Le renouveau liturgique et la disposition des églises
"Le renouveau liturgique et la disposition des églises" est un texte élaboré par la Commission Episcopale de Liturgie le 20 juillet 1965. C’est un document d’aide à la compréhension des préconisations de la Constitution sur la sainte Liturgie.
Introduction
A. La réforme liturgique et le lieu du culte
Il est bien évident que la réforme liturgique ne peut se limiter à quelques changements dans la teneur des textes lus par les ministres, ou dans les gestes des célébrants. Elle a pour but premier de faciliter la participation active, consciente et communautaire des fidèles à l’action liturgique. Elle transforme la relation entre le célébrant et les fidèles. Elle répartit de façon nouvelle pour nous, quoique profondément traditionnelle, les fonctions respectives du célébrant, des ministres, de la schola, du peuple.
Il s’ensuit qu’elle appelle une disposition des lieux de la célébration assez différente de ce qu’elle était jusqu’ici. Lorsqu’il s’agit de construire des églises nouvelles, il n’y a pas à hésiter : nous cherchons à réaliser des sanctuaires parfaitement adaptés à leurs diverses fonctions, telles que la réforme liturgique les définit ou les oriente, et nous éviterons de reproduire servilement les formes du passé.
La question est au contraire très complexe lorsqu’il s’agit d’églises existantes, plus ou moins anciennes et plus ou moins belles.
Ici, il ne faut pas vouloir faire du neuf à tout prix, "adapter" coûte que coûte des sanctuaires à des fonctions auxquelles leurs constructeurs n’avaient jamais songé.
Si pénible que cela puisse être pour un pasteur désireux de profiter aussitôt et pleinement, pour lui-même et pour son peuple, de la réforme voulue par le Concile, il faut être capable d’attendre, de réfléchir, de prendre conseil. L’impatience, même apparemment justifiée par le zèle pastoral, quand ce n’est pas par le désir d’être à la page, peut avoir des conséquences irréparables.
Ainsi l’aménagement d’une église qui est, dans certains cas, essentiel pour réaliser une liturgie vivante, s’effectuera dans les meilleures conditions.
B. Primauté du point de vue pastoral
Selon l’Instruction Inter OEcumenici (n° 5) « il est nécessaire en premier lieu que tous comprennent bien que le propos de la Constitution liturgique du Concile n’est pas seulement de changer les formes et les textes liturgiques (ajoutons et la disposition matérielle des églises), mais plutôt de susciter une formation des fidèles et une pratique pastorale qui envisagent la liturgie comme leur sommet et leur source. Elle donne donc la primauté aux changements de mentalité, obtenus par l’éducation pastorale, sur les transformations extérieures.
On risque en effet de déconcerter, d’attrister, voire de scandaliser une communauté, si on la met en face du fait accompli sans s’être soucié de l’éduquer et de la préparer. Les modifications judicieuses et soigneusement étudiées du cadre liturgique seront beaucoup plus facilement acceptées si l’on a pris soin d’en montrer le but et l’esprit. Ce qui se fera par une catéchèse patiente et encourageante du mystère liturgique, et par une célébration plus digne et plus vivante.
Alors les fidèles ne se contenteront pas d’accepter, de bon ou de mauvais gré, les transformations qu’on leur impose ils les désireront, ils les comprendront profondément, et ils s’en réjouiront.
Cette préparation psychologique, cette adaptation des esprits et des cœurs s’accomplira d’autant plus facilement qu’on aura informé et même consulté la communauté sur les changements à apporter dans son église, au moins en prenant l’avis de ses membres les plus compétents.
Là aussi, « les pasteurs doivent reconnaître et promouvoir la responsabilité des laïcs dans l’Église, ayant volontiers recours à la prudence de leurs conseils, leur remettant avec confiance des charges au service de l’Église, leur laissant la liberté et la marge d’action, stimulant même leur courage pour entreprendre de leur propre mouvement » (Lumen gentium, n° 37).
Principes d’aménagement d’une église existante
I . Fidélité aux principes de la Constitution De sacra Liturgia
« Dans la construction des édifices sacrés, on veillera soigneusement à ce que ceux-ci se prêtent à l’accomplissement des actions liturgiques et favorisent la participation active des fidèles (art. 124). Les Ordinaires veilleront avec zèle à ce que le mobilier sacré ou les oeuvres de prix, en tant qu’ornements de la maison de Dieu, ne soient pas aliénés ou détruits " (art. 126).
" Les Évêques par eux-mêmes ou par des prêtres capables, doués de compétence et d’amour de l’art, s’occuperont des artistes pour les imprégner de l’esprit de l’art sacré et de la liturgie " (art. 127).
Il. Respecter la propriété d’autrui
1 ‑ Le curé n’est pas propriétaire de son église, ni du mobilier de celle-ci. Il n’en est que le gardien et le gestionnaire. Les édifices et leur mobilier peuvent appartenir à l’État et parfois être remis à la garde du Service des Monuments historiques ; ils appartiennent aux communes dans la plupart des cas ou à différentes associations (associations diocésaines, congrégations, etc.) ; en tout cas, ils appartiennent, au moins moralement, à la communauté paroissiale. En outre, ils relèvent toujours de l’autorité diocésaine. Le curé ou l’administrateur ne sont donc nullement libres de les modifier à leur gré ; encore moins de les aliéner, fût ce pour se procurer des ressources (parfois promises par des trafiquants sans scrupules, proposant des sommes dérisoires ou des objets modernes sans valeur comparable) : cf. C. I. C., c. 1530, 1531, 1532, 1534, 1535, 2347.
2 ‑ Outre ces exigences qui ressortissent à la justice la plus élémentaire, le curé doit se rappeler en tout cas que l’église et son mobilier sont au service de la communauté ; que celle-ci existait avant son arrivée et subsistera après son départ ; qu’il n’a donc pas le droit d’agir comme s’il en était le maître unique et définitif.
3 ‑ Des dispositions architecturales ou mobilières, des objets de culte ou de piété, des éléments décoratifs qui nous semblent démodés, peu accordés à l’esprit de la réforme liturgique, peuvent avoir, sans que nous le sachions, une véritable valeur artistique, être des éléments précieux du patrimoine religieux et national. Leur destruction, leur aliénation, leur transformation inconsidérées et indues peuvent constituer de véritables actes de vandalisme, contre lesquels l’autorité publique et l’opinion des milieux artistiques s’élèvent à bon droit. Il serait regrettable que de pareilles fautes individuelles soient attribuées à l’influence de la réforme liturgique et servent à la déconsidérer (1).(1) L’Assemblée des Cardinaux et Archevêques avait attiré l’attention sur ces points dans un communiqué sur la Conservation (les objets d’art clans les églises, cf. Doc. Cath., du 12 avril 1959, col. 461.
III. Respecter les ensembles existants
4 ‑ Certaines suppressions (par exemple d’un retable ou d’un tabernacle monumental), certains renouvellements (par exemple le décapement ou la peinture des murailles), certaines améliorations pastoralement souhaitables (par exemple le déplacement d’un autel majeur situé loin des fidèles) semblent faciles à réaliser immédiatement. Mais leur accomplissement irréfléchi peut détruire irrémédiablement une harmonie, un équilibre voulus par le constructeur ou réalisés peu à peu dans la patience et la continuité par tous ceux qui, jadis, ont entretenu et embelli un sanctuaire.
5 ‑ Certains de nos prédécesseurs ont pu, dans un passé plus ou moins lointain, commettre des actes de " vandalisme ", par exemple en n’observant pas les lois fondamentales de proportion et d’harmonie. Ce n’est pas une raison pour en faire autant, le plus souvent avec de moindres garanties de qualité. Tel autel classique, harmonieux en lui-même, s’accordait peut-être beaucoup mieux à cette église gothique que tel autel moderne et fonctionnel, aux lignes sèches et grêles, que nous projetons de lui substituer.
6 ‑ Même des ensembles médiocres, d’assez mauvaise époque, peuvent réaliser une certaine harmonie, une justesse de proportions, d’éclairage et de couleurs que nous risquons d’endommager par des suppressions partielles ou hâtives. A plus forte raison l’enlèvement de nombreuses statues créera, dans un ensemble de style baroque, une impression pénible de vide, de nudité, d’indigence.
7‑ On ne saurait trop mettre en garde contre une hantise de nudité, ou contre une volonté intempérante de pauvreté évangélique. Surtout dans les églises anciennes, une certaine exubérance décorative contribue au bien-être et à la joie des fidèles, sans insulter nécessairement à leur pauvreté. Certaines églises finissent, à force de simplifications et de suppression, par ressembler à des salles de conférences et par perdre complètement cette chaleur, cette ambiance de splendeur et de gloire qui évoque la Jérusalem céleste, préfigurée par nos églises.
IV. Sens des ensembles à créer
8 ‑ Nous sommes tentés de nous conformer sans attendre à ce que la réforme liturgique recommande, par exemple en retournant face au peuple l’autel majeur et en le rapprochant des fidèles. Mais l’autel fait partie d’un ensemble. Donc pour changer son implantation et son orientation, on calculera toutes les incidences de ce changement, on étudiera corrélativement la place, la disposition, les proportions de l’autel où l’on garde la Sainte Réserve, du lieu de la Parole, du siège des célébrants et des ministres, de la table de communion, et aussi de l’ensemble du sanctuaire qui risque de devenir un lieu vide et mort.
9 ‑ Même si cette réfection d’ensemble ne peut être réalisée d’un seul coup ( à cause de la longueur ou du coût des travaux à entreprendre) encore faut- il avoir établi un plan général à réaliser progressivement, en sachant où l’on va, avant de commencer les modifications de détail.
10 ‑ Ceci ne signifie pas qu’on ne puisse rien faire, lorsqu’on ne peut pas tout changer. S’il est impossible, par exemple, de déplacer ou de retourner l’autel dans un sanctuaire classé, il peut être cependant possible et avantageux de mettre en valeur la Parole de Dieu par l’érection d’un ambon, de mieux aménager le siège du célébrant, ou la place de la schola. Mais ici aussi, il est nécessaire de concevoir un plan d’ensemble, qui tienne compte de tous les facteurs à considérer.
V D’abord du provisoire
11 ‑ Même si ce plan a été soigneusement élaboré, il serait imprudent de le réaliser aussitôt de façon définitive. Il convient, pour ériger un autel face au peuple, ou un ambon, par exemple, de réaliser d’abord des modèles provisoires, en matériaux légers et peu coûteux, et pourtant ayant une réelle qualité. On pourra, à l’expérience, en modifier peu à peu l’emplacement, la forme, les proportions. C’est seulement après plusieurs mois de mise à l’essai qu’on pourra procéder à des démolitions ou à des constructions définitives. (II est intéressant de noter que la liturgie permet que le nouvel autel soit étroit).
12 ‑ Cette invitation à commencer par des arrangements provisoires ne doit pas permettre d’agir au petit bonheur même ce provisoire doit être médité et calculé. Il faut surtout que ce provisoire ne devienne pas définitif... Il serait inconvenant, par exemple, de dresser face au peuple une légère table à tréteaux et de l’utiliser en permanence, tandis que l’autel consacré, monumental, semblerait voué à l’abandon.
VI. Obtenir conseils et permissions autorisés
13 ‑ Tout ceci montre la difficulté de l’entreprise. Un seul homme, non spécialisé, ne peut en prendre la responsabilité et s’y aventurer au petit bonheur. On ne peut se contenter d’improvisation et de bricolage, faire appel à n’importe quel artisan du voisinage, peintre ou menuisier
Un architecte, un décorateur, professionnels et compétents, doivent aider le curé de leurs conseils, étudier sérieusement l’église telle qu’elle est, élaborer des projets avec relevés, plans, voire maquettes. Cette étude pourrait se faire en étudiant sur place les lieux et en participant à la célébration. En effet il s’agit de donner à une communauté qui vit sa liturgie les lieux dont elle a besoin pour une véritable célébration.
14 ‑ De même il faudra que le sens profond et les exigences de la liturgie soient connus et demeurent toujours présents dans l’esprit de ceux qui collaborent à une telle entreprise.
15 ‑ En tout cas, aucune modification importante ne doit être. entreprise sans l’autorisation et le contrôle de la Commission compétente d’art sacré, qui d’ailleurs est à même d’indiquer des conseillers ou des artistes de valeur. Elle ne pourra se prononcer que sur des projets précis, complets et détaillés, non sur une simple description ou un vague croquis.
Conclusion
On voit donc, si nous décrivons maintenant la disposition du lieu de culte la plus conforme aux exigences et aux tendances de la réforme liturgique, que cette description idéale n’est pas une invitation à modifier les églises existantes sans délai et sans prendre les précautions nécessaires. L’application de ces principes garantira la qualité de l’œuvre à entreprendre.
La disposition des églises
I. La disposition de l’autel majeur
La conformité de l’autel majeur aux prescriptions de l’Instruction Inter oecumenici du 26 septembre 1964 doit être conçue dans un plan d’ensemble de tout le sanctuaire. On ne saurait choisir ou modifier la place de l’autel sans avoir déjà prévu exactement l’endroit où l’on érigera l’ambon et celui où l’on dressera le siège du célébrant. Bien que ces premiers paragraphes ne concernent que l’autel majeur, il importe donc d’affirmer au préalable la solidarité de l’autel, de l’ambon ou du siège présidentiel.
A. L’implantation de l’autel
« Il est mieux (praestat) de construire l’autel majeur séparé du mur, pour qu’on puisse en faire facilement le tour et qu’on puisse y célébrer vers le peuple, et il sera placé dans l’édifice sacré de façon à être véritablement le centre vers lequel l’attention des fidèles se tourne spontanément (Instruction art. 91).
1. ‑ L’autel sera séparé du mur.Cette recommandation n’a pas à être commentée, car chaque fois que le recteur d’une église ou d’une chapelle décide de déplacer l’autel, c’est en vue d’être fidèle à l’Instruction.
2. ‑ L’autel sera le centre vers lequel se tournera l’attention de l’assemblée.La notion de centre, que propose l’Instruction, est d’ordre psychologique et non géométrique. L’autel doit s’imposer à l’attention des fidèles. Il le fera s’il n’est pas trop éloigné d’eux et s’il est bien visible. Les deux conditions doivent être réunies. Il arrive qu’un autel, surélevé au fond du sanctuaire soit parfaitement visible : s’il est trop éloigné de la nef, il n’attirera pas d’emblée l’attention de l’assemblée.
a) La visibilité de l’autel sera habituellement accrue, si on le rapproche à l’entrée du sanctuaire. Mais la visibilité de l’autel est également fonction de son éclairage et de son élévation : L’autel doit être suffisamment élevé pour être bien visible. Trop élevé, il risquerait de paraître isolé de l’assemblée. Il doit être bien éclairé, par des lampes dirigées sur lui, et non pas chargé d’illuminations éblouissantes » (Directoire pour la messe, n. 47). On n’oubliera pas que tout autel requiert au moins un marchepied (Cérémonial des évêques, liv. I, c. 12, n. 16). Ce marchepied n’a pas seulement pour but de rendre l’autel visible, mais de le séparer du sanctuaire : dans un lieu saint, les abords immédiats de l’autel constituent un lieu encore plus sacré. Seul le prêtre demeure en permanence sur le marchepied de l’autel durant la liturgie eucharistique ; ses ministres ne doivent y accéder que pour remplir un ministère et en descendre aussitôt.
b) Dans le déplacement de l’autel pour le rapprocher de la nef, le problème de sa visibilité n’est d’ailleurs pas le seul. On doit tenir le plus grand compte du caractère propre de l’édifice et du rôle fonctionnel du sanctuaire.
Il ne conviendrait pas de placer l’autel à la croisée du transept en avant d’un sanctuaire profond qui demeurerait vide. Mais il ne s’agit pas non plus de placer les fidèles (adultes ou enfants) à l’ancienne place de l’autel. Ce serait oublier d’abord que le sanctuaire est réservé, durant la célébration, au clergé et aux laïcs qui remplissent des fonctions liturgiques. En outre, la dissociation de l’assemblée en deux groupes occupant des espaces opposés présente de très grandes difficultés pour la proclamation de la parole de Dieu et la prédication, et elle rend impossible la célébration de l’eucharistie face au peuple. Enfin le sanctuaire a été conçu par l’architecte comme le lieu dans lequel se déroulent les rites et non comme une nef annexe. Il faut donc avoir des raisons vraiment sérieuses pour décider de modifier d’une manière aussi radicale le plan d’un édifice.
3. ‑ L’autel sera érigé de façon à permettre la célébration face au peuple.L’Instruction ne se contente pas de permettre l’adaptation de l’autel en vue de la célébration face au peuple, elle déclare explicitement qu’il est préférable (praestnt) de le construire séparé du mur, afin de faciliter une telle célébration. Et pour lever l’obstacle posé par le décret de la Sacrée Congrégation des rites en date du 1er juin 1957, elle permet (licet) d’adapter l’autel à cette célébration, même si on doit y placer un tabernacle, "petit sans doute, mais convenable" (art. 95).
Si le prêtre doit pouvoir célébrer face au peuple, il n’est pas indispensable qu’il le fasse tous les jours. Quand il célèbre, en semaine, sans assemblée il peut légitimement souhaiter célébrer sans avoir sous les yeux une nef vide. Aussi convient-il de prévoir des deux côtés de l’autel un marchepied assez vaste pour qu’on puisse célébrer dans les deux positions.
B. La forme et les dimensions de l’autel
L’instruction ne dit rien sur la forme et les dimensions de l’autel. Celles-ci découlent de sa fonction et de l’ensemble architectural dans lequel il s’insère.
1. ‑ La forme de l’autel. L’autel est à la fois la pierre du sacrifice et la table du Seigneur. L’autel majeur sera normalement rectangulaire ou carré. Si l’on ne peut s’opposer à un autel rond ou ovale au nom des lois liturgiques, il ne semble pas que ces formes soient indiquées pour l’autel majeur. On veillera surtout à une grande sobriété dans les lignes et à un volume harmonieux. Un autel est érigé, en principe, pour durer, et une forme recherchée devient souvent insupportable en moins de vingt ans.
2. ‑ Les dimensions de l’autel. Les dimensions de l’autel doivent être déterminées d’un point de vue fonctionnel et non en référence aux dimensions qui ont eu cours depuis le XVIe siècle.
Jusqu’à ces dernières années un autel était conçu comme un volume sacré qui devait, à lui seul, meubler le sanctuaire. Si l’on avait développé aussi considérablement sa longueur, c’est que le célébrant s’y tenait durant toute la messe et qu’il y occupait successivement trois emplacements distincts côté épître, côté évangile et centre. Or la rénovation de la liturgie apporte deux modifications de grande importance d’une part, le célébrant ne se tiendra pratiquement à l’autel que pour la liturgie eucharistique qui se célèbre au centre ; mais, d’autre part, il faut prévoir dans la plupart des églises la possibilité de la concélébration : il pourra donc y avoir intérêt à ériger un autel moins long, mais plus large. Mais, comme toujours, on tiendra compte du style et des proportions du cadre architectural. Quant à la hauteur de l’autel, elle devra être calculée en tenant compte de la célébration face au peuple.
Mais on ne formule cette requête qu’au sujet d’un autel érigé d’une manière définitive. Avant d’arrêter l’emplacement exact et les dimensions du nouvel autel, il peut être bon d’aménager provisoirement une armature en bois ou en toute autre matière, sur laquelle on déposera une simple pierre consacrée. On veillera toutefois à la dignité, à l’harmonie des formes et au caractère sacré que doit présenter tout autel, même provisoire
C. Le matériau de l’autel
Dans le choix des matériaux destinés à sa construction et à sa décoration, on observera les règles du droit (Instruction, art. 91).
1. ‑ Les règles du droit. Le Code de Droit canon veut que l’autel soit de pierre. La table de l’autel fixe et la pierre sacrée doivent être une seule pierre naturelle, entière et non friable » (C.I.C. can. 1198, § 1). Le Code ajoute que la table d’un autel fixe doit « couvrir toute la superficie de l’autel et adhérer solidement à la base, qui sera elle-même en pierre, au moins sur les côtés, ou constituée par des colonnes de pierre et supportant réellement la table » (C.I.C. 1198, § 2).
2. ‑ Les convenances liturgiques. Il convient que l’autel majeur d’une église ou d’une chapelle publique soit un autel fixe, apte à recevoir la consécration de l’évêque. Si des raisons sérieuses empêchent l’érection d’un autel remplissant les conditions requises par le droit pour être considéré comme un autel fixe, il est souhaitable que la table de l’autel majeur soit entièrement constituée par un seul bloc de pierre. Bien qu’il s’agisse alors d’un autel < portatif > au sens juridique du terme, il pourra recevoir la consécration selon la forme solennelle (Pontifical romain, liv. 2, Ordo ad altare portatile consecrandurn). Une telle requête est formulée au nom de la vérité des choses.
Mais on ne formule cette requête qu’au sujet d’un autel érigé d’une manière définitive. Avant d’arrêter l’emplacement exact et les dimensions du nouvel autel, il peut être bon d’aménager provisoirement une armature en bois ou en toute autre matière, sur laquelle on déposera une simple pierre consacrée. On veillera toutefois à la dignité, à l’harmonie des formes et au caractère sacré que doit présenter tout autel, même provisoire
D. La croix d’autel et les chandeliers
« La croix et les chandeliers, qui sont requis sur l’autel pour chaque action liturgique, peuvent aussi, au jugement de l’Ordinaire du lieu, être placés en dehors de l’autel » (Instruction, art 94).
1. ‑ La croix. Le code des rubriques prescrit que pour la célébration de la messe il y ait « sur l’autel au milieu une croix assez grande avec le Crucifié » (C.R. n. 527) et le Cérémonial des évêques précise que « l’image du Crucifié doit être tournée vers la table de l’autel » (C. E., liv. 1, c. 12, n. 11). La remarque du Cérémonial est d’autant plus importante que celui-ci décrit la messe épiscopale en fonction de la célébration face au peuple.
Comme la disposition de la croix face au célébrant peut gêner la visibilité des fidèles, spécialement au moment de l’élévation et au Per Ipsum, l’Ordinaire du lieu peut permettre que la croix soit désormais placée non plus sur l’autel, mais en dehors, soit que son pied repose sur le dallage du sanctuaire, soit qu’on la suspende. Dans les mêmes conditions, on pourrait admettre que la croix ne soit plus placée au milieu de l’autel, mais qu’elle soit un peu écartée à droite ou à gauche, toujours cependant devant l’autel.
2. ‑ Les chandeliers. Le nombre des cierges requis pour la célébration de la messe est fixé par le Cérémonial des évêques (1). Deux de ces cierges pourront être apportés par les acolytes dans la procession d’entré : Deux suffisent pour la messe lue d’un prêtre en toute circonstance, et même pour la messe solennelle des féries per annum »t et des fêtes simples, c’est‑ à‑ dire de troisième classe. Quatre sont requis pour la messe solennelle des dimanches et des jours de 2e classe ; il en faut six pour la messe solennelle des fêtes majeures (C. E. liv. 1, c. 12, n. 11, 16 et 24). Comme le Cérémonial ne traite pas de la messe chantée sans ministres sacrés, on peut estimer que quatre cierges suffisent pour elle, quelle que soit l’importance de la fête.Les cierges peuvent être disposés à côté de l’autel avec l’autorisation de l’Ordinaire du lieu. On les placera alors soit entre l’autel et la nef, selon l’usage ancien, soit de part et d’autre de l’autel.
Enfin, on veillera à allumer ces cierges pour les cérémonies. C’est une des exigences de la vérité des choses .
E. Les dépendances de l’autel majeur
Si l’on rapproche l’autel majeur de la nef, il convient qu’il soit entouré par un sanctuaire a assez vaste pour permettre d’accomplir commodément les rites sacrés (Instruction n° 9 1) et aussi pour manifester le caractère sacré de l’autel. .
La séparation entre la nef et le sanctuaire peut être marquée en outre de diverses façons, par exemple, par des degrés, ou encore par une légère clôture. La balustrade (ou cancel), sans être absolument nécessaire, demeure traditionnelle. Là où elle existe, et surtout si elle est ancienne ou de qualité, on ne s’empressera pas de la supprimer. Elle est souvent utile comme appui pour permettre aux personnes âgées ou infirmes de s’agenouiller et de se relever plus commodément.
Près de l’autel se trouvera une crédence ou une table assez grande où seront déposés le calice et les oblats jusqu’à l’offertoire (Ritus n° 53) et où l’on pourra rapporter le calice, après les ablutions (ibid. n° 82).
L’ambon, dont il va être question, sera construit de façon à s’harmoniser avec l’autel. Il peut être aussi élevé que l’autel lui-même. Il convient qu’il n’en soit pas trop éloigné.
II L’ambon
« Il convient d’avoir pour la proclamation des lectures sacrées un ambon ou des ambons disposés de telle sorte que le ministre puisse être bien vu et entendu par les fidèles (Instr. Inter OEcumenici, n° 96).
Il n’est pas convenable de proclamer la Parole de Dieu en n’importe quel endroit du sanctuaire. Il convient par respect pour la Parole de Dieu que le lieu de cette Parole soit bien marqué, et reste visible même en dehors de la célébration. Le texte de l’Instruction marque une préférence pour l’ambon unique, assez élevé et sonorisé. C’est là qu’on proclamera les " lectures sacrées " (Ritus n° 41, 42, 44, 45, 46). C’est là qu’on donne l’homélie (ibid. 50). C’est là aussi que le célébrant peut diriger la prière universelle (ibid. 51).
S’il y a "des ambons " , il convient de distinguer l’ambon principal, réservé à la proclamation de la Parole de Dieu, et un ambon ou plutôt un pupitre, moins important, pour les commentaires, les annonces, la direction des chants, etc.
L’érection d’un ambon dans le sanctuaire n’entraîne pas nécessairement la destruction de la chaire placée dans la nef, surtout si celle-ci présente une valeur artistique.
III. Le siège du célébrant et des ministres
« Le siège pour le célébrant et les ministres, selon la structure de chaque église, sera placé de telle façon que les fidèles puissent bien le voir et que le célébrant lui-même apparaisse véritablement comme présidant toute l’assemblée des fidèles. Cependant, si le siège est placé derrière l’autel, on évitera la forme d’un trône, qui convient uniquement à l’évêque » (Instruction, art. 92).
Ce texte indique le double but à rechercher : que le célébrant soit bien vu, et qu’il apparaisse véritablement comme présidant toute l’assemblée.
Jusqu’ici, ce siège était plutôt situé de telle façon que le célébrant paraissait se retirer de la célébration. Désormais il y vient pour jouer un rôle actif. En effet à toute messe célébrée avec peuple il s’y rend normalement après avoir baisé l’autel (ou au moins après l’oraison) et peut y demeurer jusqu’à l’offertoire. C’est donc là qu’il entonne le Gloria in excelsis et chante l’oraison (Ritus n° 23). Il peut y donner l’homélie (Ritus n° 50), et diriger de cet endroit la prière universelle (Instruction, art. 56 ; Ritus n° 51). A la messe solennelle, non seulement il y écoute les lectures, mais c’est là qu’il met et bénit l’encens, bénit le diacre pour l’Évangile, et entonne le Credo (Instruction, art. 52 b).
L’Instruction signale la place traditionnelle de la présidence, à l’abside, derrière l’autel si celui-ci est tourné face au peuple. En ce cas, le siège doit être placé sur des degrés assez élevés pour que le célébrant ne soit pas dissimulé aux regards par l’autel. Néanmoins « on évitera la forme d’un trône » c’est-à-dire que ce ne sera pas un siège majestueux par sa forme ou sa décoration. On veillera aussi à ce que le célébrant n’apparaisse pas comme coupé de l’assemblée.
L’Instruction laisse le champ ouvert à d’autres solutions, On pourra souvent placer le siège sur le côté du sanctuaire, à condition de le surélever et de l’avancer.
De toute façon on choisira une solution qui obtienne les buts précisés plus haut et qui s’accorde avec la disposition générale du sanctuaire, son développement en largeur ou en profondeur, son élévation, la disposition des piliers, etc.
On évitera de placer le siège du célébrant de telle façon qu’il tourne le dos à la sainte Réserve, à moins que ce ne soit à une distance telle que cette disposition n’ait vraiment rien de choquant.
En résumé, cette place de présidence attribuée au célébrant devra manifester la fonction qu’il exerce dans les rites d’entrée et la liturgie de la Parole.
IV. La sainte Réserve
" La sainte Eucharistie sera conservée dans un tabernacle solide et inviolable, placé au milieu de l’autel majeur ou d’un autel mineur, mais qui surpasse vraiment tous les autres. Selon les coutumes légitimes et dans des cas particuliers que doit approuver l’Ordinaire du lieu. elle pourra aussi être placée dans un autre lieu de l’église. très noble et bien décoré. Il est permis de célébrer la messe face au peuple, même s’il y a sur l’autel un tabernacle, petit sans doute, mais convenable " (Instruction, art. 95).
Étant donné qu’il est préférable de disposer l’autel majeur de façon à permettre la célébration face au peuple, on a donc, dans cette hypothèse, le choix entre deux solutions : ou mettre la sainte Réserve en dehors de l’autel majeur ou placer sur celui-ci un tabernacle de petite dimension. Il semble que, chaque fois qu’on pourra aménager un lieu convenable pour la sainte Réserve en dehors de l’autel majeur, il sera préférable de le faire, car un tabernacle de trop petites dimensions risque de ne pas répondre aux exigences du culte eucharistique.
Le tabernacle pourra dès lors recevoir des dimensions plus amples et on pourra créer autour de lui les conditions propices à l’adoration de la sainte Eucharistie. De plus la célébration liturgique se déroulera autour de l’autel majeur dans de meilleures conditions.
Ce n’est pas sans raison, en effet, que le Cérémonial des évêques prescrit de retirer le Saint Sacrement de l’autel où l’évêque doit célébrer solennellement (C. E. liv. 1, c. 12, n. 8) La présence eucharistique du Seigneur sur l’autel, dès le début de la messe, rend moins perceptible aux fidèles sa présence dans l’assemblée, dans le célébrant et dans la parole de Dieu. Or la découverte par le peuple chrétien des modes multiples de la présence du Christ dans l’action liturgique constitue l’un des principes généraux sur lesquels repose, d’après la Constitution conciliaire, la restauration de la liturgie (Constitution De Sacra liturgia, art. 7).
On notera que si l’Instruction permet de placer la sainte Réserve en dehors d’un autel, c’est « selon les coutumes légitimes et dans des cas particuliers que doit approuver l’Ordinaire du lieu ». Parmi ces cas particuliers on peut noter celui d’une chapelle de dimensions restreintes, où il est difficile à la fois de placer le tabernacle sur l’autel face au peuple, et d’ériger un second autel.
Mais une solution normale et digne consistera le plus souvent à placer la sainte Réserve sur un autel et dans une chapelle qui servira pour les messes de semaine. Dans tous les cas, on veillera à ce que la solution adoptée favorise la dévotion envers le Saint Sacrement, bien loin de donner l’impression que celui-ci est mis à l’écart et laissé à l’abandon. Pour cela, il faut que la chapelle de la Réserve soit très accessible, d’une décoration et d’un entretien particulièrement soignés.
V. Les autels mineurs
« Les autels mineurs seront en petit nombre, et même, autant que le permet la structure de l’édifice, il est très convenable de les placer dans des chapelles quelque peu séparées de l’espace principal de l’église ». (Instruction, n° 93). Il ne convient pas que ces autels, sauf exception, portent un tabernacle.
VI Le baptistère
« Dans la construction et la décoration du baptistère, on veillera soigneusement à ce que la dignité du sacrement de baptême apparaisse clairement et que le lieu se prête aux célébrations communes » (Instruction, n° 99).
La « dignité » apparaîtra si le baptistère s’inscrit parfaitement dans l’architecture de l’édifice et s’il est convenablement orné et entretenu. Il n’est pas nécessaire qu’il se trouve au fond de l’église. Pourvu qu’il se trouve auprès d’une porte, ce qui est essentiel à son symbolisme, il peut être placé en haut de l’église, non loin du sanctuaire.
Pour que « le lieu se prête aux célébrations communes » il n’est pas nécessaire qu’il ait de vastes dimensions : il suffit qu’il s’ouvre assez largement sur un narthex ou sur l’église elle-même.
20 juillet 1965.