Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe et confirmations des adultes à Saint-Sulpice

Samedi 18 mai 2024 - Saint-Sulpice (6e)

 Veille de Pentecôte, à 21h00.
 Joël 3,1-5a ; Ps 103 ; Rm 8, 22-27 ; Jn 7, 37-39

Nous entendons ces paroles de l’Écriture, et elles nous parlent de ce que le Seigneur fait dans la vie de chacun d’entre nous, tout particulièrement en ce moment dans la vie de vous qui vous présentez pour recevoir la confirmation et, pour certains, l’eucharistie pour la première fois. Ce que nous entendons d’abord, c’est l’annonce du prophète Joël, celui qui d’abord connaît le monde tel qu’il est, un monde à feu et à sang, un monde troublant, un monde difficile, un monde où il faut tenir bon. Et dans ce monde où il faut tenir bon, ne pas être trop bousculé, stressé, certains reçoivent cette part de Dieu qui s’approche de nous, que nous appelons son Esprit. Le Seigneur distribue son Esprit sur toute chair, sur toute chair qui veut bien le recevoir : que l’on soit jeune, que l’on soit vieux, que l’on soit maître, que l’on soit serviteur ou servante, on peut recevoir ce don qui vient de Dieu et qui est capable d’investir le cœur des croyants et de faire de leur vie un témoignage de ce que Dieu a fait pour eux.

En effet, il a donné à chacun le goût de croire, le goût d’aimer, le goût d’espérer un monde nouveau, un monde qui sera transformé par lui. Il donne à ceux qui l’accueillent la capacité de parler et de montrer par leur vie que l’on peut toujours mettre sa confiance en lui pour tenir bon et droit au milieu d’un monde en détresse. N’est-ce pas ce que vous avez senti et fait ? N’est-ce pas ce que le Seigneur a déjà fait dans votre vie ? Quand vous avez trouvé qu’à l’intérieur de l’Église - je ne parle pas seulement du bâtiment, mais de la communauté - on trouvait la paix et le salut ? N’est-ce pas ce que vous avez compris quand, autour de vous, des voisins, des amis, des camarades, un conjoint, une conjointe, vous ont montré le chemin de la paix en Dieu, vous ont fait comprendre qu’avec le Seigneur, au milieu de ce monde bouleversant et bouleversé, on pouvait être des témoins de la paix qui vient de lui, de la joie qu’il donne, de l’espérance qu’il met dans le cœur ?

Vous avez raison de dire : « je suis fier et joyeux de ce qui m’est arrivé ! » Vous avez raison quand vous demandez – j’ai vu cela dans les lettres – que l’Église prie pour que vous gardiez le cœur ouvert - pour que nous gardions le cœur ouvert - le cœur fidèle à ce que je sais être maintenant la vérité (je cite de mémoire une lettre). Trouver, avoir trouvé la vérité, la vérité que l’apôtre Paul décrit aussi dans la lettre que nous venons d’entendre, « la création tout entière gémit comme en douleur d’enfantement et attend le salut ». Et nous aussi nous crions et nous attendons ce salut, nous aussi nous l’attendons. Nous ne sommes pas simplement des spectateurs d’un monde qui se transforme sous l’effet de l’amour de Dieu qui le renouvelle, mais nous sommes aussi des actifs et des acteurs, puisque Dieu nous donne de le faire et de le vivre. Ce que nous avons trouvé, ce que vous avez trouvé comme la vérité et la paix, vous savez bien que ce n’est pas simplement un énoncé, ce ne sont pas simplement des paroles, des leçons que l’on donne aux autres, ou que l’on reçoit. Ce que nous avons reçu comme vérité, c’est la possibilité de la rencontre avec un être vivant, avec le Christ vivant. C’est lui qui nous dit, et nous l’avons entendu dans l’Évangile à l’instant : « celui qui a soif qu’il vienne à moi et qu’il boive ». C’est cette personne-là qui est la vérité. C’est cette personne-là que vous voulez suivre. C’est lui qui, par son Esprit, vous a déjà fait signe. Quelle chance vous avez ! Quelle chance nous avons d’être ainsi appelés par celui qui avait appelé les disciples et les apôtres pour leur montrer sur cette terre, comment la paix s’installe dans les cœurs ! Il leur a montré comment le courage peut être donné pour garder l’espérance ; il leur a montré comment la foi en lui pouvait animer une charité nouvelle, une forme d’aimer tout homme, une forme d’aimer pour que les cœurs se laissent transformer.

Alors vous comprenez bien que cette vérité qui nous anime, nous avons envie de la vivre, de l’intégrer en nous-mêmes. Bien sûr nous ne pouvons plus voir et entendre Jésus comme s’il était là au milieu de nous, mais nous avons le témoignage des apôtres, nous avons leur parole, nous avons les évangiles pour entrer en contact avec lui. Nous avons la vie de notre Église qui est un signe, qui attire et qui appelle au milieu de ce monde. Nous avons les sacrements, ceux que vous recevez ce soir, ceux qui sont à la disposition des croyants pour se laisser entraîner à la suite du Christ et garder, avec la force qui vient de lui, le courage d’aller à la rencontre.
Nous avons aussi, c’est marquant et c’est probablement cela qui vous a attirés, la charité qui vient du Christ. C’est son amour de tous, son amour diffusé pour tous qui est le signe le plus profond.

Ainsi que l’exprimait un pape de l’Antiquité, au Ve siècle, un évêque de Rome qui s’appelle saint Léon, nous comprenons ce mouvement qui nous fait changer. Il disait à ce propos : « la vue du Seigneur Jésus a été remplacée par l’enseignement et par les sacrements ». Cet enseignement qu’il évoquait c’est l’Évangile, les paroles qui sont dans l’Écriture. Et sa remarque propose une façon de comprendre et de vivre ce que nous vivons ce soir. C’est le Christ lui-même que nous rencontrons en écoutant l’Écriture. C’est le Christ lui-même que nous rencontrons dans la prière, la prière individuelle, la prière communautaire, celle de l’Église. C’est le Christ que nous rencontrons dans la vie des sacrements que nous pratiquons fidèlement. C’est le Christ que nous rencontrons quand nous formons l’Église, l’Église rassemblée comme ce soir, mais aussi l’Église dispersée dans le monde où chacun des croyants sait qu’il est accompagné par les autres, et où chacun des croyants sait qu’il peut beaucoup pour accompagner les autres sur ce chemin.

Alors nous pouvons demander au Seigneur de nous ouvrir toujours le cœur. Et quelqu’un, parmi vous, l’a écrit comme ceci : « je comprends qu’être chrétien ce n’est pas présenter à Dieu ses petits soucis personnels, mais c’est devenir capable d’embrasser la peine du monde ». Mais j’ajoute bien sûr, aussi, d’embrasser la joie du Christ qui transforme ce monde.

Soyez fidèles à écouter la Parole de Dieu, soyez fidèles à vous rassembler. Tout cela c’est le Christ qui vit en chacun de nous, dans l’Église, dans ce monde qu’il aime et qu’il transforme.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

Homélies

Homélies