Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe à Saint-Denys de la Chapelle
Dimanche 13 novembre 2022 - Saint-Denys de la Chapelle (18e)
– 33e dimanche Temps Ordinaire – Année C
- Ml 3,19-20 ; Ps 97,5-9 ; 2 Th 3,7-12 ; Lc 21, 5-19
D’après transcription
Quand on entend un récit comme celui de l’évangile de ce matin, on se dit qu’il y a toujours eu de ces moments extrêmement dramatiques et terrifiants dans l’histoire des hommes. Ce que Jésus décrit, c’est quelque chose qui arrive sans cesse dans notre histoire. Il y a deux mille ans, il s’agissait de l’annonce par Jésus de la destruction du temple de Jérusalem, et elle est intervenue, quelques années plus tard, après Jésus. Jésus savait que toute construction, toute entreprise, toute fabrication humaine durent un temps, mais même si c’est un temps long, un jour ou l’autre tout cela disparait. Quand nous regardons notre propre histoire, nous savons bien que, tout récemment, à Paris, il y a eu - et c’était un 13 novembre - des attentats terrifiants, en 2015. Quand nous regardons notre histoire, et votre curé tout à l’heure l’a redit, nous nous souvenons de ces deux années un peu terrifiantes d’épidémie qui nous ont vraiment inquiétés, parfois trop inquiétés, mais quand même cette épidémie qui avait des allures tout à fait mondiales, a été bouleversante, elle nous a fait souffrir, elle a entrainé des morts prématurés, et elle a rendu tout le monde méfiant d’être à côté les uns des autres.
Et puis encore toutes sortes d’autres événements, des événements qui concernent aussi l’Église qui nous peinent énormément. Et nous savons que ces événements troublent la vie de notre société, la vie de notre Église. Je veux parler bien sûr des abus et des révélations d’abus qui nous arrivent à la suite les uns des autres, depuis des années, et on a l’impression que ce n’est jamais fini. Voilà de ces événements terrifiants dont Jésus parlait et dont nous pouvons parler aujourd’hui encore, et qui bousculent la vie des hommes. Et parfois il y a des sortes de faux témoins qui nous disent : ça y est c’est la fin du monde c’est bientôt, nous sommes dans une catastrophe terrible. Jésus d’ailleurs l’annonce dans l’évangile que nous venons d’entendre. Il dit : certains viendront en mon nom - donc à cause même de notre propre religion – et ils vous annonceront que c’est la fin. Et Jésus dit : n’en croyez rien.
Alors je vous invite à retenir deux ou trois choses de l’évangile que nous venons d’entendre. La première chose, Jésus dit : ces événements sont terribles, bien sûr un jour ou l’autre il y aura la fin du monde mais ces évènements que nous vivons ce ne sera pas encore la fin. Ce n’est pas parce que nous vivons une histoire toujours dramatique - plus ou moins à certains moments de l’histoire, il y a des moments plus terribles que d’autres -, ce n’est pas parce que nous vivons des moments dramatiques que c’est la fin. Et surtout ce n’est pas parce que nous vivons des événements dramatiques que c’est la fin de l’amour de Dieu. Dieu a aimé ce monde et il l’aime encore. Et si ce monde continue de vivre, c’est avec la certitude de l’amour de Dieu. N’oublions jamais cela. Dieu nous a donné ce monde dans lequel nous vivons et il l’aime. Dieu nous a fait vivre, nous, au milieu de ce monde, parce qu’il nous aime. Et, comme croyants, nous ne pouvons jamais abandonner cette certitude qui nous habite. Ce ne sera pas la fin, dit Jésus, cela n’est surtout pas la fin de l’amour de Dieu. Ne l’oublions jamais.
Une autre chose que Jésus ajoute dans son discours que nous venons d’entendre : ces événements - y compris les persécutions contre les chrétiens qui ont eu lieu dès le début, et qui existent encore à travers le monde -, ce sera pour vous une occasion de témoignage. Dans l’histoire, les persécutions des chrétiens ont toujours été des occasions pour les chrétiens persécutés de donner le témoignage que leur vie vaut moins que l’amour de Dieu, que qu’ils persévèrent à dire je crois au Christ Vivant, je crois au Dieu d’amour, je crois à l’Esprit qui anime les hommes et les conduit vers le bien et vers le bonheur de Dieu, je crois en l’Église, je crois en la résurrection de la chair, parce qu’ils ont toujours été invités à le faire et, dans les moments dramatiques, dans les moments de persécution, dans les moments où on ne les écoute pas, ils n’ont jamais abandonné le désir de montrer leur foi et de faire grandir leur témoignage de foi. « Ce sera pour vous une occasion de témoignage. » Ce n’est pas parce que c’est difficile qu’il faut se taire sur notre foi, et c’est justement dans les situations les plus difficiles que nous sommes invités à dire notre foi et notre espérance, toujours ! N’attendons pas que tout aille bien pour dire « je suis chrétien », sachons que, quand c’est difficile, c’est vraiment le moment de dire « je suis chrétien. »
Et la dernière chose que Jésus dit dans l’évangile c’est : « par votre persévérance vous gagnerez la vie. » C’est par votre persévérance que vous avancez. Alors c’est cela que nous retenons à la fin de cet évangile. C’est la persévérance des croyants qui, peu à peu, fait que le monde peut continuer et que les hommes et les femmes qui sont affrontés aux difficultés ou aux souffrances, aux inquiétudes, aux angoisses, peuvent continuer d’avancer. Notre persévérance est bonne, non seulement pour nous, mais elle est bonne aussi pour ceux qui, dans le monde continuent de s’inquiéter et de s’affoler. Ne perdons pas courage, n’oublions pas que notre façon de vivre est un témoignage. N’oublions pas que les événements difficiles de l’histoire humaine, c’est à travers eux que l’amour de Dieu continue de se manifester et nous permet de vivre. Que le Seigneur se montre comme notre protecteur, comme celui qui nous aime, comme celui qui fait vivre le monde dans lequel nous sommes. Et pour aussi difficile qu’il soit, nous l’aimons parce que c’est Dieu qui le veut.
+Laurent Ulrich, archevêque de Paris