Foi et homosexualité : vers une plus grande unité

Paris Notre-Dame du 15 mars 2018

Le 7 mars, se déroulait à St-Sulpice (6e) la messe mensuelle organisée, à Paris, par l’association “Devenir un en Christ”. Objectif : permettre à toute personne concernée par l’homosexualité de cheminer dans sa foi, en Église.

© Marie-Christine Bertin

L’air est un brin rêveur, le regard direct, d’un bleu profond. Les mains tambourinent légèrement sur la table. Karl [1], 32 ans, catholique, raconte comment il s’est ouvert de son homosexualité à son entourage, il y a deux ans, lorsqu’un couple ami lui propose de devenir parrain de baptême de leur nouveau-né. « Je voulais simplement être en vérité. Je l’ai ensuite dit à ma sœur... C’était la première fois que je le formulais devant des proches », raconte-t-il. Un prêtre du diocèse, puis sa sœur, lui parlent, parmi d’autres associations, de Devenir un en Christ (DUEC, soutenue par la Fondation Notre Dame).

« Ce moment a été à la fois brutal et salvateur. D’un coup, je réconciliais deux parties de moi : ma vie extérieure et ce que j’étais intimement, que je déconnectais de mon quotidien – sans pour autant le nier. » Et d’enchaîner : « Je n’ai pas eu la tentation de rejeter ma foi ou l’Église. J’entends les questions de morale catholique tout en gardant un certain recul : je mets ma relation personnelle à Dieu et mon approfondissement de l’Évangile au premier plan. Tout n’est pas évident mais je ne me dis pas que l’Église ne me mérite pas. »

Ce soir-là, Karl participe à la messe mensuelle suivie d’un dîner, organisés par DUEC à St-Sulpice (6e). Présents : une cinquantaine de personnes, homosexuelles – plutôt des hommes aux états de vie très divers –, et leurs proches. Comme Claude, 88 ans, père de trois fils dont deux sont homosexuels, respectivement en couple depuis 18 ans et 25 ans. Il organise des sessions pour les parents concernés. « Sur le coup, c’est vrai, on était tristes, se rappelle-t-il. Mais depuis que je chemine avec eux et que je suis entré dans “leur” monde, beaucoup de clichés sont tombés. J’ai aussi réinterrogé ma foi, plus proche d’un Dieu d’amour miséricordieux. » Ici, on est bien. Simples habitués, non-croyants ou paroissiens parisiens, certains sont là ponctuellement. D’autres sont nouveaux : pas de questions intempestives, juste un accueil chaleureux et simple, jambon de pays et salade de pommes de terre à la clé.

Il y a aussi ceux qui font partie d’un des sept groupes de partage parisiens de l’association, qui se réunissent une fois par mois. « C’est un échange fraternel autour de la Parole, explique Sylvain, 45 ans, un des responsables. Notre association, c’est comme une petite cellule d’Église, avec qui nous sommes en lien permanent, sans être organiquement rattachée à elle. » « DUEC répond d’abord à la profonde quête spirituelle des personnes concernées par l’homosexualité, et notamment de celles qui ont parfois un rapport compliqué à l’Église », résume le P. Bernard-Marie Geffroy, vicaire à St-Leu-St-Gilles (1er), où DUEC organise un chapelet une fois par mois. Ce qui se vit là, c’est un chemin. La destination, c’est le Christ. » Une pédagogie qui n’est pas sans rappeler le principe, ancien en théologie morale, de la loi de gradualité, développé par le pape François dans son exhortation apostolique Amoris Lætitia : accompagner tout chrétien, quel que soit son état de vie, sur un chemin de croissance, dans la durée. Maëla, 42 ans, abonde : « Ici, j’ai simplement trouvé un lieu d’écoute et d’accueil, où questionner en vérité mon homosexualité, sans la nier, avec des repères spirituels solides. En est née une véritable paix. »

Laurence Faure

[1Le prénom a été changé.

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