Doctrine Sociale de l’Église – La Trinité et la personne humaine comme être de relation
Conférence par le père Baudoin Roger, chapelain de la cathédrale, responsable du département Économie, Homme, Société au Collège des Bernardins le dimanche 13 décembre 2009 à Notre-Dame de Paris.
La Trinité et la personne humaine comme être de relation
Introduction
La semaine dernière, nous avons parlé du mystère de l’Incarnation. Nous avons vu comment aucune des réalités du monde, et aucune des activités humaines, ne sont étrangères à Dieu. Toutes sont porteuses d’une dimension spirituelle. Nous avons en outre conclu en évoquant l’individualisme que le christianisme a contribué à développer, tout en rappelant que le christianisme n’endossait pas cet individualisme.
Aujourd’hui, nous verrons comment l’Église, en soulignant la place de la communauté, se tient à distance de l’individualisme. Le fondement de cette position, c’est sa conception de l’homme : l’homme n’est pas un individu mais une « personne ».
Ce concept de personne trouvant son origine dans la théologie Trinitaire, nous évoquerons d’abord la Trinité et les Personnes divines. Nous reviendrons ensuite à l’homme, créé à l’image de Dieu, pour voir comment ce concept de personne s’applique à lui, comment il fonde une réflexion morale d’ordre social, et quelles en sont les conséquences principales pour la Doctrine sociale de l’Église.
La Trinité et les personnes divines
Sans entrer dans une réflexion trop abstraite sur la Trinité, nous partirons de quelques constats simples pour mettre en évidence un aspect particulier de la Trinité, celui de la relation.
Le mystère de la Trinité, c’est que Dieu est union de trois « personnes » : le Père, le Fils et l’Esprit, comme on l’apprend au catéchisme.
Notons que ces noms sont significatifs : lorsqu’on dit que la personne du Père s’appelle le « Père », de même pour le Fils, on dit que la paternité et la filiation ne sont pas pour eux des attributs, comme c’est le cas pour les hommes. Les hommes sont désignés par leur nom ; ils sont donc Pierre, Paul ou Jacques. Et même lorsqu’il arrive à l’homme d’être père, ce n’est jamais la paternité qui le définit. Pour l’homme, la paternité est bien un attribut. Lorsque nous disons que Dieu est Père, au contraire, nous disons que la paternité n’est pas pour lui un attribut, mais qu’elle le définit : l’être du Père, c’est la paternité. Pour le dire autrement, il n’est pas quelqu’un qui, en plus, serait père, il « est » Père au sens fort du verbe être, celui qui définit, celui qu’on utilise pour dire « tu es Jean », et non pas au sens faible du verbe être, celui qui qualifie, celui qu’on utilise pour dire « la cathédrale est grande ».
Mais si le Père « est » père au sens fort, on ne peut pas le penser sans faire référence au Fils. Il ne peut être conçu qu’à l’intérieur de la relation qui l’unit au Fils. Il en est de même pour le Fils qui « est », aussi au sens fort, le Fils, et qui ne peut pas être conçu sans référence au Père. Cette réflexion sur les noms de Père et de Fils, nous conduit à constater que le Père et le Fils ne peuvent être conçus qu’à l’intérieur de la relation qui les unit.
En outre cette relation est si étroite qu’elle les rend indissociables. En effet, la vie du Père, son être, c’est d’engendrer, il est engendrement. Sa vie, c’est un dynamisme d’amour qui le porte hors de soi dans l’acte d’engendrement. Et parce que le Père est engendrement, cet engendrement est absolu : le Père se donne tout entier dans l’engendrement du Fils.
Venons-en maintenant au Fils. Notons d’abord que le Fils est de même nature que le père, puisqu’il est engendré par Lui. « Tel père, tel fils » pourrait-on dire. Donc, la vie du Fils, est, comme celle du Père, un dynamisme d’amour qui le porte hors de soi, qui le porte à se donner totalement, par amour. À qui se donne-t-il ? Il se donne en retour à son Père dans la reconnaissance de l’amour par lequel son Père l’engendre et qui le constitue comme Fils.
Restons en là, en laissant de côté le Saint Esprit, pour dire simplement que le Père et le Fils partagent le même dynamisme d’amour, par lequel ils se donnent totalement et éternellement l’un à l’autre. La Trinité apparaît ainsi comme une circulation d’amour qui les unit éternellement dans un lien indissociable.
Regardons maintenant ce qui différencie le Père et le Fils, ce qui constitue leur identité propre. Ce qui les différencie, c’est la manière de vivre la relation qui les unit : l’un est le Père qui engendre, l’autre le Fils qui est engendré. Ils ont bien la même nature, ils sont bien unis de manière indissociable. Ce qui les différencie, ce qui les constitue dans leur singularité personnelle, c’est leur position à l’intérieur de la relation qui les constitue, qui les constitue respectivement et indissociablement comme Père et comme Fils. Pour désigner ce qui caractérise le Père et le Fils en les différenciant, les théologiens ont forgé le terme de « personne ». A l’intérieur de la communion Trinitaire, le Père est une personne, le Fils est une autre personne.
Ces réflexions trop rapides nous montrent que les Personnes divines sont caractérisées par la relation qui les constitue, qu’elles vivent dans une communion parfaite, chacune se donnant éternellement et totalement à l’autre. Avant de considérer la personne humaine, retenons trois mots à propos des Personnes divines : la relation, qui constitue la personne ; le don de soi qui est le dynamisme et la vie propres à la nature commune aux Personne divines ; enfin, la communion, qui est l’unité parfaite qu’elles constituent.
Ces trois termes, relation, don de soi, communion concernant les Personnes divines s’appliquent aussi à l’homme, qui est créé à l’image de Dieu. Nous développerons aujourd’hui le premier, en parlant de l’homme comme « personne », terme qui manifeste qu’il est naturellement un être de relation. Nous reviendrons seulement la semaine prochaine sur le don de soi et la communion. Nous verrons qu’ils sont pour l’homme l’accomplissement de sa nature personnelle, accomplissement que réalise l’Eucharistie.
La personne humaine
Quittons maintenant la théologie Trinitaire pour voir comment ce terme de personne s’applique à l’homme, ce qu’il signifie et ce qu’il implique.
Pour bien comprendre le concept de personne, on peut l’opposer à celui d’individu. L’individu souligne l’autonomie de l’homme, tandis que la personne souligne la place de la relation et renvoie à la dimension sociale de l’homme. Tout comme la Personne du Père n’existe pas sans le Fils, l’homme conçu comme personne ne peut pas être conçu indépendamment de sa relation aux autres. Lorsqu’on affirme que l’homme est une personne, on dit que l’homme est un être de relations, un être naturellement social, qui a besoin des relations aux autres parce que c’est à l’intérieur de ces relations qu’il se développe.
Alors me direz-vous : concrètement, est-ce que l’homme est un individu ou une personne ? La plupart de nos contemporains répondraient : un individu. Je fais ce que je veux, quand je veux, je suis autonome. L’individualisme est bien la représentation dominante, en particulier dans nos pays occidentaux et, comme nous l’avions vu à la fin de notre dernière rencontre, cet individualisme n’est pas étranger au christianisme.
Et pourtant, l’homme n’est pas un individu autonome, ni dans la conception chrétienne, ni dans la réalité de son être. Il me semble même que, penser l’homme comme individu, c’est faire preuve d’un aveuglement éclatant. De l’individu autonome, centré sur soi, ne pourrait-on pas dire qu’il est comme celui qui se regarde le nombril ? Tout centré sur lui-même, il persiste à se croire autonome, alors qu’il a sous les yeux la preuve qu’il ne l’est pas. Le nombril, c’est en effet précisément la trace, dans notre chair, de notre dépendance native à l’égard des autres : d’une part, chacun naît raccordé à sa mère ; d’autre part, la vie de l’homme trouve son origine dans la relation de l’homme et de la femme qui lui ont transmis la vie. Il y a là une première indication, d’ordre biologique, qui tend à montrer que l’homme n’est pas un être autonome.
Outre cet aspect biologique, l’expérience des enfants sauvages, qui ont grandi à l’écart de toute société, montre que la relation est essentielle pour que l’homme devienne vraiment homme. Notre capacité à parler, à penser, et même nos idées, nos savoirs, nos talents, tout cela chacun de nous l’a développé grâce aux relations avec les autres. Jamais, certes, sans notre investissement personnel, mais jamais non plus sans les autres… Ce que nous sommes, nous le devons en large partie aux autres.
Tous ces éléments concourent donc pour soutenir que l’homme est une personne plutôt qu’un individu, pour nous rappeler que la relation aux autres est source de sa vie, de sa croissance et de son développement.
Avant de poursuivre, notons que cette affirmation est fondée rationnellement, et donc que sa vérité peut être reconnue par tous les hommes, indépendamment de leur foi. Tous peuvent ainsi reconnaître que le développement de l’homme dépend de son environnement social, et qu’il requiert l’accès à un certain nombre de ressources. Pour les chrétiens, cette affirmation a en outre une portée spirituelle : d’une part, parce que le développement intégral de l’homme inclut indissociablement sa croissance humaine et sa croissance spirituelle ; d’autre part parce que la personne se réalise pleinement dans la communion, à l’image de la Trinité.
La « personne », fondement de la morale sociale
Ces différentes conceptions de l’homme ont des conséquences importantes sur la morale sociale. Selon que l’on conçoit l’homme comme personne, ou comme individu, on n’aura pas la même conception de ce que sont un ordre social, économique, ou politique, justes ; on pourra concevoir, ou pas, le rôle qu’a la société pour permettre à ses membres de se réaliser effectivement.
Si l’homme était un individu, totalement autonome et indépendant, l’ordre social juste se limiterait à éviter les empiètements d’une liberté sur une autre. La seule règle sociale serait : tout est permis,… pour autant que cela ne gène pas les autres. Si au contraire l’homme est une personne, alors les exigences en matière sociale sont d’un tout autre ordre. Les relations aux autres ne sont pas des interférences qu’il faudrait réguler pour assurer la coexistence d’individus autonomes ; ces relations sont comme la matière qui permet à chaque personne de se développer, d’accomplir ses capacités et son humanité.
Ainsi, dans une perspective personnaliste, le développement de l’homme dépend du contexte social dans lequel il vit. D’une part chacun est influencé, positivement ou négativement, par son entourage proche, et par la société qui l’environne. D’autre part, le développement personnel requiert l’accès à des ressources fondamentales, ressources qui lui sont nécessaires et qui relèvent de la société. Cette perspective personnaliste impose d’identifier les interdépendances entre les personnes et les institutions, pour voir comment elles contribuent positivement ou négativement à la croissance des personnes.
Ces interdépendances peuvent être d’ordre individuel : le comportement de l’un influence l’autre de manière positive, ou négative. Comme le dit Paul VI, l’homme est « aidé, parfois gêné par ceux qui l’éduquent et l’entourent » (Paul VI, Populorum progressio §15). Benoît XVI rappelle ainsi avec justesse que « Nul ne vit seul. Nul ne pèche seul. Nul n’est sauvé seul. Continuellement la vie des autres entre dans ma vie : en ce que je pense, dis, fais, réalise. Et vice-versa, ma vie entre dans celle des autres : dans le mal comme dans le bien » (Benoît XVI, Spe salvi §48). La morale personnelle n’est donc jamais totalement indépendante de la morale sociale.
Les interdépendances sont aussi médiatisées par des institutions ; celles qui concernent les modes de travail, de rémunération, d’éducation, de vie familiale, l’organisation de la cité, des transports, des loisirs,… mais aussi le mode de fonctionnement des échanges, de l’économie, de la finance,… Toutes ces institutions, et plus largement la culture et les valeurs qu’elle porte, influencent les personnes qui vivent dans la société, et la manière dont ils y vivent. Elles conditionnent la manière dont ils peuvent plus ou moins facilement y accomplir leur humanité. Elles sont donc porteuses d’enjeux moraux. Là encore, une réflexion d’ordre moral au niveau social est nécessaire.
Cette réflexion est l’objet de la Doctrine sociale de l’Église, réflexion qui est fondée sur le caractère personnel de l’homme. Elle vise d’une part, à convertir les cœurs, c’est-à-dire à transformer les personnes, pour qu’elles ne prennent pas seulement en compte leur bien propre, mais aussi le bien commun. Elle vise d’autre part à transformer les structures ou les institutions, pour qu’elles soient effectivement ordonnées à la croissance des hommes.
La personne et le bien commun
Reconnaître l’homme comme une personne permet de souligner la dimension positive du bien commun et aussi d’atténuer la distinction entre bien propre et bien commun. Rappellerons simplement qu’il comprend « l’ensemble des conditions sociales qui permettent à chacun d’atteindre sa perfection d’une façon plus totale et plus aisée » (cf. Compendium §164), par exemple l’ordre public, l’accès à l’éducation, à la santé, à un travail…
Si l’homme est un individu, les exigences du bien commun sont perçues comme une contrainte, elles impliquent pour l’homme des privations et apparaissent essentiellement négatives, en tension avec son bien propre : il faut payer des impôts pour l’éducation de tous, et cela ne me rapporte rien.
Si l’homme au contraire est une personne, ce qu’il concède au bien commun contribue à la croissance de chacun et a des retombées positives pour tous. En effet, en donnant à chacun les moyens d’accomplir son humanité, d’exprimer pleinement ses capacités, chacun devient en mesure de contribuer à la croissance de tous : en devenant maçon, médecin, enseignant, ou mécanicien, chacun produit des biens utiles à tous. Le bien commun nourrit le bien propre de tous.
La personne au cœur des institutions sociales
La perspective personnaliste allie ainsi l’homme et la communauté. Cependant, l’homme reste toujours au centre, il a toujours la primauté sur la communauté et ses institutions.
L’homme est au centre parce qu’il est la norme des institutions. Les institutions sont en effet ordonnées à l’homme et à son accomplissement. Par conséquent, l’évaluation de ces institutions est toujours référée à celle de leur influence sur l’homme. Cela signifie qu’une institution n’est pas bonne ou mauvaise en soi, mais seulement en tant qu’elle favorise ou empêche le développement des hommes.
Il importe donc que cette réflexion sur les institutions s’appuie sur une juste conception de la personne humaine et de son développement. « La question sociale est devenue radicalement une question anthropologique » dit Benoît XVI. Pour les chrétiens, « ce qui sert de trame et, d’une certaine manière, de guide… à toute la doctrine sociale de l’Eglise, c’est la juste conception de la personne humaine » (Jean-Paul II, Centesimus annus §11).
En vertu de ce fondement anthropologique personnaliste, la Doctrine sociale critique les formes de collectivismes. Jean-Paul II attribue ainsi l’échec des systèmes collectivistes à une « erreur anthropologique », celle qui tend à assujettir l’homme à la société, sans reconnaître la primauté de l’homme et sa juste autonomie. De même, la Doctrine sociale critique les formes du libéralisme qui sont liées à une conception de l’homme comme individu. À cet égard, on peut s’interroger sur l’erreur anthropologique présente au cœur de l’économie, lorsqu’elle est fondée sur l’hypothèse d’un individu égoïste et rationnel qui est motivé par la maximation de son bien-être.
L’homme est aussi au centre des institutions parce qu’il en est le fondement : C’est l’homme qui les institue. Elles relèvent donc de sa responsabilité et ne sont jamais pour lui une fatalité : il peut et doit les transformer lorsqu’elles ne sont pas au service de sa croissance. En outre, si elles contribuent à orienter ses choix et ses comportements, les institutions ne le déterminent jamais complètement. L’homme demeure donc responsable de sa liberté, même si celle-ci est en partie conditionnée ou limitée par la société dans laquelle il vit.
Le rapport de l’homme aux institutions
Examinons maintenant les rapports de l’homme aux institutions qu’il construit.
Rappelons d’abord que ces institutions sont nécessaires à l’homme. Parce que l’homme est une personne, son développement est conditionné par l’accès à un certain nombre de ressources : familiales, sociales, économiques,… Il y a donc un enjeu moral à ce que son environnement, les institutions dans lesquelles il vit, lui offrent effectivement toutes les ressources qui sont nécessaires à sa croissance personnelle et à son développement. Nous retrouvons là la notion de bien commun. S’assurer que la société contribue positivement au développement de ses membres, c’est un des enjeux de la morale sociale.
À l’inverse, toujours parce que l’homme est une personne, dépendant des institutions, il peut exister des structures sociales qui inclinent l’homme au péché, ou empêchent sa croissance. C’est ce que la Doctrine sociale appelle les « structures de péché ». Ces structures sont produites par les hommes, dont les péchés individuels se sédimentent, se cristallisent en des structures qui « deviennent source d’autres péchés » (Jean-Paul II, Sollicitudo rei socialis §36) en inclinant l’homme à des comportements contraires à sa croissance.
Ainsi, certains comportements problématiques peuvent devenir si répandus qu’ils deviennent partie d’une culture. Les consciences tendent alors à être aveuglées et à se conformer aux pratiques communes, sans en voir les enjeux moraux. Pour illustrer ce point, on peut évoquer les rapports désordonnés à la sexualité, à l’alcool, au travail, etc.
De même, la cupidité peut conduire à des formes économiques qui s’opposent à la croissance de l’homme. Ainsi, par exemple, les entreprises sont en partie déterminées par des acteurs extérieurs qui leur sont extérieurs. Les entreprises sont déterminées par leurs actionnaires dont la recherche du profit est parfois le seul critère. Elles sont aussi déterminées par leurs clients qui exacerbent le jeu d’une concurrence en recherchant des produits au moindre coût. Bien qu’ils n’en aient pas toujours pleinement conscience, les actionnaires comme les clients conduisent, et parfois même obligent, les entreprises à adopter des pratiques qui sont critiquables d’un point de vue moral. Par exemple, lorsqu’elles imposent des conditions de travail qui ne permettent pas la croissance de leurs employés : on peut évoquer par exemple le travail des enfants, la duré et la dureté du travail dans certains pays qui ont peu de législations sociales. Ou encore lorsque les méthodes de vente ou les produits vendus contribuent à aliéner leurs clients : crédits à la consommation, crédits subprimes, ou à encourager des comportements de consommation non respectueux des ressources naturelles…
Mettre en évidence ces structures de péché, ou les comportement dont les conséquences humaines, sociales, ou écologiques sont moralement problématiques, voilà un autre enjeu de la morale sociale, toujours lié à la conception de l’homme comme personne.
Conclusion : Morale sociale et salut
Nous avons vu comment la conception de l’homme comme personne, être de relation, conduit à une interrogation morale sur les réalités sociales. Nous avons souligné que tous les hommes pouvaient percevoir la nécessité d’une telle réflexion, en reconnaissant dans la réalité de leur propre existence, la nature personnelle de l’homme.
Les chrétiens reconnaissent ce caractère personnel de l’homme. C’est lui qui est au fondement de leur réflexion sur les réalités sociales, de la Doctrine sociale de l’Église. Cependant, pour le chrétien, cette réflexion a aussi une profondeur et une portée spirituelles. D’une part, le caractère personnel de l’homme trouve son fondement dans la Trinité et les Personnes divines à l’image desquelles il est créé. D’autre part, l’autre est le prochain, lui aussi image de Dieu. Les exigences liées aux conditions de son développement s’imposent avec d’autant plus de force.
Enfin, le fondement trinitaire de la réflexion sur la personne humaine porte en lui une autre conséquence, qui est cette fois de l’ordre de la finalité. Pour un chrétien, la morale sociale ne vise pas seulement à construire une société juste. Elle vise à créer les conditions de la construction d’une communauté humaine qui soit une communion, à l’image de la communion des Personnes divines, une communion qui soit le Corps du Christ. C’est ce que nous verrons la semaine prochaine en parlant de l’Eucharistie, ce mystère central de l’Église que nous allons célébrer dans quelques instants.
Je vous souhaite une bonne soirée.
Baudoin ROGER
Chapelain à la Cathédrale Notre Dame
Collège des Bernardins – Département Économie, Homme, Société