Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe de l’Épiphanie à Saint-Antoine de Padoue

Dimanche 8 janvier 2023 - Saint-Antoine de Padoue (15e)

– Épiphanie du Seigneur – Année A

- Is 60, 1-6 ; Ps 71 (72), 1-2, 7-8, 10-11, 12-13 ; Ep 3, 2-3a.5-6 ; Mt 2, 1-12
D’après transcription

Jérusalem, réjouis-toi, parce que tout le monde, le monde entier, un jour viendra vers toi. C’est ce que nous avons entendu dans la première lecture tirée du Livre d’Isaïe. C’est une promesse qui est faite à Jérusalem de devenir, un jour, le point de mire de l’humanité tout entière, qui va monter à la montagne de Jérusalem et se laisser guider par la lumière qui vient de Jérusalem.

Bien sûr, quand on sait ce qu’est Jérusalem dans le monde d’aujourd’hui, on voit qu’elle est plutôt le lieu d’une division que le lieu d’un rassemblement. Et pourtant elle attire parce que c’est la promesse que Dieu a faite. Il est clair que ce n’est pas l’humanité qui, d’elle-même, est capable de se réconcilier et de se réunir à Jérusalem. Ce n’est pas la ville que les hommes construisent avec tant de difficultés pour s’unir qui attire vers Jérusalem, c’est la lumière qui vient de Dieu, c’est la ville que Dieu cherche à construire pour l’humanité tout entière. C’est le désir de Dieu qui s’exprime ici depuis la prophétie d’Isaïe des siècles avant Jésus. De promesse, elle est confirmée par le message de la deuxième lecture de saint Paul aux Éphésiens : ce mystère, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, dit l’apôtre Paul. L’humanité tout entière est bien conviée à se réunir à l’initiative de Dieu, à devenir une vraie humanité en communion, en union profonde : c’est ce que Dieu cherche et promet.

Alors, nous comprenons peut-être bien la parole d’évangile que nous venons d’entendre, à la lumière de ce que je viens de dire. Nous voyons des hommes, venus de loin, qui cherchent Dieu. Ils sont à la recherche de Dieu, ils ont vu une lumière dans le ciel qui les guide, une étoile dans la nuit, disent-ils. Dans la nuit de l’humanité, dans la nuit du cœur des hommes, ils ont vu que, pourtant, il y avait une espérance, et ils se dirigent vers celui que l’étoile désigne. Ils ne sont pas membres de ce qu’on appelle le Peuple de Dieu. Ils ne sont pas membres du Peuple d’Israël. Mais ils viennent se recueillir, se prosterner devant le Seigneur, devant celui qui leur a fait signe. C’est quelque chose de tout à fait extraordinaire. Ils sont capables de faire fausse route. Ils vont d’abord voir celui qu’on leur a indiqué comme le roi local, ils vont voir Hérode. Ils se trompent, mais de bonne foi. Et ils vont lui demander leur chemin, ils croient que c’était peut-être lui mais ils se rendent compte que ce n’est pas lui. Et lui, Hérode, il a quelque chose de très particulier : nous savons les méfaits de sa vie, et qu’il va vouloir attenter à la vie du Sauveur. Et pourtant, c’est lui qui va faire recours à l’Écriture, à la Bible, c’est lui qui va aller consulter les grands prêtres et les chefs du peuple, et les scribes, ceux qui détiennent la connaissance de l’Écriture. Lui, le méchant, le mauvais, il est capable quand même de savoir où se trouve la vérité, où se trouve le bon chemin. Et c’est lui qui va indiquer, après avoir consulté, où il faut aller, à Bethléem. Et ensuite, les mages retrouvent le signe qui leur est apparu. Ils continuent de faire confiance à celui qui s’est manifesté à eux.

Voilà une grande leçon, une grande leçon pour nous tous, une grande leçon pour le peuple de Dieu. Le peuple de Dieu ne cesse pas de chercher la lumière. Le peuple de Dieu ne cesse pas de chercher où il pourrait trouver le bien, le bon, le vrai, pour sa vie. Il cherche toujours, alors, dans la lumière qui ne vient pas de lui, mais il croit que la lumière vient de Dieu. Le peuple de Dieu est capable aussi, comme les mages, de se tromper, de se tromper de route, de faire des erreurs sur le chemin, c’est bien clair. Nous le savons, nous sommes faillibles. C’est pour cela qu’au début de la messe nous avons demandé pardon. Nous ne sommes pas toujours ouverts à la lumière de Dieu. Nous ne sommes pas toujours désireux de chercher le bon chemin. Nous pouvons faire fausse route, nous aussi.

Mais voilà que nous avons un repère : c’est la Bible, c’est la Parole de Dieu ; c’est le fait que Dieu ne cesse pas de s’adresser à nous. Il y a tant de chrétiens, je l’espère, qui lisent la Parole de Dieu, peut-être chaque jour. Il y a tant de chrétiens qui s’y intéressent de près et qui la lisent avec d’autres, comme les grands prêtres, les scribes le font, et ils scrutent sans arrêt ce qui se trouve dans la Parole de Dieu pour essayer d’en faire leur règle de vie. Alors, nous sommes invités à cela, et à grandir dans la connaissance et dans l’amour de la Parole de Dieu. Le pape François nous invite, dans 15 jours, à célébrer le dimanche de la Parole de Dieu, comme chaque année depuis quelques années. Pour que nous n’oublions pas qu’elle est au centre de notre vie.

Le peuple de Dieu, aussi, est capable d’interroger des gens qui ne sont pas forcément des modèles de vie chrétienne, qui ne sont pas forcément attirés par la lumière qui vient de Dieu. Le peuple de Dieu est capable de se renseigner sur l’esprit du monde et de comprendre quelles sont les attentes, quelles sont les questions des hommes et des femmes d’aujourd’hui. Le peuple de Dieu est capable d’écouter la voix du monde qui cherche quand même qui est Dieu et où il se trouve dans notre vie.

C’est une grande démarche que nous essayons de faire au terme de ce temps de Noël. Demain, nous fêterons le baptême du Seigneur, et se refermera ce temps qui a commencé avec l’Avent, la célébration de Noël et les jours qui ont suivi, pour nous manifester vraiment comment le Seigneur nous cherche et comment il nous met sur la voie. Voilà ce temps de la révélation que Dieu fait à tous. Dieu cherche des hommes et des femmes partout dans le monde. Il cherche à les éclairer par sa Parole. Il cherche à les éclairer par leur propre recherche, par leur désir de se laisser toucher par Lui.

Que le Seigneur nous permette de faire cette démarche. Et, si je puis me permettre quelque chose qui nous touche plus ou moins, le pape nous a invités à une grande démarche synodale. Parfois, on se demande ce que c’est. L’année dernière, nous avons vécu un temps de préparation au grand synode qui se tiendra à Rome au mois d’octobre, puis au mois d’octobre de 2024. Et bien, c’est cette démarche-là que le pape souhaite pour l’Église : être capables d’être des vrais chercheurs ; être capables de reconnaître qu’il y a une lumière dans la vie des hommes qui vient du Seigneur, qui vient du Christ ; être capables de se mettre ensemble pour écouter la Parole de Dieu et chercher le chemin, être ensemble aussi pour écouter les besoins et les questions de nos frères et sœurs qui ne sont pas forcément croyants, ou qui ne cheminent pas dans la même religion que nous. Être capables de tout cela pour nous mettre en route vers Dieu et croire que Dieu ne cesse de nous faire signe chaque jour.

Voilà la bonne nouvelle pour ce temps, voilà l’invitation pour l’Église, soyons fidèles à la lumière de l’Évangile, partageons-la et offrons-la autour de nous.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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