Homélie de Mgr Laurent Ulrich – Messe du jour de Noël

Mercredi 25 décembre 2024 – Notre-Dame de Paris

Messe du jour télédiffusée en Eurovision.

Ouverture de la célébration eucharistique

Frères et sœurs, vous êtes extrêmement nombreux dans cette cathédrale Notre-Dame de Paris, réouverte au culte et à la visite depuis un peu plus de deux semaines. Et vous êtes aussi une foule immense devant vos écrans de télévision dans les pays européens qui suivent cette émission en Eurovision. Soyez tous bienvenus en ce jour de fête entre les fêtes, la Nativité du Seigneur Jésus, le Fils de Dieu venu sur notre terre, homme comme nous, Dieu autant que le Père et créateur de toute chose. Que vous soyez seuls chez vous, ou en famille ou avec des amis, soyez tous bienvenus et reliés les uns aux autres par le fil d’une prière généreuse, intense et reconnaissante pour l’amour de Dieu. Et commençons par reconnaître que nous n’aimons pas autant que nous sommes aimés, accueillons la miséricorde de Dieu.

Homélie de Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Paris

« À tous ceux qui l’ont reçu, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. » Voici ce qui se passe en ce saint jour de Noël ! Le Seigneur Jésus dont nous fêtons la naissance n’est pas venu comme en voyage pour se rendre compte de ce qui se passe ; ni comme un manager peut le faire en bon veilleur des affaires dont il a la charge ; ni comme un chef politique qui doit se faire connaître pour donner le gage de son autorité et de sa volonté d’agir pour le bien de tous ; ni comme un voyageur qui aime découvrir le monde, le monde magnifique de la nature, de la création et aussi des cultures qui le composent. Toutes ces façons de visiter le monde sont belles et utiles. Mais ce n’est pas le propos de Dieu qui envoie son fils bien aimé parmi nous.

Ce que Dieu veut nous est enseigné dès le début de l’évangile de saint Jean : le Verbe, la Parole même de Dieu, devenu homme parmi les hommes, est la vraie Lumière pour les hommes. Il se soumet à notre humanité, il connaît non seulement les conditions de la vie des hommes, il accepte même de ne pas être reconnu, accepté, aimé ; et pourtant, tout dans sa vie – ses gestes, ses paroles, ses affections, sa volonté –, toute sa vie est faite pour apporter la lumière, pour éclairer le chemin de la vie de chaque homme. Ce que Dieu veut, c’est que, par Jésus son Fils, dans sa naissance, dans sa vie auprès des siens, dans son amour, dans ses actions bonnes, dans ses souffrances, et finalement dans sa mort et sa résurrection, tout homme, toute femme, toute personne malade, handicapée, tout riche ou tout pauvre, puisse trouver des raisons d’espérer, de vivre, de se sentir aimé.

Peut-on trouver quelque chose de plus beau que cela ? Connaît-on dans le monde une intention plus grande et plus digne que celle-ci ?

Frères et sœurs qui m’écoutez, dans cette cathédrale ou par l’Eurovision, voici le véritable message de Noël : en lui, chacun, chacune peut trouver une profonde raison de se laisser aimer et d’aimer à son tour. Devenir comme Jésus des enfants de Dieu, des frères et des sœurs de Jésus-Christ, sentir que sa vie n’est jamais inutile. Le pape Benoît XVI l’avait dit d’une façon si forte et si simple, il y a bientôt vingt ans, lors de l’inauguration de son ministère de successeur de Pierre : « Chacun de nous est le fruit d’une pensée de Dieu. Chacun de nous est

voulu, chacun est aimé, chacun est nécessaire. » C’est vraiment le moment de nous rappeler cette pensée magistrale.

Devenir enfants de Dieu, cela ne veut pas dire que nous ne le sommes pas dès le début, cela signifie que nous le deviendrons de plus en plus, et de plus en plus visiblement, si nous l’acceptons, si nous le reconnaissons comme notre vraie nature, le vrai sens de notre vie !

Et pourtant, nous voyons tant de situations contraires à cela dans notre monde : des vies humaines sont bafouées par d’autres qui sont violentes et veulent s’imposer. Ce sont les faits de guerres et de dictatures, et nous pensons au peuple syrien, nous pensons à Gaza, au Liban, à l’Ukraine et à bien d’autres lieux de conflit, notre prière se fait implorante ; mais ce sont aussi des dominations économiques qui s’emparent de millions de vies en les possédant par des trafics infames et corrompus, par des exploitations et des esclavages pervers ; mais ce sont aussi des petites vies naissantes qui sont interrompues trop tôt, des vies accidentées, fragilisées et malades qui finissent de façon si précoce que l’on se demande si cela avait un sens ; ce sont des vies que l’on n’accompagne pas vraiment jusque dans leur dernière étape, comme si ces derniers instants étaient sans valeur, sans dignité. Pourtant toutes ces vies ont un sens, elles vont toutes vers la Lumière d’un amour qui ne s’éteint jamais ; elles sont toutes venues d’un amour initial et permanent, d’un amour d’une telle intensité qu’il est capable de se multiplier à l’infini, de prendre des formes si diverses, de susciter des attentions si variées.

Voyez cette cathédrale qui a mérité de tels soins depuis plus de cinq années pour être restaurée et rendue à sa beauté native ; voyez l’architecture, la lumière, la beauté de la pierre, les peintures, les sculptures, les tapisseries, et surtout le chant, la musique, la liturgie et votre prière, notre prière, qui rendent grâce au Seigneur !

Voyez cette prière qui monte de vos cœurs et de milliards d’autres dans le monde pour s’incarner en mille attentions, par exemple pour des femmes que l’on ne peut pas laisser attendre un enfant dans la solitude et l’angoisse, mais que l’on veut accueillir pour qu’elles puissent faire naître leur enfant avec joie. Voyez comment d’autres sont toujours prêts à partir là où une catastrophe naturelle les appelle, là où il faut organiser dans l’urgence des secours indispensables pour que l’on voie que chaque vie compte. Et nous pensons aux victimes du cyclone à Mayotte et à toutes les aides qui se mettent en place au prix de grandes difficultés.

Voyez combien d’hommes et de femmes se battent contre le développement des guerres, des famines et des injustices sociales : ils travaillent notamment pour l’éducation et pour les soins, c’est ainsi que l’on reconstruit l’avenir des peuples.

La plupart du temps, ce sont des actions modestes, à la mesure d’une vie humaine, comme l’ont été les actions mêmes du Fils de Dieu lorsqu’il s’est incarné dans ce petit coin de terre qu’est la Palestine, dans ce temps si délimité d’une vie d’une trentaine d’années dans un contexte historique bien précis … Le Fils de Dieu s’est contenté de cela pour entraîner à sa suite des milliards d’êtres humains à diffuser la Lumière dont il était le vrai porteur. À nous aussi de nous contenter de notre situation telle qu’elle est pour devenir de tels diffuseurs de cet amour infini, à travers tant d’œuvres bonnes que nous pouvons faire et qui nous conduisent à devenir de plus en plus des enfants de Dieu, aimés et aimants.

Mgr Laurent Ulrich,
archevêque de Paris

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