalent de ses idées, de ses qualités, de son pouvoir, pour imposer ses vues aux autres. Qu’aucun de ses membres ne veuille devenir le maître de son frère, mais que tous progressent dans le respect et la confiance.

En nous confiant à l’amour de Notre Dame, en nous confiant à son intercession, nous demandons au Seigneur qu’Il nous fasse grandir dans cet esprit de fraternité, non seulement en esprit, mais aussi en vérité, c’est-à-dire à travers notre manière de vivre. Qu’en rentrant dans vos différentes communautés, vous soyez renouvelés dans votre désir d’être comme des frères et des sœurs pour vos semblables et que par ce désir vous fassiez grandir la confiance dans la communauté et la foi dans l’amour de Dieu qui surpasse toute difficulté.

Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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