À Paris, les paroisses se mobilisent
Article paru dans Aujourd’hui en France le 7 janvier 2009
Le Canal de l’Ourcq est gelé, il est 21 heures hier soir à Paris et il fait déjà moins 8 degrés mais Charlie dort dehors. Recroquevillé sur une bouche de chauffage, cet homme de 60 ans vêtu d’un blouson en cuir mange en pleurant le boeuf bourguignon chaud que vient de lui apporter Chantal Delarue, professeur à la retraite.
Par bribes, le sans-abri se livre : « Ça fait trente-deux ans que je couche dehors. J’ai été quatre fois dans le coma. Et là, vous savez ce qui m’arrive ? J’ai plus le RMI. » Chantal a beau insister, Charlie refuse de rejoindre la salle paroissiale où il pourrait dormir au chaud. « Je dis non », lâche-t-il en réajustant son duvet.
Son copain d’infortune, Michel Chevillard, lui, apprécie l’accueil de la vingtaine de paroissiens de l’église Saint-Jacques-Saint-Christophe à Paris (XIX e arrondissement) qui se relaie bénévolement auprès des SDF. A la rue depuis que sa femme « l’a foutu dehors le 5 mars 2007 », cet ex-ouvrier forain a trouvé refuge dans la salle de l’église. « Je suis bien ici, mieux que dans un centre d’hébergement. Peut-être parce que Dieu est avec nous », confie cet homme de 63 ans, lunettes et barbe bien taillée, en sortant un chapelet de son anorak. Est-ce le fumet qui s’échappe de la petite cuisine ? Ou le fait que les bénévoles, après avoir récité le bénédicité, mangent avec les SDF ? Toujours est-il que l’ambiance est ici chaleureuse, presque familiale.
Une première dans la capitale Après le repas, Michel donne un coup de main pour la vaisselle et une partie de belote peut s’engager. Les deux sans-abri accueillis hier soir, tous deux prénommés Michel, devaient repartir ce matin vers 8 heures, non sans avoir pris un petit déjeuner.
Le cardinal-archevêque de Paris, Mgr André Vingt-Trois, vient de demander à chaque paroisse d’ouvrir un local afin d’accueillir les SDF pour la nuit. Une première dans la capitale.
« Il s’agit de mettre à disposition non pas les églises qui sont des lieux de culte mais des salles chauffées où les sans-abri se voient proposer un repas et un matelas pour dormir », explique Olivier Ribadeau-Dumas, vicaire épiscopal pour la solidarité du diocèse de Paris. Cette opération baptisée Hiver solidaire repose d’abord sur la mobilisation des fidèles. «
Nous sommes une vingtaine à aller chaque soir à la rencontre des sans-abri du quartier, raconte Olivier Gariazzo, paroissien de l’église Saint Léon (XV e ). Nous leur apportons du café, de la soupe mais aussi des vêtements et des couvertures car ils refusent souvent l’hébergement que nous leur proposons. » • Philippe Baverel
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