Prêtre, « pour faire du bien aux gens »
Paris Notre-Dame du 17 juin 2021
Il y a vingt-cinq ans, treize hommes étaient ordonnés prêtres pour le diocèse de Paris par le cardinal Jean-Marie Lustiger. Parmi ces prêtres qui fêtent leur jubilé, le P. Antoine d’Augustin, curé et recteur de la basilique N.-D.-des-Victoires (2e).
Paris Notre-Dame – La vision que vous aviez du sacerdoce il y a vingt-cinq ans, tout juste ordonné prêtre, et celle que vous avez aujourd’hui a-t-elle changé ? Et si oui, en quoi ?
P. Antoine d’Augustin – Au début, quand on est ordonné prêtre, le « moi » est très présent, le « je » aussi. On est rempli de ce qu’on pense qu’il faut faire et de ce qu’il ne faut pas faire… Sans doute parce qu’on avance dans le vide : on ne sait pas si on va être fidèle, si on va être heureux… Mais on l’espère ! Aujourd’hui, vingt-cinq ans après, je pense que tout cela a disparu. Je sais que le Seigneur est là. J’ai appris à me reposer en Lui et par Lui. Je connais un peu mieux sa fidélité, sa façon de faire. Quelque chose s’est apaisé, affiné… C’est un travail que le Seigneur opère en nous sans qu’on en ait vraiment conscience. Il est tellement bon qu’il nous laisse faire. Et puis il nous dit : tu vois, ce n’était pas la peine de t’affoler pour cela… Et petit à petit, on se laisse prendre par lui, la fécondité est plus grande, sans qu’on y soit vraiment pour quelque chose. Seul notre consentement initial est renouvelé.
P. N.-D. – Est-ce que vous êtes aujourd’hui un prêtre plus accompli ? Un pasteur modelé par ses brebis ?
A. A. – C’est ce que m’avait dit mon premier curé : tu verras, ce sont tes fidèles qui feront de toi un prêtre. C’est très vrai. Je n’ai jamais voulu les quitter et quand j’ai dû le faire, cela a été une vraie souffrance. Une chose est sûre, on les aime de plus en plus. Quand j’interroge des parents, cela ressemble à la manière qu’ils ont d’aimer leurs enfants, viscérale. On souffre pour eux et avec eux, on est heureux pour eux, on se bat pour eux… Presque plus que pour Dieu ! Si j’ai voulu être prêtre, c’est pour faire du bien aux gens. Or, le plus grand bien qu’on puisse faire aux autres, c’est de leur apporter le Christ. Je n’ai pas d’autre objectif. Quand j’accueille des fiancés lors de leur préparation au mariage, je leur dis toujours : cette préparation va durer un an et mon objectif est que vous soyez heureux. Mais en disant cela, je mise sur le Seigneur car je sais bien que c’est lui qui va agir.
P. N.-D. – Quels conseils donneriez-vous à ces jeunes qui vont être ordonnés ? Y a-t-il des clés pour être un prêtre heureux ?
A. A. – Oui il y a une clé, peut-être deux. La première, c’est la relation au Christ dans la prière, silencieuse, amoureuse, intime. Souvent et longtemps. Savoir quitter le champ de bataille pour se retrouver devant le Seigneur. C’est indispensable. Sans cette intimité avec le Seigneur, je ne peux rien donner. Et l’amplitude des besoins est si grande qu’il n’y a que le Seigneur qui puisse agir dans cette plénitude. C’est ce que je dirais à un jeune prêtre : prie une heure par jour sans te poser de questions. Et une heure, c’est un minimum. Car le monde corrompt l’âme et tu risques d’y passer. Un jour dans ta vie, tu te retrouveras à genoux. Ce jour-là, il vaut mieux que tu sois sérieusement attaché au Christ. La deuxième clé, c’est l’Église. J’ai toujours énormément reçu de mes évêques. Une fois, dans ma vie de prêtre, j’ai beaucoup souffert, et c’est auprès de mon évêque, à genoux avec lui, que j’ai reçu ce qui m’était nécessaire pour pouvoir avancer. Il suffit de dire la messe à ses côtés. Il y a quelque chose de notre être de prêtre qui est éminemment lié à l’évêque. Nos évêques sont à notre service, et c’est faire preuve d’honnêteté que de le reconnaître. À ce frère prêtre, je dirais donc : soit ancré profondément dans le Christ et n’hésite pas une seule seconde à toujours revenir vers ton évêque, et tu seras nourri de sa grâce.
Propos recueillis par Priscilia de Selve @Sarran39
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