Paroisse de la Trinité - Hiver Solidaire 2012-2013 - Newsletter

L’édito

130 bénévoles, 11 personnes de la rue, 4 mois d’accueil quotidien… Voilà quelques chiffres de l’édition 2012 - 2013 d’Hiver Solidaire à la paroisse de la Trinité.

Ils mériteraient bien sûr d’être nuancés. Par exemple sur les 11 personnes accueillies, « seules » 6 l’ont été pour un mois ou plus. Mais, surtout, nous aurions tort de trop nous y attarder. L’essentiel n’est pas là. Il est, sans forcer le trait ni tomber dans l’autosatisfaction, dans les remerciements finaux, dans la bonne humeur générale qui s’est doucement mise en place, dans les relations d’amitié nouées, et foule d’autres petits et grands détails laissés à la mémoire de chacun.

Deux éléments de ce bilan sont frappants.

D’abord, l’évolution dans l’ambiance des soirées entre le début et la fin, comme un fruit de la fidélité et de la persévérance. Ensuite, le « faible » nombre de personnes accueillies par soir, 3 le plus souvent, comme une double invitation : à l’humilité d’une part, pour reconnaître avant tout le travail de l’Esprit Saint ; au choix de la qualité d’autre part, plutôt que de la quantité, confirmant l’intuition à l’origine d’Hiver Solidaire, qui visait à compléter et non à remplacer les structures d’accueil plus larges qui existent déjà à Paris.

130 bénévoles, n’est-ce pas « trop », cependant, pour « seulement » 3 personnes par soir en moyenne ? La question est intéressante, mais il nous semble qu’Hiver Solidaire se prête mal à une analyse quantitative… Les chiffres, nous l’avons dit, sont à manipuler avec précaution. D’ailleurs, nous préférons nous étonner autrement, en remarquant que les accueillants sont peu à peu devenus accueillis, et donc en renversant la question ainsi : comment se fait-il que seulement 3 hommes par soir en moyenne aient suffi pour accueillir à eux seuls 130 bénévoles ?...

Portraits

Originaire de la Réunion, Frédéric est arrivé à Paris il y a quelques mois, après plusieurs années dans le Vaucluse. Grand sentimental, il a fait de son téléphone son aide fétiche pour maintenir un lien avec ses proches, y compris pendant les repas ! Ses sandwichs beurre - nutella en guise de dîners sont également restés dans les annales ! Il a par ailleurs pris une place toute particulière à la paroisse, y venant très souvent à la messe et à l’adoration.

Rachid, accueilli déjà l’année dernière, est venu cette année pendant un mois. Discret, serviable et attentif, ce marocain d’origine est le roi de la débrouille, aussi bien pour trouver où dormir, par exemple au fond des bus de nuit parisiens, que pour œuvrer aux puces de Saint Ouen.

L’un des plus jeunes et dernier arrivé, Viorel, a vite pris ses marques. Venu d’Onesti en Roumanie, il connaît bien la France, pour y avoir déjà fait plusieurs séjours, notamment à Caen. Énergique, déterminé et un brin charmeur, il aime débattre sur la disponibilité des assistantes sociales et le bavardage des français. « Et bla bla bla.... »

Laurent vient de Cergy. Son caractère bien trempé cache un cœur d’enfant, que la rencontre des bénévoles ne manque jamais d’émouvoir. Il aime rigoler et a toujours une réplique des tontons flingueurs aux lèvres. Attention, avec lui, on ne fait pas semblant de chanter : « Il faut y mettre ses tripes bordel bordel ! »

Venu tout droit de Casablanca, Karim est le cuistot de la maisonnée. Lors des soirées festives, il n’a pas son pareil pour prendre en main la logistique et concocter pour tous un plat succulent, sans oublier bien sûr son excellent thé à la menthe. Toujours de bonne humeur, il devient en revanche intraitable lorsqu’il s’agit de belote.

Enigmatique, venu tout droit du Moyen Orient, Adel a gardé pour lui un large pan de son histoire, de ses espoirs, de ses inquiétudes… Peu enclin à la conversation, il prenait part aux dîners avec un appétit d’ogre avant de s’éclipser pour dormir… Il a quitté Hiver Solidaire sans prévenir…

En plus de ces six hommes, ont aussi été accueillis pour des durées moins longues, Georgel, roumain au caractère bien affirmé, Claude, grand bavard du quartier, Christophe, bien généreux, Pierre-Benoit, tout réservé, et Monday, l’imprévisible…

11 hommes, pour autant d’intentions de prières…

Le chiffre de l’hiver

11, c’est le nombre de personnes différentes qui ont été accueillies à la Trinité, certaines pour quelques heures, d’autres pour plusieurs mois... Des durées de passage très variables mais espérons suffisantes pour marquer les mémoires et les coeurs !...

Et pour la suite ?

Chaque mardi soir jusqu’à la fin mai, bénévoles et personnes accueillies se retrouvent pour dîner et partager ce qu’ils vivent. Les liens noués semblent partis pour durer.

Contacts

hiversolidairelatrinite@gmail.com

Jean-Christophe : 06 87 92 52 24
Céline : 06 42 73 53 32
Christina : 06 59 00 11 10

Une newsletter préparée par Sophie Baqué, Philippe Passebon et l’équipe Hiver Solidaire

Témoignage

« C’est comme être à la maison, partager un moment en famille »

Viorel Salajanu a logé 7 semaines sous l’église de la Trinité dans le cadre d’Hiver Solidaire. Il nous partage en quelques mots son expérience.

Comment as-tu vécu Hiver Solidaire ?

J’ai trouvé ça vraiment super. Quand l’accueil s’est terminé fin mars, je me disais dans ma tête : « Bon, maintenant, c’est fini, il va falloir passer à autre chose ». Et depuis, presque chaque jour, c’est incroyable : les bénévoles continuent de m’appeler ! Lundi dernier par exemple, j’ai parlé avec 3 bénévoles. Sylvie m’a téléphoné pour me proposer de m’aider à faire mon CV. Puis le père Emmanuel, qui voulait savoir comment j’allais… tout ça, j’adore ! Ça me touche de voir que les contacts se poursuivent… je ne suis plus seul comme avant.

Quels souvenirs en garderas-tu ?

C’est comme être à la maison, partager un moment en famille. Pour moi, c’est la même chose : on mange ensemble, on essaye de filer la corvée de vaisselle à quelqu’un d’autre, on dort dans un dortoir, on prend le petit déjeuner ensemble le lendemain matin… A chaque dîner, on rigole autour de la table, on s’amuse, parfois on discute plus tranquillement. Et puis, j’ai découvert la messe des jeunes, le dimanche soir à 19h à la Trinité. J’y retourne chaque semaine maintenant, je ne peux plus arrêter… il faut entendre la chorale chanter… c’est tellement beau !

Tu es arrivé de Roumanie le 20 janvier 2013 et as été hébergé à Hiver Solidaire 3 semaines après. Comment s’est déroulée cette période ?

Pendant 3 semaines, je dormais dehors, sur des cartons. J’ai appelé le 115, j’ai passé une nuit dans un centre d’hébergement. C’était sale, dégoûtant… j’ai juré de ne jamais y retourner. Je dormais souvent dans la Gare St Lazare, parfois dans les trains même si c’est interdit. Un jour, j’ai croisé un policier qui m’a dit d’aller voir dans les églises. J’ai marché par hasard, je suis arrivé à celle de la Trinité. J’ai demandé au prêtre qui était là. Il m’a rappelé le 11 février, le jour de mon anniversaire, pour me dire que c’était bon !

Tu viens de trouver une place dans une colocation de l’Association Lazare, rue de Lourmel dans le 15ème arrondissement, qui héberge des personnes de la rue et des jeunes actifs. Raconte nous !

J’ai eu cette place grâce à un bénévole qui a fait les démarches pour moi. Nous sommes 40 colocataires au total, avec 10 personnes à chaque étage. Les filles vivent au 1er et au 2ème, nous les garçons au 3ème et 4ème. J’ai ma chambre pour moi tout seul (sourires…). La salle de bain et la cuisine sont des pièces communes, chacun est responsable du repas et du ménage à tour de rôle. C’est vraiment super. Il faut absolument que je trouve vite un travail car ça coûte 400€ par mois.

Les médias en parlent

Les médias se sont tout particulièrement intéressés à Hiver Solidaire cette année. Ainsi RMC, Valeurs Actuelles, et le Daily Neuvième, un journal local, ont poussé les portes de la Trinité… Morceaux choisis :

 Karim, un des hommes accueillis, au micro de RMC :
« Ca fait du bien. Il y a des gens qui n’ont pas de famille, ça remplace. »

 Fanny, bénévole interrogée par Valeurs Actuelles :
« J’ai gardé un très bon souvenir de mon expérience l’an passé. (…) Nous avions partagé de bons moments et tissé de vrais liens d’amitié. »

 Le Daily Neuvième, rappelle que « Pour Frédéric, Laurent, Adel et Karim, il s’agit aussi de réapprendre à vivre avec d’autres personnes. »

Un Hiver Solidaire en quelques mots

8 décembre
C’est la fête de l’Immaculée Conception. C’est aussi la date à laquelle l’accueil d’Hiver Solidaire a commencé.

Dévouement
Le dévouement des bénévoles a été tel que l’accueil a été continu du début à la fin. Pourtant, avec le réveillon de Noël, celui du 31 décembre, les vacances de fin d’année, celles de mars, et le Triduum Pascal, le parcours était semé d’embûches !

Spirituel
Deux soirées spirituelles ont permis aux bénévoles de prendre un peu de temps pour réfléchir à leur engagement. Pour la première, le père Pierre-Benoît a fait lire aux participants un extrait de l’Evangile, tandis que la seconde a été occupée par l’étude du message de carême du pape Benoît XVI, qui traitait de l’articulation entre foi et charité.

Cinéma
Deux soirées film ont laissé libre cours aux talents culinaires de Karim, qui a régalé la quinzaine de convives d’un couscous la première fois, d’un hachis Parmentier la seconde fois. Ce furent aussi deux occasions de revisiter des classiques du cinéma français et d’étendre un peu le nombre de participants aux soirées.

Festif
La soirée festive finale du 14 mars a réuni plus de 50 personnes autour de chants et d’un tajine, cette activité étant devenue au fil des mois un classique pour occuper les soirées après les dîners.

Printemps
Avec le printemps a pris fin Hiver Solidaire, mais pas la solidarité ! Une messe d’action de grâce a eu lieu fin avril à la Trinité. Ce fut aussi l’occasion de joyeuses retrouvailles entre les bénévoles et deux des hommes accueillis.

Regard

A 20 h vous arriverez. Sans dépasser une demi-heure de retard, s’il vous plaît, car accueillis comme bénévoles ont faim ! Tout le monde se retrouve dans une petite salle située au sous-sol de l’Eglise de la Trinité. Chaque bénévole amène un plat pour 6 à 8 personnes environ, une entrée ou un dessert. Un conseil : ne pas oublier la viande ! Quelle ne fut pas mon erreur, un soir où j’étais responsable du plat principal, d’arriver avec un mélange de petits légumes… végétariens… qui fut accueilli par « Mais y’a pas de viande ? ». Bon, autant pour moi…je repasserai ! Et c’est exactement la même chose pour le pain...

La vaisselle vous ferez. Et dans la joie s’il vous plaît ! Ce sont souvent les nouveaux venus qui sont de corvée, surtout quand ils sont arrivés en retard ! Puis vient la pause clope. Un conseil : si vous êtes non fumeur, accompagnez vos camarades fumeurs à l’extérieur… même lorsqu’il fait froid ! Passer une soirée à Hiver Solidaire, c’est prendre le temps d’être ensemble. Tous ces instants partagés permettent de mieux se rencontrer.

Des classiques vous chanterez. A Hiver Solidaire, on chante, on danse parfois. Bref, on se réunit autour d’activités simples. N’hésitez pas à amener des paroles de chansons, vos vieux Diapasons retrouvés au fond d’un placard, votre guitare si vous en avez une. Tubes de l’hiver 2012-2013 ? « Hisse et ho, Santiano » et « Armstrong ». Oui oui, on fait dans les classiques !

A la belote vous jouerez. Vous ne savez pas jouer ? Ne vous inquiétez pas, vos camarades, eux, savent. Et ils se feront un vrai plaisir de vous apprendre. A la belote, il faut savoir être beau joueur… Engueulades, coups de bluff, départs de la salle en claquant la porte. C’est normal ! « La belote, c’est sérieux bordel » dixit Laurent.

Votre duvet vous emmènerez. Le matelas est fourni. Un dortoir pour les filles, un pour les garçons. A Hiver Solidaire, la nuit fait partie de l’aventure, un peu comme une « retraite en ville » ou un week-end camping improvisé au cœur du 9ème arrondissement. Ça permet aussi, le lendemain, de prendre un petit déjeuner ensemble avant de repartir dans nos journées respectives. De doute jamais vous n’aurez. Comme toute rencontre, une soirée à Hiver Solidaire est déroutante et merveilleuse. On ne sait pas comment va se dérouler la conversation, et finalement c’est un échange toujours riche, simple et vrai.
On a l’impression d’arriver comme des « superman » pour « aider les accueillis », et ce sont eux qui nous mettent à l’aise. On voit qu’autour de la table, chacun porte des pauvretés différentes…Certains des pauvretés matérielles. D’autres des freins, des lacunes et des barrières de cœurs. Ça ouvre des portes. Ça fait avancer.

Sophie Baqué

Ce qu’ils deviennent…

Rachid a été baptisé à Pâques, à la paroisse Sainte Hélène, dans le 18ème arrondissement. Ses démarches avec le Secours Catholique pour être régularisé (après plus de vingt ans en France !) sont toujours en cours. Il est accompagné par une paroissienne de Sainte Hélène.

Laurent, aidé lui aussi de bénévoles d’Hiver Solidaire, a entamé des démarches : la domiciliation est enfin faite, suivront la carte d’identité et l’inscription à la Sécurité Sociale. Son humeur reste au beau fixe, malgré le retour à la rue. Ce qu’ils deviennent.

Viorel a intégré une colocation de l’association Lazare, qui réunit jeunes professionnels et personnes en situation de grande précarité. Il en est très heureux ! Prochaine étape, indispensable pour pouvoir continuer à bénéficier de cet hébergement : trouver un travail. Viorel s’y emploie, aidé de bénévoles d’Hiver Solidaire.

Frédéric, parti à Lille début février, hébergé chez un ami, y a trouvé un travail dans la restauration. Il est cependant en arrêt maladie, pour des problèmes de dos, qui nécessiteront une opération prévue en mai.

Karim cherche au jour le jour du travail mais n’a toujours pas de logement. Courageux, il ne désespère pas pour autant. Remerciements La liste est longue, de ceux qui ont apporté leur pierre à l’édifice ! Nous remercions bien sûr tout particulièrement tous les bénévoles, le père Pierre-Benoît, le père Emmanuel, le père Pierre-Oliviers, les sacristains, l’intendant, la secrétaire et la responsable communication de la paroisse.

Remerciements…

La liste est longue, de ceux qui ont apporté leur pierre à l’édifice ! Nous remercions bien sûr tout particulièrement tous les bénévoles, le père Pierre-Benoît, le père Emmanuel, le père Pierre-Oliviers, les sacristains, l’intendant, la secrétaire et la responsable communication de la paroisse.

L’équipe Hiver Solidaire
Christina, Céline, Maiwenn, Baptiste et Jean-Christophe

Les églises de Paris au service des gens de la rue

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