Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe d’action de grâce à l’occasion des 800 ans de la paroisse Saint-Eustache et bénédiction de la façade restaurée

Dimanche 4 février 2024 - Saint-Eustache (1er)

 Voir l’album-photos de la célébration et de la bénédiction de la façade rénovée.

– 5e dimanche du Temps Ordinaire – Année B

- Jb 7,1-4.6-7 ; Ps 146 ; 1 Co 9,16-19.22-23 ; Mc 1, 29-39

Aussitôt sorti de la synagogue, Jésus vint à la maison. Dans le passage qui précède celui que nous venons d’entendre, que nous avons entendu dimanche dernier, Jésus était en effet dans la synagogue où on se trouve pour entendre l’enseignement, entendre la Parole de Dieu, entendre la Loi, la Torah, écouter, se laisser enseigner. Et voilà que l’enseignement qu’il donne est connu et compris par ses auditeurs comme un enseignement nouveau donné avec autorité. La preuve de cette autorité, c’est qu’il guérit l’un de ceux qui étaient, dans la synagogue, sous une emprise diabolique : il expulse ce démon de l’homme qui était là, devant lui. Dans la synagogue, Jésus enseigne, partage la Parole de Dieu et, joignant le geste à la parole, apporte la guérison que la Parole de Dieu est capable de donner. Mais, sortant de la synagogue, Jésus entre dans la maison de l’un de ses premiers appelés, Simon, qui est aussi celle de son frère André et probablement celle où se trouve la belle-mère de Simon. Ils sont avec Jacques et Jean, les premiers appelés, les premiers disciples, les premiers apôtres, les premiers envoyés. Voilà que cette maison, qui semblerait être le lieu du retour chez soi, le lieu du repos, le lieu de la rencontre familiale, devient lieu de guérison elle aussi, lieu où l’on fait du bien. Tout en se parlant les uns les autres, en s’écoutant les uns les autres, en partageant la joie de la vie d’une famille et de son entourage, on ne cesse pas, Jésus ne cesse pas, de faire du bien à ceux qui sont là, à commencer par la maîtresse de maison, à commencer par celle qui est là pour accueillir. Maison où l’on fait du bien les uns aux autres, maison où l’on se sert les uns les autres, où l’on se rend service, voilà que cette maison est en train de devenir aussi : maison d’Église : maison d’Église où l’on écoute le Seigneur, maison d’Église où l’on sert au nom du Seigneur, maison d’Église où l’on est attentif les uns aux autres. Dès les débuts de l’histoire de l’Église, dès les premières communautés, l’Église était d’abord une maison, une maison particulière, une maison où l’on pouvait se retrouver entre frères et sœurs, capables d’écouter la Parole du Seigneur et de faire du bien. De telle sorte que, dès que cessent, plusieurs siècles après, les persécutions, dès que cesse le moment de la clandestinité pour les communautés chrétiennes, ces maisons préfigurent et sont capables de faire éclore des églises. Les églises qui vont grandir sur notre terre pour être des signes de la Parole de Dieu, des signes de l’action bienveillante de Dieu, de la guérison, de l’accueil, de la fraternité. Maison d’Église, maison du Bon Dieu, maison des hommes qui savent trouver là le repos, la parole qui console et qui appelle, la réconciliation, le bienfait, la fraternité sous le regard de Dieu, sous le regard de Celui qui rassemble, sous le regard du Christ.

Voilà cette maison dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Elle n’a évidemment plus l’allure d’une maison de famille toute simple, comme elle avait pu l’être aux premiers siècles en Galilée. Elle a pris des dimensions plus importantes bien sûr, mais elle est faite pour rester la maison du repos, la maison de la prière, la maison de la Parole de Dieu, la maison du bienfait partagé, la maison de l’accueil. C’est ce qui est arrivé dans cette paroisse Saint-Eustache depuis 800 ans, ici, au cœur de cette ville et à quelques pas de Notre-Dame qui la précède de quelques dizaines d’années. Nous sommes là dans des centres si importants de la vie d’une ville, dans la vie d’un peuple. Maison qui accueille, maison où se dit la Parole de Dieu, maison où se rencontre le Seigneur, maison où se réalisent le bienfait et la bienveillance qu’il réserve à tous.

Le soir venu on se presse à la porte, on vient vers Jésus, la maison est donc devenue déjà un signe pour beaucoup, la maison où il se trouve. Mais c’est à la porte qu’il accueille, c’est à la porte qu’on lui amène des malades, c’est à la porte qu’il continue de faire du bien.

En cette maison dans laquelle nous sommes, la porte elle aussi a une immense importance. Dans la grande façade occidentale rénovée, la porte n’a pas l’allure de celle d’une petite maison. Elle a pris des proportions bien autres, mais elle est toujours cette façade qui fait signe, cette porte majestueuse qui s’ouvre, cette porte devant laquelle on est capable d’accueillir ceux qui, tout à l’heure, nous ont accueillis. Elle est un signe fort au milieu de notre ville, elle est un signe fort de la fraternité, du bienfait, de la miséricorde et de l’écoute que le Seigneur réserve à chacun.

Nous sommes nombreux dans cette église ce matin, au point que beaucoup sont debout. C’est le signe que l’église est toujours trop petite mais que le cœur de Jésus n’est jamais trop petit. Il y a de la place pour tous dans son cœur, c’est toujours lui qui sert, c’est toujours lui qui enseigne, c’est toujours lui qui donne la Parole, c’est toujours lui qui invite. La maison, la porte, il nous est proposé à travers ces deux images, cette double parabole, de le demeurer nous-mêmes, d’être capables d’être accueillants, d’être capables d’être ouverts sans cesse aux besoins de nos frères et sœurs, parce que nous écoutons ici la Parole qui nous demande de le faire, parce que nous écoutons Celui dont le cœur est si grand ouvert à tous.

Comment fait-il ? Il ressort par la porte, il va se mettre à l’écart, dans la nuit, pour prier, pour trouver dans la relation avec son Père la force d’être ce qu’il demande à tous ses frères de devenir avec lui. Il ressort par la porte pour rencontrer, au cœur de la nuit et du désert, son Père qui lui parle et qu’il écoute. Mais aussi, le dit-il à ses compagnons, Simon, André, Jacques, Jean, pour aller ailleurs, pour ne jamais cesser d’être en chemin à la rencontre de tous.

Alors nous entendons la leçon de cet évangile : être des maisons accueillantes, être des portes devant lesquelles on trouve la bienveillance et la miséricorde, et être aussi capables de rentrer en nous-mêmes pour trouver la voie de celui qui nous aime et qui aime tout homme, toute femme, et fait grandir au cœur de l’humanité une source d’espérance.

Que le Seigneur lui-même donne à chacun et à chacune d’entre nous qui sommes dans cette église, qui sommes aussi réunis par les moyens de la télévision KTO, de pouvoir être nourris par cette parole qui accueille et guérit.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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