“Familiaris Consortio”, exhortation apostolique de Jean-Paul II sur la famille
Le 22 novembre 1981.
De nos jours, la préparation des jeunes au mariage et à la vie familiale est plus nécessaire que jamais. Dans certains pays, ce sont encore les familles qui, selon d’antiques usages, se réservent de transmettre aux jeunes les valeurs concernant la vie matrimoniale et familiale, par un système progressif d’éducation ou d’initiation. Mais les changements survenus au sein de presque toutes les sociétés modernes exigent que non seulement la famille, mais aussi la société et l’Église, soient engagées dans l’effort de préparation adéquate des jeunes aux responsabilités de leur avenir. Beaucoup de phénomènes négatifs que l’on déplore aujourd’hui dans la vie familiale viennent du fait que, dans les nouvelles situations, les jeunes ont perdu de vue la juste hiérarchie des valeurs et que, ne possédant plus de critères sûrs de comportement, ils ne savent plus comment affronter et résoudre les nouvelles difficultés. L’expérience enseigne pourtant que les jeunes bien préparés à la vie familiale réussissent en général mieux que les autres.
Cela vaut encore plus pour le mariage chrétien, dont l’influence s’étend sur la sainteté de tant d’hommes et de femmes. C’est pourquoi l’Église doit promouvoir des programmes meilleurs et plus intensifs de préparation au mariage, pour éliminer le plus possible les difficultés dans lesquelles se débattent tant de couples, et plus encore pour conduire positivement les mariages à la réussite et à la pleine maturité.
La préparation au mariage est à considérer et à réaliser comme un processus graduel et continu. Elle comporte en effet trois principales étapes : préparation éloignée, prochaine et immédiate.
La préparation éloignée commence dès l’enfance, selon la sage pédagogie familiale qui vise à conduire les enfants à se découvrir eux-mêmes comme doués d’une psychologie à la fois riche et complexe, et d’une personnalité particulière, avec ses propres forces et aussi ses faiblesses. C’est la période durant laquelle on inculque peu à peu l’estime pour toute valeur humaine authentique, dans les rapports interpersonnels comme dans les rapports sociaux, avec ce que cela comprend pour la formation du caractère, pour la maîtrise de soi et l’usage correct de ses propres inclinations, pour la manière de considérer et de rencontrer les personnes de l’autre sexe, et ainsi de suite. En outre, spécialement pour les chrétiens, est requise une solide formation spirituelle et catéchétique, qui sache montrer dans le mariage une véritable vocation et mission, sans exclure la possibilité du don total de soi à Dieu dans la vocation sacerdotale ou religieuse.
Sur cette base s’appuiera ensuite - et c’est là une œuvre de longue haleine - la préparation prochaine : à partir de l’âge opportun et avec une catéchèse adéquate, un peu comme pour le cheminement catéchuménal, elle comporte une préparation plus spécifique aux sacrements, comme si on les redécouvrait. Cette catéchèse rénovée de tous ceux qui se préparent au mariage chrétien est tout à fait nécessaire, afin que le sacrement soit célébré et vécu avec les dispositions morales et spirituelles qui conviennent. La formation religieuse des fiancés devra être complétée, au moment voulu et selon les diverses exigences concrètes, par une préparation à la vie à deux : une telle préparation, en présentant le mariage comme un rapport interpersonnel de l’homme et de la femme à développer de façon continuelle, devra les encourager à approfondir les problèmes de la sexualité conjugale et de la paternité responsable, avec les connaissances essentielles qui leur sont connexes dans l’ordre biologique et médical, et les amener à se familiariser avec de bonnes méthodes d’éducation des enfants, en favorisant l’acquisition des éléments de base pour une conduite ordonnée de la famille (travail stable, disponibilité financière suffisante, sage administration, notion d’économie familiale, etc.).
Enfin, on ne devra pas négliger la préparation à l’apostolat familial, à la fraternité et à la collaboration avec les autres familles, à l’insertion active dans des groupes, associations, mouvements et initiatives ayant pour finalité le bien humain et chrétien de la famille.
La préparation immédiate à la célébration du sacrement de mariage doit avoir lieu dans les derniers mois et notamment dans les dernières semaines qui précèdent les noces de manière à donner une nouvelle signification, un nouveau contenu et un nouvelle forme à ce qu’on appelle l’enquête pré-matrimoniale requise par le droit canonique. Nécessaire dans tous les cas, une telle préparation s’impose avec plus d’urgence pour les fiancés qui présenteraient encore des déficiences et des difficultés en matière de doctrine et de pratique chrétienne.
Parmi les éléments à communiquer dans ce cheminement de foi, analogue au catéchuménat, il doit y avoir aussi une connaissance approfondie du mystère du Christ et de l’Eglise, de ce que signifient la grâce et la responsabilité inhérentes au mariage chrétien, sans compter la préparation à prendre une part active et consciente aux rites de la liturgie nuptiale.
La famille chrétienne et toute la communauté ecclésiale doivent se sentir engagées dans les diverses phases de la préparation au mariage, dont nous avons tracé seulement les grandes lignes. Il est souhaitable que les Conférences épiscopales, étant intéressées aux initiatives qui conviennent pour aider les futurs époux à être plus conscients du sérieux de leur choix et les pasteurs d’âmes à s’assurer qu’ils ont les dispositions voulues, s’emploient à ce que soit promulgué un Directoire pour la pastorale de la famille. Dans celui-ci, ils devront fixer, avant tout, les éléments indispensables du contenu, de la durée et de la méthode des "cours de préparation", en équilibrant entre eux les divers aspects - doctrinaux, pédagogiques, légaux et médicaux qui concernent le mariage, et en les organisant de manière à permettre à ceux qui se préparent au mariage, non seulement de bénéficier d’un approfondissement intellectuel, mais de se sentir poussés à s’insérer de façon active dans la communauté ecclésiale.
Bien que le caractère nécessaire et obligatoire de la préparation immédiate au mariage ne doive pas être sous-estimé - cela arriverait si l’on en dispensait facilement -, une telle préparation doit toujours être proposée et réalisée de manière que son omission éventuelle ne constitue pas un empêchement à la célébration des noces.