Ouverture des Jeux Olympiques de 1924 à Paris

Extraits d’articles de presse sur la cérémonie religieuse à Notre-Dame de Paris qui a précédée l’ouverture des Jeux olympiques le 5 juillet 1924.

« Ite, missa est »
La Messe Olympique a été célébrée ce matin

Sous la lumière douce que les vitraux de Notre-Dame peignaient de couleurs jolies, la foule des Olympiques se pressait ce matin dans l’église métropolitaine. En tenue de ville, (...) les athlètes du monde entendirent la messe dite en plain-chant cependant que le grand orgue rugissait les harmonies. (...)

Ce matin, Dieu fit un miracle. Il avait réuni dans son sanctuaire des protestants, des boudhistes, des sémites et des chrétiens orthodoxes. (...) [1]

(...) L’archevêque de Paris, après avoir souhaité la bienvenue aux représentants étrangers, a rappelé, dans son allocution, que saint Paul recommandait aux Corinthiens de participer aux jeux du stade, car la force physique, quand elle accompagne l’élévation morale, est agréable à Dieu. Puis Son Éminence a béni les Jeux de 1924.

Aux premiers rangs d’une affluence considérable, on remarquait :
Le baron Pierre de Coubertin, président du Comité international olympique, et Mme Pierre de Coubertin ; le comte Clary et les membres du Comité international.

Le Président de la République était représenté par un officier de sa Maison. [2] [3]


(...) Nous avons demandé et obtenu de Monseigneur l’Archevêque de Paris le résumé de l’allocution que Son Éminence a prononcée à Notre-Dame de Paris. (...)

Allocution de Monseigneur l’Archevêque de Paris

Messieurs,

En ce cadre incomparable, quel émouvant et splendide tableau vous nous offrez ! Dans ce stade mystique, toutes les âmes luttent de foi et de charité.

Soyez les bienvenus, Messieurs, en notre antique basilique de Notre-Dame de Paris. Soyez félicités d’avoir voulu inaugurer officiellement les Jeux Olympiques par un geste religieux : la prière.

Vous avez pensé, et avec raison, que Dieu devait avoir sa place dans votre institution – que j’appellerais volontiers la Chevalerie du Sport – et vous avez tenu à Lui consacrer ces solennités sportives, où se déploient la force, l’adresse, l’ingéniosité de l’homme. C’est bien, en effet, de Dieu que nous viennent tous ces dons qui sont la gloire et l’apanage de la nature humaine, – les dons du corps comme les dons de l’âme les forces physiques comme les forces spirituelles, aussi bien que les énergies surnaturelles elles-mêmes.

Que Dieu reçoive votre hommage ! Que sa bénédiction donne à vos jeux, à vos luttes, à vos concours toute la fécondité et tous les succès que vous en attendez pour l’union et a prospérité des nations représentées en votre stade de Colombes !

Au surplus, le but de vos jeux olympiques n’est pas seulement le culte exclusif du plaisir des jeux ou de la vigueur physique, mais aussi et surtout, le progrès moral. L’un et l’autre sont utiles à l’humanité, mais ils sont insuffisants à l’ennoblir, à l’élever, à assurer son plein développement normal, et à l’orienter vers le bien et vers sa fin suprême.

Il faut en effet voir plus loin que les délassements, plus loin que la culture des énergies corporelles, il faut que tout cela concoure à assurer la pratique de certaines vertus morales nécessaires.

Efforts, luttes, endurance, travail, jeux, exercices physiques, tout doit servir à fortifier l’âme contre ses propres faiblesses, à condition que l’âme sache et veuille s’élever vers Dieu, pour implorer sa grâce, comme vous le faites vous-mêmes en ce moment. Votre geste est vraiment digne des chevaliers et des athlètes de l’antiquité.

Vous venez également prier ici pour vos amis défunts. Depuis la dernière Olympiade, ils sont nombreux, hélas ! ceux dont la lutte ici-bas a pris fin et qui ont achevé leur course vers l’éternité. Vous voulez les aider, autant qu’il est en vous, à recevoir, s’ils ne les ont pas encore, la couronne et la palme dues aux vainqueurs.

C’est une sainte et salutaire pensée, dont je me plais à vous féliciter.

C’est un acte de bonne fraternité et un signe d’union, plus encore, un acte de charité qui vous honore et ne peut manquer de vous mériter le secours de Dieu. Le souvenir des Morts est une émulation, la prière pour les Morts est une bénédiction.

La VIIIe Olympiade bénéficiera de l’une de l’autre.

Enfin votre présence ici doit vous rappeler qu’il y a ici-bas un autre champ d’exercices. C’est la vie elle-même. Tous les hommes sont appelés à y lutter « Militia est vita hominis super terram » [4], et Dieu a promis une magnifique récompense au vainqueur, à celui qui aura fait jusqu’au bout, triompher le devoir sur la passion, la vertu sur le vice, le bien sur le mal.

L’apôtre Saint Paul s’intéressait aux jeux du stade et il en prit occasion pour y trouver des leçons morales : « Courez vous aussi, dit-il aux Corinthiens, pour gagner la couronne. » [« ] Sic currite ut comprehendatis » [5]. A défaut d’un commentaire qu’il serait trop long d’établir ici, qu’il me soit permis de vous conseiller de lire les lettres du grand Apôtre, et de vous en appliquer les magnifiques enseignements. Et saint Jean promet, au nom de Dieu, la couronne de vie au vainqueur : « Vincenti dabo coronam vitae [6]. » Ce sera la participation éternelle à la vie même de Dieu. « Ego merces tua magna nimis. » [7]

Quelles belles perspectives, Messieurs, par le champ actuel de vos activités !

Efforcez-vous de les atteindre, et Dieu veuille qu’elles se réalisent pour vous tous, afin qu’après avoir conquis les couronnes et les palmes de toutes les victoires sportives ici-bas, vous remportiez les palmes et les couronnes des suprêmes et éternelles victoires dans l’éternelle vie !

Source : Les amis des sports, octobre 1924 / Archives historiques du diocèse de Paris


Chronique diocésaine

Les athlètes des Jeux olympiques à Notre-Dame

(...) L’inauguration des jeux elle-même [eut lieu] l’après-midi de ce même jour. Sa Gr[andeur] Mgr Chaptal se rendit au stade de Colombes, pour représenter S[on] Éminence le cardinal Dubois, à l’ouverture des Jeux olympiques. Sa Grandeur y fut reçue par le comte Clary et prit place dans la tribune officielle. À la fin de la cérémonie Mgr l’Auxiliaire alla saluer le Président de la République, qui l’accueillit avec beaucoup de courtoisie.

Source : La semaine religieuse de Paris, samedi 12 juillet 1924 / Archives historiques du diocèse de Paris

[1Paris Soir, 6 juillet 1924, Archives historiques du diocèse de Paris

[2Le Figaro, dimanche 6 juillet 1924, Archives historiques du diocèse de Paris

[4« Vraiment, la vie de l’homme sur la terre est une corvée. » Jb 7, 1

[5« Alors, vous, courez de manière à l’emporter. » 1 Co 9, 24

[6« Au vainqueur je donnerai (...) la couronne de la vie » Ap 2, 7.10

[7« Je suis un bouclier pour toi. Ta récompense sera très grande. » Gn 15, 1

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