Intervention du cardinal André Vingt-Trois lors du colloque « en paroisse au service de l’Education »
« Il faut accompagner les familles dans leur aventure et leurs épreuves ; comment les aidons-nous dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives ? Comment les encourageons nous à entrer en contact régulier avec les autres familles de leur génération ? Comment essayons nous de partager les dons que nous avons reçus dans ce domaine ? » Telles étaient les questions posées par Mgr Vingt Trois le 3 décembre 2005, quelques semaines après avoir été nommé archevêque de Paris.
Poursuivant sa démarche en faveur de l’éducation des enfants et des jeunes, le cardinal Vingt Trois a réuni les acteurs chrétiens au service des familles à Paris, pour une journée de réflexion et d’échanges, le samedi 12 avril 2008 à l’Ecole Cathédrale.
Les quelques réflexions que je vais vous proposer s’inscrivent dans l’actualité de ces jours-ci. Si j’en crois les journaux et les informations, divers mouvements de jeunes lycéens se répandent dans les rues. Les lycéens expriment bien sûr quelque chose de ce qu’ils ressentent mais ils expriment aussi quelque chose de ce que ressent notre société. Ils permettent à une partie des adultes qui ont la charge de leur éducation d’exprimer en même temps leur propre malaise et leurs propres difficultés. Je pars de là car je pense que ces mouvements sporadiques qui se produisent à intervalles variables expriment quelque chose de plus profond que les difficultés concrètes qui les causent immédiatement.
Pour comprendre ces mouvements plus profonds, il faut nous rendre conscient de ce que j’appellerai un sentiment ambivalent qui traverse notre société : l’enfant y est à la fois l’objet absolu de tous les désirs et le péri redouté. Dans notre société, si nous prenons l’enfant comme un sujet symbolique (je ne parle pas de tel enfant en particulier), dans notre société l’enfant est à la fois celui que l’on désire et celui que l’on redoute. Quand on le désire, c’est à tout prix, puisqu’il doit satisfaire quelque chose de nos attentes, et si on le redoute c’est que la déception sera à la mesure du désir : on a tellement investi, dans notre tête sinon dans la réalité, dans l’image future de cet enfant que jamais ni aucun enfant réel, Pierre, Paul, Jacques ou Mathilde, ni aucun système éducatif, ni aucune famille, ni aucune réalisation ne permettront d’atteindre les buts que l’on s’est fixés. Cette relation ambivalente à l’enfant est donc tout à la fois l’objet d’un ressentiment profond, d’une déception et d’une révolte. De cela nous sommes témoins à travers la vie de notre société. Essayons de réfléchir un peu plus avant en nous demandant ce qui pourrait changer.
Nous sommes confrontés à deux questions : une question que l’on peut appeler la question de la transmission, et une autre que l’on peut appeler la question de l’intégration.
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