Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe avec la communauté Chaldéenne de Marseille
Dimanche 24 septembre 2023 - Marseille (13)
Remerciements et Homélie
- Is 33,13-16 ; Ph 2,5-11 ; Mt 4,18-22
Je voudrais d’abord vous saluer tous, vous dire ma joie d’être au milieu de votre assemblée aujourd’hui, en ce dimanche tout spécial pour vous, tout spécial pour moi aussi, tout spécial pour l’Église à Marseille, après cette grande semaine des Rencontres méditerranéennes et la visite si belle, si importante, si remplie de joie du Pape François vendredi et samedi, avec cette belle messe hier au Stade Vélodrome.
Tout cela est source de beaucoup de joie pour chacun d’entre nous, pour vous tous, pour toute l’Église. Avant de prononcer ces quelques mots, je voudrais aussi, bien sûr, saluer de loin le Patriarche Sako et lui dire toute la joie que j’ai eue de le rencontrer il y a quelques mois à Bagdad : vous dire que je prie avec lui et pour lui dans la situation qu’il vit en ce moment, et dans la situation générale que vit l’Église chaldéenne. Il est très important pour moi de vous dire que nous vivons dans cette communion de prière, les uns avec les autres, sans cesse : nous sommes toujours attentifs les uns aux autres et j’espère que ma présence parmi vous est un signe de cela. J’espère que ces mots qui s’adressent d’abord à lui, le patriarche – et que Mgr Audo lui transmettra – sont des signes de cette attention fraternelle et mutuelle que nous nous devons les uns aux autres, dans la communion de l’Église, dans la communion des croyants, dans la communion que Dieu nous donne et nous permet de vivre tous les jours et que nous avons besoin de nous témoigner mutuellement par des mots et par l’attention amicale.
Je suis donc heureux de saluer Mgr Audo qui est avec nous. Nous avons des relations habituelles, et j’allais dire presque fréquentes ! A la Conférence des évêques de France nous l’avons reçu plusieurs fois - depuis que je suis évêque, et probablement avant - et c’est toujours une joie de le retrouver. De le retrouver au cours de cette semaine des Rencontres méditerranéennes, et de le retrouver ce matin, ayant tenu à rester et à vous rendre visite, et à être là à l’occasion de la mienne.
Je voudrais bien sûr aussi saluer votre curé qui m’a accueilli tout à l’heure par des mots chaleureux et généreux. Qu’il soit remercié et qu’en le remerciant ce soient vous tous qui soyez remerciés de cet accueil aimable, de cette reconnaissance que nous faisons mutuellement : que par la grâce de Dieu, en France vous avez un évêque qui a le soin de vous, avec le vicaire général, Mgr Gollnisch, un vicaire épiscopal, le Père Humeau, et puis les collaborateurs de l’Œuvre d’Orient qui sont là, Vincent, le diacre André qui a proclamé l’Évangile. Ce sont des collaborations fraternelles et quotidiennes, que je sais très fréquentes, qui font que vous vous sentez, je l’espère, non seulement aidés quand il est nécessaire mais tout simplement aimés comme vous êtes et pour vivre cette communion avec tous les membres de l’Église. Et, à ce titre, je voudrais saluer le Père Christophe, le curé latin, qui vous manifeste aussi régulièrement cette présence, cette fraternelle attention. Nous sommes ensemble dans la même Église au service de tous, les uns des autres, mais aussi de tous ceux qui sont nos voisins, ceux avec qui nous vivons, ceux pour qui nous prions sans cesse. Il y a tellement de besoins dans le monde d’aujourd’hui. Les plus proches besoins de nos frères que nous connaissons et aimons, les besoins de nos frères au milieu de qui nous habitons. Et puis les besoins de tous les peuples qui vivent des situations difficiles, dramatiques, tragiques, des situations de souffrance. Devant Mgr Audo, je ne peux pas oublier le tremblement de terre qui a eu lieu il y a quelques mois et qui a mis bien du monde en difficulté, qui a fait des victimes. Et il y a tellement d’autres situations de guerres, de guerres civiles, de guerres entre des peuples, d’oppressions, d’invasions, à travers les peuples de la Méditerranée et d’autres peuples. Il y a tellement de situations qui réclament notre prière, notre attention de tous les jours, que lorsque nous nous rassemblons pour la prière commune, pour l’action de grâce à Dieu dans l’eucharistie, nous ne pouvons oublier personne. Et donc nous sommes invités à être dans cette situation de prière, d’intercession pour le monde entier, avec toutes les intentions qui nous viennent jour après jour, qui ne sont pas tous les jours les mêmes mais que nous portons dans notre cœur devant Dieu, pour qu’il apaise la douleur des uns, qu’il calme les instincts guerriers des autres, qu’il apporte de la compassion à tous. Le Pape, avant-hier devant la stèle des marins péris en mer et des migrants disparus – plusieurs milliers ces dernières années dans la Méditerranée, a invoqué, devant les prêtres, les religieux, les religieuses, à Notre-Dame de la Garde, pour les chrétiens et pour tous, la capacité de se sentir proches. Il a dit la proximité, la compassion et la tendresse. Il a beaucoup médité cela.
C’est notre devoir, mais c’est aussi notre joie. Parce que nous savons que Dieu est rempli du désir de sa proximité : il nous a envoyé le Christ, rempli de la compassion à l’égard de tous les hommes et les femmes qui vivent dans le monde et qui affrontent des situations difficiles, et de son désir de tendresse à notre égard. Et il nous le manifeste de bien des façons, et nous lui rendons grâce durant l’eucharistie, comme nous venons de faire, par les paroles que nous disons, par les chants que nous lui offrons, par l’attention que nous lui portons. Nous lui rendons quelque chose de cette proximité qu’il a avec nous, de cette compassion qu’il nous adresse, de cette tendresse dont il nous entoure. Nous lui rendons un peu de tout ce qu’il nous donne en essayant de le partager avec tous nos frères et sœurs, les plus proches et les plus lointains.
Nous avons entendu la lecture tirée de la lettre de saint Paul aux Philippiens. Cet te lecture que nous avons entendue, est majeure, extrêmement importante : c’est un texte que nous entendons quelquefois, que presque nous devrions connaître par cœur, dire et chanter. Elle commence par cette phrase : ayez entre vous les sentiments qui sont dans le Christ. Et les sentiments qui sont dans le Christ, nous le comprenons, c’est sa grande humilité. Lui qui est Dieu, il a, d’une certaine façon, fait comme s’il ne l’était pas, il s’est laissé abaisser pour devenir comme un homme, pour devenir un homme au milieu de nous, pour prendre la place du plus humble et de celui qui se met au service de tous. Et c’est pourquoi Dieu l’a fait Seigneur, Dieu l’a exalté, Dieu l’a fait monter vers Lui, et il lui a donné le nom qui dépasse tout le monde : « Afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et aux enfers, et que toute langue proclame : "Jésus Christ est Seigneur" à la gloire de Dieu le Père. »
Nous essayons de vivre de cette façon, nous sommes invités à vivre de cette façon, en restant le plus humblement possible, le plus simplement possible, le plus fraternellement possible auprès des autres. En ne nous estimant jamais supérieurs aux autres, mais toujours à côté d’eux, comme eux, à leur service. C’est cela qui nous est montré quand nous essayons de contempler Jésus. Quand nous prenons le temps, dans la prière, de regarder le Christ sur la croix. Nous sommes faits pour nous souvenir qu’il a fait, j’allais dire « voyage » jusqu’à nous, pour nous entourer de la proximité, de la compassion et de la tendresse de Dieu. Il a voulu nous montrer cela, en vivant à notre côté et en se considérant comme pas plus qu’un homme, pas moins non plus. Jésus était homme comme nous, même s’il venait de Dieu, mais homme comme nous. Méritant le respect comme nous, qui ne lui a pas été donné, qui ne lui a pas été dû, et voilà pourquoi il a été battu et qu’il a été condamné à mort sur la croix. Jésus a vécu cela, et quand nous regardons la croix nous pouvons penser comme ces mots de la Lettre aux Philippiens que nous venons d’entendre, et nous nous disons : mais moi, est-ce que je saurais être humble comme Lui, simple comme Lui, serviteur, servante, comme Lui ? Que le Seigneur nous donne cela, c’est si profond, si beau.
Nous avons eu un bel exemple, hier, avec ce Pape François qui, dans sa simplicité, vient aussi au nom du Seigneur avec proximité, compassion et tendresse, et un désir d’humilité, pour s’approcher - lui qui est dans une position si haute et si importante - comme un homme au milieu des autres pour les aimer et pour leur montrer toute cette tendresse de Dieu.
Et enfin, dans l’évangile, nous avons vu que le Seigneur appelle les serviteurs avec Lui et autour de Lui. Jésus choisit des hommes ordinaires. Ils sont, tous les quatre, ces premiers choisis, à leur métier, ils sont en train de faire ce qu’ils ont à faire tous les jours, et l’appel que le Seigneur leur adresse leur fait quitter leurs filets, leur métier, pour chacun c’est comme cela. Pour certains, il y a besoin de quitter des activités pour se mettre au service de l’annonce de la Parole de Dieu. Et puis pour les deux suivants, on dit « les fils de Zébédée », ils quittèrent même leur père. Certains sont appelés aussi à partir au loin et à se mettre au service de ceux qui sont ailleurs : ils quittent leur famille, ils quittent leurs proches, ils quittent le pays qu’ils connaissent, et ils vont annoncer l’Évangile ailleurs.
Alors nous sommes invités - après avoir entendu l’appel de Paul aux Philippiens, en regardant le Christ devenir si humble - à prier ensemble pour qu’il y ait, parmi tous ceux qui cherchent à être d’humbles compagnons de Jésus, certains qui acceptent de répondre à une vocation particulière, à un service des autres particulier, pour l’annonce de l’Évangile. C’est une prière que nous faisons sans cesse dans l’Église : qu’il y ait des vocations particulières, qu’il y ait certains qui acceptent de se consacrer tout entier à l’annonce de l’Évangile aux autres. Et nous remercions déjà le Seigneur de mettre cela dans le cœur de jeunes, et parfois de moins jeunes, pour se laisser conduire par Lui, dans un service qu’ils ne connaissent pas toujours d’avance, mais auquel ils vont se soumettre parce qu’ils savent qu’ils sont des serviteurs du Seigneur, qu’ils sont d’humbles serviteurs des autres, qu’ils sont toujours en train de regarder le Christ qui s’est abaissé pour devenir homme au milieu de nous.
Que ce moment, que nous passons ensemble, soit un moment où nous prions les uns pour les autres, un moment où nous accueillons la Parole du Seigneur sur nous, un moment où nous regardons le Christ qui nous entoure de toute la tendresse de Dieu.
+Laurent Ulrich, archevêque de Paris