Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe d’admission des séminaristes à Saint-Germain-l’Auxerrois

Lundi 16 septembre 2024 - Saint-Germain-l’Auxerrois (1er)

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– 24e Semaine du Temps Ordinaire – Année B

- 1 Co 11, 17-26.33 ; Ps 39 (40), 7-8a, 8b-9, 10, 17 ; Lc 7, 1-10

Nous n’avons pas choisi les textes de la liturgie mais je crois qu’ils conviennent bien à la situation que nous vivons ce soir : nous sommes autour des séminaristes du Séminaire de Paris et cinq d’entre eux vont promettre de poursuivre leur formation dans l’objectif de servir l’Église un jour comme prêtres.

Le premier point, que vous avez bien entendu, concerne l’unité de l’Église. Cette unité de l’Église est évidemment un bien très précieux. Et c’est un bien que les ministres ont particulièrement le devoir de chercher à maintenir. Dans la lecture que nous venons de faire, tirée de saint Paul aux Corinthiens, nous voyons que l’unité de l’Église est mise en péril par le comportement de certains qui se rendent à l’action de grâce de l’Église, à l’eucharistie, en se tenant à l’écart les uns des autres. Comme s’ils étaient des groupes séparés et quasi autosuffisants, ne s’attendant pas les uns les autres pour partager ce que chacun a apporté et pour partager l’eucharistie. On peut imaginer que l’Église, au cours de son histoire, a vécu bien des divisions qui ne tenaient pas à ce type de comportement mais à des querelles de liturgie, à des querelles de doctrine, à des querelles de théologie, parfois très compliquées. L’apôtre ajoute : il est normal qu’il y ait des groupes à l’intérieur de l’Église, il est normal qu’il y ait même des divergences, mais, dit-il, c’est pour voir ceux qui se comportent bien à l’égard de ces différences et divergences. C’est-à-dire ceux qui savent qu’en effet, dans toute assemblée, il peut y avoir des sous-groupes et même des gens qui ne partagent pas les mêmes opinions, mais que l’unité dans l’Église est plus grave que cela, que l’unité dans l’Église mérite que l’on sache dépasser les divergences pour être témoins du Seigneur qui nous rassemble, qui fait notre unité, qui dépasse les divisions, qui invite à ne pas confondre les divergences et les divisions qui concernent parfois les opinions, et l’unité qui vient du Christ lui-même et que nous ne pouvons pas blesser.

Il est dans la nature des hommes de ne pas penser tous la même chose sur tous les sujets, mais il est dans la nature de l’Église et des disciples du Christ de faire des différences entre des opinions personnelles et le témoignage de la communion que le Christ permet de vivre et désire que nous vivions. C’est une exigence et, à ceux qui se préparent à devenir prêtres, elle s’impose et fait grandir leur foi. Nous qui sommes chargés de protéger cette unité dans l’Église, nous savons que notre foi a besoin sans cesse de grandir à l’épreuve des divisions possibles.

La deuxième chose concerne l’eucharistie elle-même. Évidemment les deux sujets de ce passage de la lettre de saint Paul ne sont pas différents l’un de l’autre et ils ont justement été maintenus dans le même passage que nous lisons ce soir. L’eucharistie est le signe même de l’unité que le Christ obtient par le don de lui-même, par le sacrifice de sa vie. Il s’est donné tout entier, jusqu’à ce qu’on lui prenne sa vie, jusqu’à la mort pour que soient réunis les enfants de Dieu dispersés, pour que se construise l’unité de son Corps, comme un témoignage donné à Dieu, son Père, et à nous tous, qu’il est venu pour nous réunir. L’eucharistie est ce signe. L’eucharistie est ce don. L’unité de l’Église et le salut de tous les hommes sont engagés dans le geste de l’eucharistie, dans le don que le Christ fait de sa vie, dans l’invitation qu’il nous fait de le suivre.

Que le Seigneur nous permette toujours de mettre au plus haut cette unité que l’eucharistie réalise. Qu’elle ne soit pas une célébration où les uns se retrouvent bien et les autres pas du tout. Que, toujours, le don du Christ soit premier, qu’il nous ouvre au désir de participer à son sacrifice pour que soient annoncés le salut offert à tous et l’unité qui en est l’image.

Et enfin, l’Évangile attire notre attention sur le fait que l’unité de l’Église n’est pas l’enfermement sur un groupe de croyants, mais que l’unité de l’Église vise toujours au témoignage qui est donné à l’extérieur. C’est un centurion de l’armée romaine qui a regardé Jésus, qui a entendu parler de lui et qui sait qu’il peut quelque chose pour la santé de son serviteur. Il sait que Jésus a des paroles qui font vivre. Et Jésus reconnaît en cet homme, extérieur au groupe de ses disciples, la foi qu’il attend.

Il appartient certes à l’Église tout entière, à ceux qui veulent la servir, à ses ministres, d’être exercés à découvrir dans le chemin de ceux qui ne font pas partie de l’Église, ou pas encore, le désir d’appartenir au Christ, le désir d’écouter sa parole, le désir de reconnaître en lui l’envoyé de Dieu qui vient sauver l’humanité tout entière. Être capable de dépasser les divisions qui sont éventuellement secondaires, recevoir du Christ l’unité, et avoir le cœur ouvert à tous ceux qui cheminent, qu’on ne voit pas du premier coup, dont nous avons besoin d’entendre la parole pour nous raviver dans la vie de foi, de charité et d’espérance.

Voilà un chemin pour vous cinq qui vous présentez à cet appel, pour tous les séminaristes, pour les formateurs qui les entourent, et pour toute l’Église.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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