Homélie du Cardinal André Vingt-Trois - Messe d’envoi des catéchistes du Diocèse de Paris

Samedi 11 septembre 2010 - Saint-Pierre du Gros-Caillou (7e)

 1 Co 10, 14-22 ; Ps 115 ; Lc 6, 43-49

Cette parabole de l’évangile de saint Luc éclaire la mission à laquelle vous participez. Elle donne le sens profond de ce que nous essayons de vivre avec les enfants, alors que ceux-ci ne mesurent pas toujours la portée à long terme de ce que nous faisons ensemble, ce qui est d’ailleurs bien naturel à un âge ou l’on se projette peu sur le long terme et où l’on est au contraire investi dans l’immédiat.

Ce travail persévérant poursuivi semaine après semaine ressemble à celui de l’homme qui creuse profondément les fondations de la maison qu’il veut construire. Car si nous pouvons comparer la vie de ces enfants (dans laquelle ils s’engagent et qui va se dérouler sur plusieurs dizaines d’années) à la construction d’une maison, notre mission concerne la période des fondations. Il ne s’agit donc pas simplement de satisfaire à une obligation ecclésiale ou moins encore de satisfaire à une attente assez imprécise de la part de leurs parents, mais bien de mettre en place des éléments qui vont structurer la manière de vivre et de vivre la foi des ces jeunes tout au long de leur existence.

Pour reprendre les mots de l’Evangile, nous sommes au stade où nous cherchons à mettre en œuvre chez les enfants ce cœur bon. Le cœur bon, selon la parabole, est le cœur de celui qui accueille la parole de Dieu pour la mettre en pratique. Ceci donne les deux axes pédagogiques de notre catéchèse.

Elle est d’abord centrée sur la Parole de Dieu. Un des buts premiers de l’investissement catéchétique est de familiariser des enfants avec la Parole de Dieu, de leur donner une capacité à se retrouver dans l’Evangile, de leur permettre d’entendre des récits de l’Evangile, de les mimer, de les mémoriser, de les intégrer comme faisant partie de leur propre histoire. D’ailleurs, cette place centrale de la Parole de Dieu dans la mission catéchétique, correspond à sa place dans l’édifice de la foi chrétienne.

Ensuite, cette Parole de Dieu doit être mise en pratique. Elle ne doit pas rester à l’état d’une sorte de bagage acquis, mais doit devenir une ressource pour vivre. Apprendre à la mettre en pratique ne consiste pas à déduire automatiquement des comportements obligatoires de tel ou tel passage de l’Evangile, comme si l’Evangile n’était susceptible que d’une seule interprétation. C’est développer sous la lumière et la conduite de l’Esprit Saint une capacité de comprendre et d’intégrer la Parole de Dieu dans la situation où nous sommes. Cela nécessite de faire grandir la capacité de questionnement des jeunes pour qu’ils s’interrogent quand ils entendent la Parole de Dieu et n’entrent pas dans des réponses toutes faites sur la manière de la mettre en pratique dans leur vie. Par exemple, si l’on médite des versets comme « aimez-vous les uns les autres », ou « faites du bien à ceux qui vous font du mal », il s’agit moins de déduire un comportement défini que de susciter et d’encourager chacun et chacune à chercher dans sa vie qui il a à aimer, à qui il est invité à faire du bien, ou, pour reprendre la parabole du Bon Samaritain, qui peut être son prochain, celui dont il se fait proche. Cela suppose d’être capable de réfléchir et de méditer sur sa propre vie.

Éduquer en chaque enfant une capacité d’accueillir la Parole de Dieu comme une lumière sur sa vie ; faire grandir chez le jeune la volonté de répondre à l’appel du Christ à mettre cette Parole en pratique comme une ligne de conduite pour chaque journée de son existence ; c’est mettre en place les fondations d’une personnalité qui résistera aux différentes épreuves qui ne manqueront pas de se présenter au long de sa vie.

Enfin, je vous souhaite que ce travail suscite aussi pour vous un renouvellement dans l’accueil de la Parole de Dieu et fortifie votre désir et votre capacité à la mettre en pratique. Car notre seule manière d’instruire sur la vie chrétienne est d’essayer nous-mêmes de vivre en chrétiens et d’en témoigner auprès des jeunes qui nous sont confiés. Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois,
archevêque de Paris

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