« Si je n’ai pas la charité » : chronique hebdo #14 de Mgr de Sinety
« Se reconnaître comme fils, ou fille, c’est donc reconnaître que celui que nous appelons ensemble Notre Père est bien le père de chacun de nous. Cette expérience de la filiation nous ouvre sur une autre expérience celle de la fraternité. Si nous sommes frères c’est parce que nous nous reconnaissons comme enfant d’un même père. » Mgr Benoist de Sinety est vicaire général du diocèse de Paris.
Être un homme… Quel programme.
On a beaucoup parlé ces derniers temps de la modification d’une des phrases du Notre-Père. Cette prière ne dit-elle pas, par ces deux premiers mots le fondement de ce qui peut être pour nous une réponse à la question de savoir qui sommes-nous ? Pour le chrétien, comprendre qui il est, commence par la prise de conscience qu’il est d’abord un fils.
Expérience naturelle, me direz-vous… Lequel d’entre nous n’est pas d’abord un enfant ? Précisément cette expérience naturelle que nous faisons, souvent pour le meilleur et malheureusement parfois pour le pire, l’expérience de ce qui se joue aussi est d’abord entre Dieu et chacun de nous.
Se reconnaître comme fils, ou fille, c’est donc reconnaître que celui que nous appelons ensemble Notre Père est bien le père de chacun de nous. Cette expérience de la filiation nous ouvre sur une autre expérience celle de la fraternité. Si nous sommes frères c’est parce que nous nous reconnaissons comme enfant d’un même père. Cette expérience est un appel à la responsabilité. Le dialogue biblique entre Dieu et l’homme est d’abord une question posée : celle de Dieu à l’homme, caché dans le jardin du premier jour, « où es-tu ? ». Question d’un père qui cherche son enfant, qui s’est caché, honteux.
A cette première question, une seconde est associée : celle posée par Dieu au fils d’Adam et Eve : « Où est ton frère ? ». A ces mots, le meurtrier prend peur et se cherche une excuse. Il puise dans ses souvenirs jaloux et dans les fausses bonnes raisons qui poussent à ne pas faire le bien, ni à le vouloir…
Mais au cœur de ce mal, au cœur de ces ténèbres, jaillit la flamme de la Miséricorde ! pour le fils perdu, comme pour le frère meurtrier, le Père se révèle comme source de tout pardon. Et c’est précisément cette miséricorde qui nous oblige, qui nous pousse, qui nous bouleverse et nous entraîne
C’est par les retrouvailles, après le premier péché, entre le père de toute éternité et les premiers enfants prodigues, que se nouent pour toutes les générations à venir cette compréhension d’un Dieu-Père qui ne cesse de vouloir rencontrer ses enfants, à commencer par les plus perdus, les plus lointains, les plus pécheurs.