Intervention du cardinal André Vingt-Trois à la Session des nouveaux évêques à Rome
Rome – Jeudi 12 septembre 2013
Pèlerinage à la tombe de saint Pierre et congrès des nouveaux évêques.
Du 10 au 19 septembre 2013 se tenait à Rome le congrès annuel des nouveaux évêques organisé par la Congrégation des évêques et la Congrégation pour les Églises orientales. Le cardinal Vingt-Trois y a exposé une analyse largement appuyée sur sa pratique pastorale.
« La paroisse, le manque de prêtres et la participation des laïcs à la vie et à la mission de l’Église. »
Le titre très ambitieux de cet entretien m’a donné à penser que vous serez forcément déçus si vous avez imaginé que j’aurais la solution à cette question. Mais, en même temps, cela me donne plus de liberté pour accepter les limites d’une démarche forcément insuffisante. Je n’ai donc pas la solution du problème et je me propose simplement de vous partager quelques-unes des réflexions qui ont animé mon travail pastoral au cours des dix dernières années.
I. Quelques éléments de situation
Dans un premier temps, je vais situer les limites de mon expérience, qui n’a sans doute pas de portée universelle, en relevant des éléments de la situation que je connais et des conséquences qui en découlent. Je suis en Europe occidentale où le clergé diocésain tient une place relativement plus importante que dans d’autres régions.
1. Il n’y a pas de nombre de prêtres révélé ni de ratio optimal défini par la foi ou l’ecclésiologie. Si bien que, parler « du manque de prêtres », n’est rien de plus que se situer par rapport à une situation supposée optimale que nous aurions connue et qui aurait disparu. Mais en quoi un prêtre pour 500 habitants avec 80% de catholiques pratiquants (c’était la situation de la plupart de nos villages jusque dans les années 50) est-il une bonne mesure pour une population de 20.000 ou un million d’habitants avec 3% de catholiques pratiquants ? La première conséquence que j’en tire, c’est que je ne dois pas me laisser obnubiler par la question du nombre ni absolu, ni relatif. Je dois analyser les modèles de fonctionnement qui sous-tendent l’appréciation du nombre et formuler les questions qui en découlent pour la mission de l’Église.
2. Je dois tenir compte de la réalité sociologique d’un espace donné. Par exemple, en France, jusque dans les années 1950, plus de 60% de la population vivait en zone rurale et beaucoup de petits villages (entre 200 et 1.000 habitants) constituaient une sorte de société autarcique qu’il s’agisse de la vie économique (c’était à 80% une économie de subsistance auto suffisante) ou des relations familiales (le choix des époux se faisait dans un rayon de 10km). Au début de la première guerre mondiale des jeunes soldats français n’avaient jamais quitté leur canton. Le niveau culturel et la capacité d’initiative sociale étaient très faibles et l’autorité des notables importante. Par notables j’entends l’instituteur, le curé, le médecin, le châtelain ou le gros fermier. Aujourd’hui, les proportions se sont inversées : plus de 60% de français vivent en zone urbaine, les fonctions sociales (éducation, santé, etc.) sont pratiquement toutes professionnalisées et salariées, le développement des moyens de transport, la scolarisation et le travail ont entraîné une mobilité des populations. Le village autarcique n’existe plus et la gestion de la commune n’est plus réservée aux notables, mais répartie par des élections, etc.
3. Avec quelques variations, en France, depuis le Moyen-Âge jusqu’aux années 1950-1970, le recrutement du clergé diocésain séculier a été essentiellement un recrutement rural, dans des familles nombreuses et sans moyens financiers pour payer l’éducation de leurs enfants. Aujourd’hui, ces familles nombreuses, pauvres et sans moyens ont pratiquement disparu et l’enseignement est devenu gratuit et obligatoire. La promotion sociale a d’autres espérances que celle du XIXe siècle. La paroisse urbaine du XXIe siècle ne peut plus fonctionner sur les repères de la paroisse rurale du XIXe siècle.
Il faudrait évidemment affiner les trois notes que je viens de vous exposer. J’ai voulu vous les donner comme un exemple de questions que l’on peut et que l’on doit se poser avant de rêver à un nombre optimal de prêtres.
II. Les tentations des fausses solutions
Je soulignerai trois tentations qui ont un point commun : le souhait, plus ou moins conscient, de maintenir un mode de fonctionnement de l’Église en cherchant d’autres modes de recrutement d’un clergé qui assume l’action ecclésiale.
1. Internationaliser le recrutement en accueillant ou en cherchant des prêtres parmi les populations d’autres pays, notamment d’Afrique ou d’Amérique latine. C’est toujours possible, mais il ne faut pas se dissimuler les difficultés rencontrées pour constituer un presbyterium si la proportion des prêtres actifs venant d’une autre culture est trop forte. Il ne faut pas davantage se dissimuler l’effet démobilisateur sur des vocations sacerdotales éventuelles. Faut-il imaginer que le ministère de prêtre fait partie des métiers de seconde zone que l’on réserve à une immigration économique ?
2. Réduire les exigences du sacerdoce. Toute une idéologie s’est développée chez les chrétiens selon laquelle il suffirait d’ordonner les femmes et les hommes mariés pour solutionner le problème. On oublie souvent d’analyser pour quelle solution du problème on milite. La conviction de l’Église catholique dans son entier, et pas seulement l’Église latine, est que le ministère apostolique est lié à une conversion spirituelle qui se traduit par des états de vie : vie monastique ou, dans l’Église latine, célibat des prêtres. Les variations circonstancielles entre les traditions orientales et occidentales ne changent pas fondamentalement la conviction de fond. C’est plutôt un gage de qualité que l’Église latine ait formulé la vocation au célibat comme condition préalable au sacerdoce.
3. Réduire la dimension sacramentelle du ministère sacerdotal en ouvrant la responsabilité pastorale et la présidence de la communauté à tout chrétien formé en prévision de cette charge. Cette hypothèse repose sur l’opinion, plus ou moins explicite, que la légitimité ministérielle dépend d’une qualification théologique ou managériale que les universités catholiques pourraient largement répandre parmi les chrétiens. C’est une double réduction sacramentelle ; d’abord réduction de la qualité sacramentelle de l’ordination au ministère qui se trouve progressivement assimilé à une sorte d’envoi en mission fonctionnelle ; ensuite, réduction de la valeur sacramentelle des actes ministériels par effacement de la garantie théologale des actes posés : ce n’est plus Dieu qui agit dans les sacrements mais simplement une tradition humaine toujours discutable.
À ces trois tentations, on pourrait en ajouter beaucoup d’autres. Ce que je voulais souligner, c’est la logique de ces approches. Elles posent comme une priorité le maintien du mode de fonctionnement des communautés particulières, même quand celles-ci ne sont pas capables de produire les moyens de ce fonctionnement. On pourrait dire d’une certaine façon qu’elles sont l’expression chrétienne d’une nostalgie sociale : reconstituer le village du XIXe siècle ou du début du XXe siècle.
III. Des orientations pour l’action pastorale
Dans ce troisième temps de notre parcours, je voudrais vous partager quelques-unes des hypothèses qui m’ont servi de base pour l’action à entreprendre.
1. Priorité à la mission de l’Église. Ce point de départ suppose un véritable changement de perspective. Il s’agit de reconnaître que la mission de l’Église ne se limite pas à assurer les conditions de vie sacramentelle de la communauté chrétienne. Ou, plus exactement, il s’agit de replacer cette tâche dans le cadre plus vaste de la mission évangélisatrice de l’Église. Si mon premier horizon est le tissu des communautés existantes et leurs demandes spécifiques, la question du nombre et de l’affectation des prêtres est prédominante. Si mon premier horizon est comment assumer la mission confiée par Jésus à son Église d’annoncer la Bonne Nouvelle à toutes les nations, la question est davantage de savoir qui va annoncer cette Bonne Nouvelle. Pour dire les choses plus concrètement, même si c’est caricatural, l’attente de beaucoup de chrétiens est d’avoir la Messe à l’heure qui leur convient le plus près de chez eux. Ce que je souhaite c’est que l’Église devienne chaque jour plus fidèle à la mission d’annoncer Jésus-Christ à ceux qui ne le connaissent pas.
Cette différence de perspective a un effet très pratique dans la gestion des situations des prêtres. Par exemple, il me semble déterminant pour l’avenir de la mission d’investir les meilleures forces sacerdotales dans la formation des prêtres et des laïcs. Ce qui veut dire que sur un nombre réduit de nouveaux prêtres, je dois chaque année en appeler plusieurs à poursuivre leur qualification théologique et pédagogique : ils ne seront pas disponibles pour le service paroissial et leur absence fera vraiment défaut. Ce choix stratégique demande beaucoup de fermeté car personne n’est jamais prêt à sacrifier la consommation immédiate au profit de l’investissement pour l’avenir, dans l’Église comme dans l’économie.
Un autre exemple sera le choix d’envoyer des prêtres en priorité dans les secteurs éducatifs : aumôneries de collèges, de lycées, ou de facultés. Un autre exemple de préparer des prêtres pour des secteurs sensibles : hôpitaux, prisons ; ou encore le maintien d’une priorité missionnaire avec la fondation de la Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville pour servir dans les diocèses de la Région Ile de France, etc.
En résumé, je dois m’efforcer de scruter la situation pastorale pour détecter les points sensibles pour l’annonce de l’évangile : discerner les signes des temps. Je dois aussi développer un partage de cette lecture des signes des temps avec l’ensemble de mon diocèse pour permettre au plus grand nombre d’entrer dans cette perspective missionnaire. Ce partage du discernement se fait par le travail des conseils diocésains nombreux : conseil des vicaires généraux, conseils des vicaires épiscopaux, conseil des vicaires forains, session avec des responsables laïcs, visites pastorales de chaque paroisse, rencontre annuelle de l’archevêque avec les membres des conseils paroissiaux pour lancer la nouvelle année pastorale.
2. Évaluation des ressources. Quelles sont les ressources dont je dispose pour mener à bien la mission de l’Église ? Cette évaluation appelle un discernement pratique et théologique en même temps.
Prenons d’abord la dimension théologique. Avant tout, il faut renouveler sans cesse notre conviction que le principal moteur et le principal dynamisme de l’action ecclésiale, c’est Dieu lui-même, quelles que soient nos organisations. En tout nous sommes dépendants de la grâce de Dieu. Ma première ressource et ma seule véritable richesse, c’est la certitude que c’est Dieu qui veut et qui agit à travers la grâce des baptisés. Cette origine divine de la mission est particulièrement perceptible à travers les vocations contemplatives et la restauration du diaconat permanent. Au cours du XXe siècle, le développement de l’apostolat des laïcs, la promotion de l’action catholique et la réflexion du concile Vatican II sur le sacerdoce baptismal nous invitent à ne pas nous contenter de compter sur les « professionnels » de la mission (je veux désigner par là les clercs, religieux et religieuses et les laïcs militants), mais à appeler tout le peuple des baptisés à prendre sa juste part de la mission de l’Église. C’est un point capital dans l’appréciation des ressources. L’action des fidèles dans l’Église n’est pas une suppléance au ministère des prêtres trop peu nombreux. Inversement on pourrait dire que, historiquement, les prêtres ont exercé une suppléance par rapport à des fidèles qui n’avaient pas les moyens de prendre en charge la mission de l’Église. Nous avons très largement développé la richesse du thème du sacerdoce baptismal, mais trop souvent nous l’avons exploitée comme un moyen de confier à des laïcs les tâches pastorales de l’Église, pas assez son dynamisme missionnaire. L’Exhortation apostolique Christi Fideles Laici nous a rappelé opportunément que le terrain spécifique de la mission des laïcs est l’évangélisation et la sanctification des réalités temporelles dans lesquelles ils sont immergés par leur existence. À partir de cet approfondissement de la mission des baptisés, je suis orienté vers une évaluation des ressources qui ne se contente pas de s’appuyer sur les forces militantes de l’Église, les personnes les plus engagées dans les services d’Église. Je vise à mobiliser le plus possible de chrétiens pour la tâche ecclésiale.
Si je passe maintenant à des considérations plus pratiques, quelles sont les forces dont je dispose ? Pour les identifier, j’ai choisi de me reporter à la situation la plus constitutive de la communauté ecclésiale : la célébration eucharistique, et particulièrement la célébration dominicale. Je pars de la constatation que, dans notre société sécularisée, la participation, même irrégulière (de chaque semaine à une ou deux fois par mois), à la messe du dimanche est déjà un choix positif important pour manifester une certaine appartenance à l’Église. Dans un diocèse comme Paris, il est très difficile de fixer une évaluation très précise de cette participation. Après plusieurs comptages réalisés dans les paroisses, même de façon assez empirique, et d’après les nombre des cotisants au Denier de l’Église, nous pouvons estimer sérieusement que chaque dimanche nous réunissons entre 100.000 et 150.000 personnes, sans doute plus près de 150.000 que de 100.000. Sans parler de la grâce eucharistique, non-mesurable, mais décisive, nous sommes la seule organisation sociale qui dispose d’une telle force. Si nous pouvons espérer mobiliser, même une infime partie de cette énergie latente, nous pourrons faire beaucoup.
3. La mobilisation des fidèles. Depuis plus de trente ans, le diocèse de Paris a multiplié les initiatives pour concrétiser la participation des fidèles à la vie de l’Église : Marche de l’Évangile, synode diocésain, Paris-Toussaint 2004, etc. Je m’en tiendrai aux huit dernières années dont j’ai eu la responsabilité directe. Pour poursuivre l’effort entrepris par le cardinal Lustiger, il m’a semblé important de donner une perspective historique en relisant le chemin parcouru et en fixant des échéances futures dans le temps. C’est ce que j’ai essayé de mettre en œuvre avec un programme annoncé sur plusieurs années : « Paroisse en mission ». Mon principal objectif était de susciter et d’encourager des initiatives paroissiales pour permettre au plus grand nombre possible de chrétiens de prendre leur part de l’action de l’Église. Chemin faisant, j’ai appelé chaque paroisse à mettre réellement en œuvre les conseils prévus par le droit : conseil économique paroissial et conseil paroissial.
Chaque paroisse était invitée à faire une ou deux ou trois assemblées communautaires après la principale messe du dimanche sur un thème choisi pour chaque année : 1° année : l’Eucharistie, deuxième année : la famille et la jeunesse et troisième année : la solidarité. L’objectif était de familiariser les pratiquants habituels aux objectifs missionnaires de l’Église et de leur permettre d’y prendre part. Tout au long de ces trois années, les vicaires généraux ont travaillé avec les conseils paroissiaux pour les entraîner à exercer un discernement ensemble et prendre part aux décisions pour l’avenir. Nous sommes maintenant entrés dans une deuxième phase de deux ans pour lancer une mission diocésaine à l’occasion de l’Avent 2014 au cours de laquelle chaque paroisse enverra des fidèles annoncer Jésus-Christ dans leur quartier.
IV. Essai d’évaluation
1. Les points sensibles. Ce programme d’action fait ressortir quelques points sensibles auxquels il faut être très attentif. Je n’en relèverai que deux qui concernent notre réflexion de ce matin.
Le premier touche au changement de mentalité qui est nécessaire. Pour beaucoup de nos fidèles, l’Église est une institution qui fonctionne toute seule et dont ils sont les usagers avec plus ou moins d’implication personnelle. Le travail que j’ai proposé vise à sortir de cette problématique de consommation pour accéder progressivement à une attitude de coresponsabilité. Le même changement est aussi nécessaire pour les prêtres et les animateurs pastoraux. Le modèle sur lequel nous fonctionnons plus ou moins consciemment est celui d’une organisation et d’une autorité qui choisit et définit tous les aspects de l’action. Ce modèle est asphyxiant quand les cadres de l’Église, prêtres et animateurs pastoraux n’ont plus la capacité de production nécessaire. Alors l’action de l’Église se rétrécit à la mesure des forces dont on dispose. Le conseil paroissial ne doit pas être simplement une équipe d’exécution de décisions prises ailleurs et par d’autres, mais un véritable lieu de discernement. Pour que ce discernement ne soit pas une simple évaluation sociale de l’action, il faut mettre en œuvre une forte implication des membres des conseils paroissiaux dans la prière et le partage de la Parole de Dieu.
Le deuxième point sensible concerne le contenu du concept de nouvelle évangélisation. Trop souvent l’appel de Jean-Paul II et de Benoît XVI pour la nouvelle évangélisation a été interprété de manière réductrice, comme s’il s’agissait seulement de « récupérer » les chrétiens qui ont abandonné la pratique. En fait elle serait nouvelle parce qu’elle s’adresserait une deuxième ou une troisième fois aux mêmes personnes. Mais l’évangélisation à laquelle nous sommes appelés, dans nos sociétés multi-religieuses et multi-culturelles est, le plus souvent, une première évangélisation : annoncer l’évangile à des gens qui n’en ont aucune connaissance. « Paroisses en mission » ne devait donc pas être seulement un programme de « récupération », mais d’abord un programme de véritable mission. Il doit préparer une mission diocésaine.
2. L’évolution du ministère des prêtres. La mise en place des conseils paroissiaux et leur montée en puissance provoquent nécessairement une évolution dans l’exercice du ministère sacerdotal. Alors que le curé et ses collaborateurs étaient souvent la seule source des décisions et surtout des réflexions préparatoires aux décisions, le conseil paroissial introduit un nouvel organisme de travail. Bien entendu, la décision ultime reste de la responsabilité pastorale du curé, mais le discernement préalable et la mise en œuvre de l’exécution relève d’une coopération des fidèles du conseil paroissial. C’est une nouvelle expérience de l’autorité qui ne va pas de soi et qui suppose une souplesse et une collaboration réelles.
D’un autre côté, ce mode de fonctionnement invite le prêtre et les fidèles à mieux reconnaître et respecter la nature spécifique du ministère sacerdotal. C’est sans doute un recentrement sacramentel du ministère qui doit en résulter et qui doit se traduire dans l’organisation du temps et des investissements du prêtre. La célébration des sacrements, la préparation et la réalisation des actes d’enseignement et de formation, l’accompagnement spirituel vont prendre une place de plus en plus importante.
Il faut reconnaître que cette évolution est très lente et que certains parmi les plus jeunes prêtres ont du mal à mettre en œuvre cette ascèse qui consiste à recueillir et éclairer le discernement des fidèles plutôt qu’à le remplacer par leur propre discernement. Mais je suis convaincu que nous devons continuer dans cet effort de partage réel des responsabilités.
3. Au service d’un projet missionnaire. La motivation de cet effort et sa concrétisation ne peuvent se justifier et s’accepter positivement que si l’intention missionnaire en est clairement énoncée et perçue. Faute de quoi, ce ne serait qu’une réforme administrative qui aboutirait à dessécher le ministère des prêtres. La crédibilité du projet missionnaire ne vient pas seulement des intentions mais aussi des perspectives historiques qu’on lui donne. C’est pourquoi il me paraît très important d’avoir des projets qui couvrent plusieurs années et qui mettent en évidence une continuité dans le temps.
Conclusions
Tout ceci repose sur une conviction et une méthode. La conviction est que la vie d’une communauté chrétienne suppose un travail de réflexion et de discernement sur sa réalité, ses objectifs et les moyens mis en œuvre. Il s’agit d’un véritable travail qui demande du temps, de la réflexion, des décisions et des choix. La méthode doit apprendre peu à peu aux communautés paroissiales à se donner pour chaque année pastorale des objectifs et de décider des moyens à mobiliser. Leur apprendre à faire chaque année un bilan de l’année écoulée : ce qui a été réussi, ce qui a échoué, les causes de ces succès et de ces échecs, les leçons à en tirer. Nous sommes évidemment loin de la seule question de pallier le manque de prêtres pour continuer sans autre question à fonctionner comme on le faisait en d’autres temps et dans d’autres conditions.
J’ai bien conscience que ce que je viens de vous dire correspond à une situation particulière de grande métropole, mais je crois que mutatis mutandis cela peut éclairer aussi des situations moins typées et s’appliquer même dans des diocèses moins grands. J’en ai fait l’expérience dans le diocèse de Tours pendant six ans et j’ai pu constater que des paroisses rurales aussi peuvent fonctionner en appliquant les orientations du concile Vatican II.
Je vous remercie.
André cardinal VINGT-TROIS,
archevêque de Paris.