« Si je n’ai pas la charité » : chronique hebdo #15 de Mgr de Sinety
« Si nous voulons nous aimer, et aimer notre prochain, il est d’abord primordial de nous reconnaître nous-mêmes, et par conséquent notre prochain avec nous, comme aimés de Dieu. » Mgr Benoist de Sinety est vicaire général du diocèse de Paris.
Être un homme… Quel programme ! Lorsque j’étais enfant, parmi les chants folklorique que nous reprenions en chœur autour du feu de camp, il y en avait un dans les paroles me reviennent un peu en mémoire : « Pour faire un homme mon Dieu que c’est long ! » Je dois dire que, à 9 ou 10 ans, je ne prêtais pas une attention très métaphysique à ce genre de refrain !
Mais tout de même, cela vaut la peine d’y réfléchir un peu ! En nous définissant comme des hommes et des chrétiens, nous reconnaissons que nous sommes à la fois et des fils, et des frères. Enfants du même Père, et frère de tous. Comme le disait à sa manière le bienheureux Charles de Foucauld qui se voulait frère universel, c’est-à-dire catholique !
Il peut nous arriver, parfois sans même y réfléchir de croire que pour être quitte il suffit d’être un bon fils, obéissant et respectueux des demandes de son père. Oui cela devrait pouvoir suffire. Mais nous voici confrontés à un problème : la première demande que nous adresse notre père, consiste à nous interroger sur ce que nous faisons pour nos frères, de nos frères, avec nos frères. Nous pouvons retourner cela dans tous les sens mais nous n’y échappons pas : reviens cette sentence de l’apôtre Jacques « celui qui dit j’aime Dieu et qui n’aime pas son frère, est un menteur ». Le Christ lui-même interrogé sur le premier commandement aurait pu en rester finalement au moins dérangeant, en nous recommandant d’aimer Dieu de tout notre cœur de toutes nos forces et de tout notre esprit. Mais il ajoute un autre commandement qui, dit-il, lui est semblable : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
Si nous voulons nous aimer, et aimer notre prochain, il est d’abord primordial de nous reconnaître nous-mêmes, et par conséquent notre prochain avec nous, comme aimés de Dieu.
Il me semble que pour aimer en vérité, il faut d’abord se reconnaître soi-même aimable. Et voilà la merveilleuse pédagogie divine qui se profile : en nous révélant aimable, Dieu nous rend capables d’aimer.
Et comme cette révélation ne se déroule pas en un seul instant de notre histoire, mais tout au long de nos vies, cette découverte progressive, continue, et jamais achevée, de l’amour que Dieu a pour moi, nourrie de la même manière ma capacité à aimer ceux qui me sont donnés comme prochain. Oui pour faire un homme, mon Dieu que c’est long, mais surtout mon Dieu que c’est beau !