Interventions du cardinal André Vingt-Trois – Cérémonie interreligieuse en la cathédrale Notre-Dame de Paris pour les 228 victimes du vol AF 447 entre Rio de Janeiro et Paris
Notre-Dame de Paris – Mercredi 3 juin 2009
Au début de la célébration
Monsieur le Président de la République, Mesdames et Messieurs,
Le choc et la douleur nous rassemblent aujourd’hui autour des familles des victimes de l’accident qui a eu lieu il y a quelques jours, autour de leurs amis et du personnel de la compagnie Air France. Le choc et la douleur nous étreignent quand nous pensons à ces 228 personnes.
En ouvrant ce temps de recueillement et d’hommage à leur mémoire, je voudrais vous dire que chacune de nos religions qui sont représentées ici (les religions catholique, protestante, orthodoxe, juive et musulmane) ont accepté de se réunir pour exprimer leurs prières les unes à côté des autres et que nous accueillons avec cordialité et compassion celles et ceux qui ne partagent pas nos convictions, mais qui ont souhaité s’unir à notre démarche.
J’ai reçu aujourd’hui un message du Pape que je vous lis : « Informé de la catastrophe aérienne de l’avion qui reliait Rio de Janeiro à Paris, le Saint-Père exprime ses vives condoléances aux familles endeuillées et assure de sa profonde sympathie et de sa proximité spirituelle tous ceux que touche ce drame. Il recommande les défunts à la miséricorde divine priant le tout-puissant de les accueillir dans sa paix et dans sa lumière. Demandant à Dieu d’accorder soutien et réconfort à toutes les personnes durement éprouvées et souhaitant qu’elles puissent trouver autour d’elles l’aide dont elles ont besoin en ces heures douloureuses, le Pape accorde à toutes les personnes atteintes par cette tragédie la bénédiction apostolique. »
Faire mémoire, rendre hommage, évoquer simplement ceux dont l’absence est si douloureuse. Pour nous y introduire, je voudrais vous dire quelques phrases du Petit Prince : « Que les volcans soient éteints ou soient éveillés çà revient au même, dit le géographe. Ce qui compte pour nous c’est la montagne, elle ne change pas. Mais qu’est-ce que signifie éphémère ? répéta le Petit Prince qui de sa vie n’avait renoncé à une question une fois qu’il l’avait posée. Cela signifie : qui est menacé de disparition prochaine. Ma fleur est menacée de disparition prochaine ? Bien sûr ma fleur est éphémère, elle n’a que quatre épines pour se défendre contre le monde. Ce fut là son premier mouvement de regret. »
Nous sommes saisis par le regret de tout ce que nous aurions pu faire, de tout ce que nous n’avons pas fait. Et pourtant nous vivons pour faire mémoire et nous souvenir de ceux qui ont disparu. Maintenant, 228 bougies vont être apportées. Elles vont être le signe lumineux de leur présence dans leur absence.
Après que les 228 bougies aient été déposées
Au nom de tous les croyants, je te prie Dieu très saint.
Accueille leurs prières douloureuses. Accueille aussi les pensées attristées de ceux qui ne peuvent pas ou ne savent pas te prier.
Nous te confions les 228 passagers et membre d’équipage victimes de la catastrophe aérienne.
Ils sont tes enfants créés à ton image.
Tu veux qu’ils vivent pour toujours de ta propre vie.
Reçois-les dans ta lumière ; donne-leur ta plénitude.
Montre ta miséricorde aux parents et aux proches de ces victimes.
Ils ressentent l’injustice de la mort et de cette catastrophe.
Ils pleurent l’un des leurs. Ils sont blessés dans leur cœur.
Prends soin de leur douleur et de leur avenir.
Assiste tous ceux qui œuvrent au service du bien commun et de la paix.
Donne force et courage aux responsables et aux personnels des transports aériens dans l’exercice de leur tâche.
Exauce la prière et les efforts de tous les hommes de bonne volonté.
Toi qui nous sauves et qui nous aimes pour les siècles des siècles. Amen.
À la fin de la célébration
Au terme de ce temps de recueillement, je voudrais inviter chacun et chacune d’entre nous à emporter dans son cœur la présence, et dans sa pensée le souvenir ; d’abord de celles et de ceux, personnel d’Air France, qui continuent de voler. Après l’accident, il a fallu décoller à nouveau et affronter le risque.
Porter dans nos cœurs et dans notre pensée les époux, les parents, les enfants pour qui la présence de l’être cher ne sera plus jamais la même. Il restera vivant, elle restera vivante dans leur cœur, dans leurs pensées, dans leurs souvenirs, mais c’est une nouvelle présence qu’il faut apprendre et qu’il faut nourrir et supporter. A chacune et à chacun, nous tous qui sommes ici réunis ce soir, nous apportons le peu que nous avons, notre sympathie, notre soutien et notre amitié.