Crise de la société : la transmission d’une génération à l’autre
Extrait de Osez Vivre aux Éditions du Centurion (1985).
p. 149-150
Il faut appeler les choses par leur nom. La jeunesse de ce pays se débat, trop souvent laissée à elle-même dans une société où elle ne peut trouver sa place. Certains cherchent à s’échapper par l’alcoolisme, la drogue, la violence. En ce monde qui nous paraît neuf, tout leur semble usé ; c’est pourquoi ils sont tentés d’abuser de tout, des objets que nous avons fabriqués comme de leur corps. Voilà la réalité qui impose ses stigmates à cette génération. Aucun éducateur d’aucune école n’osera vous assurer que ces stigmates épargneront les enfants que vous leur confiez. Ce drame éclipse les affrontements doctrinaires et corporatistes des adultes, parents ou enseignants. Tous le savent bien. L’école pose aujourd’hui à la nation entière une question : saura-t-elle ne pas perdre sa jeunesse ? Saura-t-elle lui transmettre des raisons de vivre ?
Je m’adresse donc d’abord à vous, les jeunes. Votre avenir, pour une part, est entre nos mains. Le monde où vous entrez, c’est nous qui, pour une part, l’avons fabriqué. Vous jugez déjà ce que vous recevez et ce que nous faisons. Mais ne l’oubliez pas : nous vous avons transmis ce qui ne nous appartient pas : la dignité d’hommes et de femmes créés à l’image et à la ressemblance de Dieu, la liberté et la conscience qui font que tout être humain est sans prix. Cette liberté et cette conscience, vous en êtes à votre tour responsables, comme vous êtes par là même responsables du monde dans lequel nous vivons, et comme vous en serez responsables devant la génération qui suivra.
+Jean-Marie cardinal Lustiger
Archevêque de Paris