Foi et engagement de la liberté
Extrait de Osez croire aux Éditions du Centurion (1985).
Pages 22-23.
Nous ne sommes plus au temps où l’on pouvait penser qu’être chrétien revenait à être honnête homme qui, de plus, croyait en Dieu. L’« honnête homme », c’était ce que tout le monde pensait. Or, présentement, sur les choix les plus décisifs de l’existence humaine, le consensus n’est pas conforme à ce que l’Évangile nous dit ; et quand nous voulons rester fidèles à une exigence du Christ, que ce soit une exigence morale, une exigence spirituelle, une exigence de rectitude, la plupart du temps, nous sommes seuls et nous nous sentons en contradiction avec ce que tout le monde pense. Et même l’affirmation de la foi est contredite par l’opinion commune.
En fait, la foi est un combat, dans lequel nous nous trouvons démunis, solitaires. Le problème n’est pas d’avoir en soi-même une certaine capacité d’affirmation, de réponse intellectuelle. Il s’agit d’être capable de faire un choix, un choix qui consiste à vouloir, avec la force que Dieu donne, nous appuyer sur la Parole de Dieu plutôt que sur ce que les autres pensent. Cela est très difficile parce que nous nous disons alors : « Suis-je fou ? La foi n’est-elle pas finalement une opinion ou dépassée ou intenable ? Les positions de la foi ne devraient-elles pas s’aligner sur ce que tout le monde répète ou trouve raisonnable ? » Nous ne supportons pas cette contradiction. Ceux qui perdent la foi, souvent, sont des gens qui ne peuvent pas supporter cette situation de contradiction. Ils perdent la foi parce qu’ils ne peuvent pas garder la foi. Il faut nous donner les uns aux autres le moyen de garder la foi. Comment ? Non pas simplement en nous confortant les uns les autres, en nous réassurant les uns les autres, mais en recevant ensemble cette force du Christ qui nous permet de croire.
+Jean-Marie cardinal Lustiger
Archevêque de Paris