Prêtres hors les murs

Dans quelques églises parisiennes et en banlieue [1], des panneaux exposés actuellement retracent l’histoire de la Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville (FMPV). A l’occasion de l’Année sacerdotale, ses membres veulent rappeler la particularité de leur vie.

© Sophie Lebrun

Devant une petite chapelle située à gauche de la nef, à N.-D. de la Croix (20e), cinq panneaux colorés attirent l’œil. À l’occasion de l’Année sacerdotale, ils sont exposés afin de présenter une manière de vivre la prêtrise différemment : avec la Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville (FMPV). Une affiche cartonnée raconte l’histoire de cette fraternité, née en 1990 d’une intuition du cardinal Jean-Marie Lustiger. Une autre revient sur ses fondements : des prêtres diocésains issus du séminaire de Paris, nommés par l’archevêque et les évêques d’Ile-de-France dans l’une des onze paroisses FMPV de la région. Une autre, encore, présente les trois prêtres de la paroisse : un groupe qui vit en communauté en vue d’une mission particulière. « Depuis presque vingt ans, la FMPV conjugue deux idées : une équipe de prêtres soudée et leur circulation pour décloisonner les diocèses », explique le P. Jean-François Brard, modérateur de la FMPV et curé à la paroisse de la Porte de la Brie, à Val d’Europe (77).

Une charte de vie fraternelle

La quarantaine d’hommes de Dieu actuellement dans la fraternité mènent une vie communautaire intense. Par équipes de trois ou quatre, leur quotidien est rythmé par de nombreux temps communs : les laudes, des repas plusieurs fois par semaine et une journée par mois ensemble. Sans oublier les trois rencontres annuelles de tous les membres. Autant d’aspects stipulés dans la charte de la communauté, mise en place en 2007. C’est cette manière de vivre le sacerdoce qu’a souhaitée le P. Benoît Aubert quand il a été ordonné il y a trois ans, avant d’être nommé à Villemonble (93). « Dans la vie de la paroisse, il peut y avoir des moments plus difficiles, comme une dispute avec un fidèle. J’ai alors des frères vers qui me tourner. » Des prêtres d’âges différents qui s’épaulent, avec des charismes et des caractères divers, peuvent susciter des vocations, en montrant que l’on peut s’engager dans la prêtrise sans perdre sa personnalité.

Franchir le périphérique

Cette pastorale des vocations va au-delà des frontières de Paris. Créée alors que les nouvelles villes naissaient autour de la capitale, la fraternité envoie ses équipes en banlieue pour y apporter un soutien logistique et un dynamisme essentiel. Même si l’adaptation de la réalité parisienne que rencontrent les prêtres durant leur formation à celle de la banlieue est toujours un pas, comme le raconte le P. Aubert. « J’ai été formé dans une réalité ecclésiale très marquée par la mission, alors qu’en Seine-Saint-Denis, ce ne sont pas les mêmes problématiques. » Le passage du périphérique a beau avoir eu lieu il y a treize ans pour le P. Brard, cela reste aussi toujours un événement à ses yeux, conscient qu’il doit fonder une église dans une ville qui n’a pas encore construit son histoire. Ayant grandi en banlieue, le P. Gaël Rehault, prêtre à Cergy (95) n’a quant à lui pas caché sa disponibilité pour aller « servir au-delà des frontières de Paris » quand il a demandé à être ordonné. « J’appréhendais plus de me retrouver seul dans mes premières années de prêtrise, confie le vicaire de 36 ans. C’est une population très cosmopolite, mais cela ouvre l’horizon et offre de nouvelles perspectives. »

La formule semble toujours être d’actualité. Des prêtres des diocèses accueillant des membres de la FMPV posent de plus en plus de questions, l’air intéressé. Mais ce sont aussi les demandes d’autres diocèses qui ont étonné le P. Brard : à l’image du conseil épiscopal de Lyon, venu rencontrer des membres de la FMPV, l’an dernier. • Sophie Lebrun

La Fraternité concerne cinq diocèses

A Paris, il existe cinq paroisses de la Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville (FMPV), avec un curé et deux ou trois prêtres chacune : N.-D. de la Croix (20e), St-Jean-Baptiste de Belleville (19e), St-Lambert de Vaugirard (15e), St-Ambroise (11e) et St-Joseph des Nations (11e). En Seine-Saint-Denis, ils sont trois prêtres par paroisse à Villemomble, Aubervilliers et Montfermeil. La paroisse de Fontenay-sous-Bois (94) accueille également trois prêtres, tout comme celle du Val d’Europe (77). A Pontoise, quatre prêtres s’occupent de la paroisse de Cergy, trois de celle d’Eaubonne.

Propos

P. Jean-Marc Pimpaneau, curé de N.-D. de la Croix (20e), membre de la Fraternité depuis son ordination, en 1992.

« Je pense que personne n’est fait pour vivre seul. Même si je crois profondément au célibat des prêtres, la vie fraternelle que je partage avec mes frères est très importante. On prend la plupart de nos repas ensemble, on concélèbre la messe à N.-D. de la Croix (20e). Une fois par mois, on passe 24 heures ensemble, du dimanche soir au lundi soir. Avec mes collègues, nous allons souvent à l’extérieur de Paris, dans une maison religieuse. Nous passons la matinée à prier et l’après-midi, nous allons nous promener ; les discussions vont bon train. En rentrant, il arrive que l’on s’arrête dans un restaurant, sur le bord de la route. De temps en temps, on planifie aussi une soirée culturelle, au cinéma, ou on va prendre un repas chez des paroissiens. Quand on est reçu tous les trois, c’est autre chose que d’être un prêtre seul face à une famille ou à un couple. Les paroissiens sont heureux de voir que l’on n’est jamais seul à tout porter. On sait ce qui se passe dans les groupes dont les autres prêtres ont la charge, les paroissiens se rendent compte que l’on a tous une vision globale du travail. On les sent rassurés et notre unité déteint sur la paroisse. » • Propos recueillis par S.L.

Gilles, 47 ans, paroissien à St-Ambroise (11e) depuis dix ans

« Je suis arrivé dans le quartier en même temps que le P. Alain Gambart. J’ai donc le mê­me curé depuis dix ans, avec une série de jeunes vicaires qui se sont succédé. Dans le fonctionnement, j’ai vraiment le sentiment de ne pas avoir un curé, mais plusieurs. D’un point de vue quantitatif, c’est un privilège d’avoir toujours quatre prêtres dans une même paroisse. Dans le travail, on sent les différentes sensibilités qui apportent une vraie richesse. Les quatre sont au courant précisément de toutes les interventions des laïcs dans la paroisse : s’ils sont débordés, ou disponibles ; ils connaissent les expériences de chacun. Par exemple, le P. Guillaume Normand avait besoin de quelqu’un pour intervenir auprès des jeunes et bien que je sois plus au contact d’un autre prêtre de la paroisse, il a su qu’il pouvait venir me demander de l’aide. Dans leur quotidien, s’ils se laissaient aller, il n’y aurait plus de vie de fraternité, ils pourraient très bien vivre en parallèle. Mais parce qu’ils font partie de la FMPV, ils suivent des règles pour se voir. Ils sont aussi, pour nous, un lien avec la manière de vivre dans les diocèses voisins. Comme on reste en contact avec les anciens prêtres qui sont partis, ils nous font toucher une réalité qui nous échapperait sinon. » • Propos recueillis par S.L.

[1Jusqu’à la fin de l’année, retrouvez l’exposition mise en place par la FMPV, à l’initiative de Mgr Renauld de Dinechin, dans les paroisses de N.-D. de la Croix (20e), St-Lambert de Vaugirard (15e), St-Ambroise (11e) et St-Joseph des Nations (11e) ainsi que dans quatre églises d’Île-de-France (Montfermeil, Cergy, Eaubonne, Val d’Europe).

Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville (FMPV)

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